Le couperet que la Commission européenne a fixé au dessus de l’industrie automobile, à savoir l’interdiction de vente de nouveaux véhicules thermiques d’ici 2035, aura aussi un impact sur d’autres secteurs économiques périphériques.
Si les moteurs à combustion interne continueront à rouler, en nombre décroissant, au cours des prochaines décennies, la demande de carburants liquides devrait progressivement diminuer à mesure que la part des véhicules à émissions nulles augmente. Une préoccupation certaine pour les filières de l’énergie, et compris celle des biocarburants ; mais si celle-ci perd le secteur automobile, elle compte se rabattre vers d’autres aspects de la mobilité, plus difficiles à convertir à l’électricité.
L’avion, l’avenir ?
« Nous voyons un très grand marché pour le biodiesel dans le secteur des véhicules utilitaires lourds et, bien sûr, dans les secteurs maritime et aérien. Dans l’aviation en particulier, il n’y a pas vraiment d’autre solution que de continuer à utiliser des carburants liquides », a déclaré auprès d’Euractiv André Paula Santos, directeur des affaires publiques de l’European Biodiesel Board (EBB), une association commerciale représentant les producteurs de biodiesel. « En mer, il existe de nombreuses alternatives sur le marché, mais elles sont toutes beaucoup plus chères que le biodiesel. Le biodiesel est probablement le moyen le plus rentable de commencer immédiatement à décarboner le secteur maritime. »
Alors que le secteur aérien cherche désespérément des alternatives aux énergies fossiles qui ne provoqueraient pas une hausse trop importante des prix des vols, le secteur du biocarburant se voit en alternative logique. Bruxelles a fixé une limite de 7 % à la quantité de biocarburants d’origine végétale que les pays de l’UE peuvent utiliser dans leur secteur des transports. À mesure que le pourcentage de biocarburants dans le secteur routier diminue, l’introduction de biocarburants d’origine végétale dans le secteur de l’aviation pourrait se faire tout en « respectant les plafonds et les critères de durabilité mis en place dans le cadre de la directive européenne sur les énergies renouvelables » estime Santos.
Des camions qui roulent à l’hydrogène, ou au maïs ?
Autre débouché possible, le transport autoroutier : si des camions électriques sont en développement, leur autonomie n’est pas toujours jugée suffisante, et surtout l’infrastructure de recharge se fait encore attendre. Si l’hydrogène a longtemps été évoqué comme solution, les biocarburants peuvent aussi jouer un rôle intéressant. Les mêmes enjeux, à une tout autre échelle, se posent d’ailleurs pour le fret maritime.
Le secteur des biocarburants a toutefois un urgent besoin de verdir à nouveau son image, car, si c’était un coup dur de les voir mis dans la même catégorie que les dérivés du pétrole, ces carburants à base de plantes comestibles – canne à sucre ou betterave, mais aussi blé ou maïs- sont aussi accusés de jouer un rôle dans les pénuries alimentaires que traverse la planète. Un rôle que, bien sûr, le secteur nie fermement.
Le problème de l’agriculture
« Nous ne disons pas qu’il faut augmenter les cultures de manière exponentielle ni qu’il faut doubler ou tripler notre production, car nous comprenons l’ambiance politique dans laquelle nous vivons. Beaucoup de gens n’y croiront probablement pas. Mais nous disons que, dans les mêmes quantités que celles que nous utilisons actuellement, nous pouvons réorienter les ressources là où elles sont nécessaires. »
Une précaution nécessaire, car l’industrie des biocarburants occupe de facto des terres agricoles qui peuvent nourrir l’humanité et, surtout, qui ont souvent été défrichées sur les forêts primaires, en particulier en Amérique du Sud. Augmenter la production du secteur resterait donc une idée à double tranchant.