L’économie chinoise se contracte à un rythme alarmant avec très peu de mesures de relance en vue.
Les confinements sans fin pour contrôler le Covid-19 font fuir les investisseurs chinois des marchés boursiers et obligataires. Les économistes voient maintenant des prévisions de croissance négative pour la Chine pour les deux prochains trimestres. La probabilité d’une récession en Chine a atteint 23 % en avril, contre 16 % en mars, selon Bloomberg.
D’après les derniers indicateurs de production et de consommation, la deuxième économie mondiale ne se porte effectivement pas bien. Plusieurs rapports montrent que l’industrie manufacturière chinoise se contracte tandis que les dépenses des clients s’effondrent. Au cours du premier trimestre de cette année, les marchés boursiers chinois ont déjà perdu 1.700 milliards de dollars en valeur de marché, rapporte le journal South China Morning Post. Le marché boursier de Hong Kong a vu s’évaporer 437 milliards de dollars de valeur au cours de la même période.
En avril, l’indice composite de Shanghai, qui regroupe toutes les actions négociées à la Bourse de Shanghai, a également chuté de 6,3 %. C’est le deuxième mois consécutif que l’indice boursier perd de la valeur, ce qui fait que Shanghai est actuellement le pire marché boursier de toute la région. L’indice Hang Seng, l’indice de la bourse de Hong Kong, a aussi subi une perte de 3,4 % en avril.
Il y a ensuite le MSCI China Index, un indice complet de 724 grandes et moyennes entreprises du pays, qui vaut 2.200 milliards de dollars. Cet indice boursier a déjà perdu 17 % de sa valeur cette année. En 2021, cet indice boursier a également subi une chute de 22 %.
Le moment est-il enfin venu pour Xi Jinping de sortir le bazooka monétaire ou d’assouplir les politiques de marché pour soutenir les investisseurs en panique ?
Le plus gros bazooka disponible : pas cette fois-ci
Pour l’instant, la Chine a soigneusement évité de lancer un « raz-de-marée de mesures de stimulation » sur les marchés pour relancer l’économie. Cette réticence s’explique peut-être par le bazooka de 4.000 milliards de yuans avec lequel Pékin a tiré sur l’économie après la crise financière de 2008. Au cours de la décennie suivante, cela a conduit à une montagne de dettes pour toutes sortes d’entreprises privées, à un monde florissant de banques parallèles et à une dangereuse inflation des prix de l’immobilier.
Pourtant, certains investisseurs restent persuadés que les autorités de Pékin parviendront à sauver l’économie chinoise. En effet, 2022 est une année importante pour le président Xi Jinping, qui souhaite bientôt asseoir son pouvoir sur la Chine grâce à un troisième mandat. Toutefois, le 15 juin, Xi Jinping franchira le cap des 68 ans, âge auquel les hommes politiques chinois quittent normalement leurs fonctions, grâce à une règle officieuse.
Le gouvernement chinois n’apportera pas un grand soutien cette fois-ci, estime Norman Villamin, directeur des investissements de la banque privée suisse Union Bancaire Privée. « Les responsables politiques ont déployé le plus gros bazooka disponible pour une grande économie après la crise financière mondiale. Troquer la viabilité à long terme de l’économie contre une croissance à court terme est un choix qu’ils ne veulent pas faire. La Chine essaie d’éviter cette voie cette fois-ci », a déclaré M. Villamin au South China Morning Post.
Cela explique pourquoi les investisseurs étrangers fuient les marchés chinois en masse. L’Union Bancaire Privée s’est retirée des actions chinoises en mars, après avoir précédemment réduit ses titres de Hong Kong et ses positions dans les crédits chinois, a déclaré Villamin. La banque suisse Julius Baer a également déclaré le mois dernier que les actions chinoises ne constitueront plus « une partie essentielle de ses actifs ».
Xi n’a aucun problème à ralentir son économie
Le gouvernement chinois va-t-il rester les bras croisés alors que son économie s’effondre à la vitesse de l’éclair à cause d’une bataille peut-être impossible contre le Covid-19 ? Pour l’instant, il semble que Xi Jinping n’ait eu aucun problème à sabrer dans l’économie pour assurer son héritage de « prospérité partagée » et de « pensée Xi Jinping ».
Le Politburo du Parti communiste, dont font partie le président Xi et le Premier ministre Li Keqiang, a annoncé la semaine dernière qu’il souhaitait utiliser de « nouveaux outils » pour affiner les politiques économiques de la Chine et limiter les retombées des confinements. Cela comprendrait une mise en œuvre accélérée des réductions d’impôts et des politiques de soutien, ainsi que l’utilisation de « nouveaux » outils de politique monétaire et de certains « investissements efficaces ». On ne sait pas encore ce que Pékin entend par là.
En tout état de cause, les autorités devront faire preuve d’intelligence pour contenir la crise actuelle. Cette fois, il n’y a pas de boom immobilier sur lequel la Chine peut s’appuyer pour résoudre ses problèmes.
« Nous pensons pour le moment que le mouvement de réforme (de Xi, ndlr) au sein de l’économie continue de dominer. Nous devons constater davantage de progrès, par exemple en restructurant le secteur de l’immobilier. Ce sera une base importante sur laquelle une reflation plus durable de l’économie chinoise pourra émerger », estime M. Villamin.
La reflation consiste à stimuler l’économie en augmentant la masse monétaire ou en réduisant les impôts. Le bazooka que Xi Jinping brandit actuellement ne ressemble à aucun des deux.