Objectif : 400.000 nouveaux soldats. La Russie change de méthode et lance une grande campagne de recrutement

Poutine veut 400.000 nouveaux soldats en 2023, et des volontaires cette fois-ci. La campagne de recrutement doit commencer ce 1er avril. On peut déjà douter que les Russes se pressent en masse vers les bureaux de recrutement, alors que sur le front, l’initiative semble repasser aux Ukrainiens.

Pourquoi est-ce important ?

Alors que l'armée ukrainienne monte en puissance, avec de nouvelles divisions sortant de leur période d'entrainement, et surtout du matériel lourd occidental qui arrive au compte-goutte, l'armée russe doit faire de même, et à tout le moins compenser les pertes de sa coûteuse offensive sur Bakhmout. Mais le Kremlin craint les troubles que pourrait causer une seconde vague de mobilisation.

Dans l’actualité : le gouvernement russe veut recruter 400.000 soldats supplémentaires cette année pour nourrir sa guerre, et tente d’attirer des engagés volontaires plutôt que de mobiliser de force, de peur de provoquer de nouveaux troubles dans le pays.

Éviter une nouvelle mobilisation désastreuse

  • Le ministère russe de la Défense prévoit de lancer cette campagne de recrutement de grande ampleur le 1er avril prochain.
  • Les fonctionnaires régionaux ont reçu des quotas de recrutement et convoquent les volontaires potentiels pour qu’ils se présentent aux commissions de recrutement, où ils sont invités à s’engager, selon les sources de Bloomberg.
  • Ces nouveaux engagés seront donc, techniquement, des volontaires et non des conscrits. Une manière de contourner l’interdiction (théorique) de déployer des conscrits hors du territoire national tant que celui-ci n’est pas officiellement en guerre.
  • On peut douter de la motivation de ces volontaires. Si la Russie n’hésite pas à faire miroiter prestige et salaire avantageux aux soldats potentiels, des cas de conscrits victimes de pression pour signer des papiers d’engagements nous sont parvenus, et ce, depuis le début de la guerre.
  • Une manière de maintenir sur pied le récit de « l’opération militaire spéciale » auprès de la population civile, bien que la rhétorique du régime vire de plus en plus vers l’évocation d’une « lutte pour la survie » de l’État russe face à l’Occident.
  • La mobilisation « partielle » décrétée en septembre dernier, qui devait traîner 200.000 Russes sous les drapeaux, est très mal passée auprès de la population, pour qui le conflit est devenu tout d’un coup beaucoup plus concret. Des dizaines de milliers de mobilisables ont fui le pays, tandis que les cas d’automutilation, voire les affrontements avec les forces de l’ordre, se sont multipliés. Et là, le Kremlin en veut deux fois plus, même si ce nombre s’étalera sur un an. Dans un pays déjà saigné de sa jeunesse, cela semble aussi peu réaliste que dramatique.
  • Une très mauvaise presse que Poutine veut éviter de réitérer, alors que la guerre n’avance pas et que les élections approchent. Il n’est officiellement pas candidat à sa propre réélection, mais personne ne semble vraiment dupe.

L’initiative va encore changer de main

Sur le front : une offensive d’hiver qui s’est enlisée, et des Ukrainiens qui préparent quelque chose.

  • La Russie a passé tout l’hiver à mettre la pression sur les Ukrainiens, en particulier à Bakhmout. Mais la ville, ou ce qu’il en reste, n’est jamais tombée malgré les efforts des mercenaires de Wagner, qui accuseraient des pertes très lourdes.
  • L’armée russe manque d’hommes, mais aussi de matériel lourd : on a récemment vu sortir des réserves de nombreux chars T-54 et T-55, des engins de la première phase de la guerre froide, au mieux obsolètes, bien qu’ils puissent encore faire masse dans les rangs ou constituer une réserve mobile. Pendant ce temps, l’Ukraine reçoit des Leopard bien plus modernes.
  • L’Ukraine semble avoir pu se constituer une réserve avec des unités mises au repos, ou de retour de formation. Des divisions fraîches qui pourraient peser sur le front quand elles entreront en action. Les Russes s’en doutent, et s’en inquiètent. Si leur front est plus solide que lors de la grande contre-offensive ukrainienne de juin dernier, l’initiative va visiblement encore changer de camp. Et l’armée russe n’a pas vraiment profité de son tour à avoir les dés en main.
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