La multinationale anglo-néerlandaise Unilever menace de cesser de confier ses campagnes de publicités à Google et Facebook si les deux géants de l’Internet ne prennent pas des mesures pour éviter la propagation de fausses nouvelles, les contenus discutables, et ceux dont le seul objet est de monter les gens les uns contre les autres.
« Un marigot d’informations montées de toutes pièces, de contenus racistes, sexistes et extrémistes »
Lors d’un discours qu’il a donné lundi à la conférence annuelle de l’Interactive Advertising Bureau à Palm Desert, en Californie, Keith Weed (notre photo), le directeur du marketing de la société, a décrit les réseaux en ligne comme un “marigot d’informations montées de toutes pièces, de contenus racistes, sexistes et extrémistes”. C’est ce que rapporte le journal américain USA Today, qui a obtenu une copie de ce discours. “Certaines parties de l’Internet auxquelles nous avons abouti sont aux antipodes de ce que nous pensions que nous obtiendrions. »
« En tant qu’entreprise axée sur ses marques, unilever doit inspirer confiance à ses consommateurs. Nous ne devons rien faire qui puisse nuire à cette confiance – y compris le choix des canaux et des plateformes que nous utilisons [pour faire de la publicité]. 2018 sera donc l’année où les médias sociaux devront regagner cette confiance », a déclaré Weed.
Weed a également indiqué qu’il s’était récemment assis à la même table que Facebook, Google, Twitter, Snap et Amazon, et leur a dit qu’il “était essentiel que les marques [d’Unilever] demeurent non seulement dans un environnement sûr, mais également dans un environnement convenable. Nous ne pouvons pas continuer à soutenir une chaîne de solutions numériques – celle qui diffuse plus d’un quart de notre publicité auprès des consommateurs – qui ne vaut parfois pas mieux qu’un marigot en termes de transparence”.
7 milliards d’euros par an
Unilever est le quatrième annonceur mondial avec un budget de 7 milliards d’euros. Il fait de la publicité pour des marques telles que Ben & Jerry, Becel, Calvé, Knorr, Dove, Ola (Magnum) Persil et Lipton. L’entreprise consacre environ un quart de son budget à la publicité en ligne. Seuls Procter & Gamble, Samsung et Nestlé consacrent encore plus pour la publicité.
Procter & Gamble
Or, en août de l’année dernière, Jon Moeller, directeur financier du groupe américain Procter & Gamble (P & G), a annoncé que la multinationale avait décidé de réduire son budget publicitaire numérique dans une fourchette comprise entre 100 et 140 millions de dollars pour le dernier trimestre. Procter & Gamble déplorait le mauvais placement de ses campagnes en ligne, notamment sur les forums en ligne « où les publicités n’étaient pas placées conformément à nos normes et spécifications », pouvait-on lire dans son rapport financier pour le quatrième trimestre de la société.
Selon certaines sources, elle aurait également décidé d’abandonner la publicité sur YouTube en mars 2017, de concert avec d’autres annonceurs, en raison de soucis de sécurité pour la réputation de ses marques. En effet, ses spots apparaissaient sur des vidéos incompatibles avec les objectifs et valeurs de la société. Moeller a également fait mention du faux trafic généré par les bots, expliquant qu’il ne voulait pas payer pour de la publicité regardée par un robot.
© Win McNamee/Getty Images
Facebook dans l’oeil du cyclone
L’avertissement d’Unilever survient après la révélation que Facebook allait perdre 2 millions de jeunes utilisateurs aux États-Unis rien que pour cette année.
Aujourd’hui, on a également appris qu’un tribunal allemand avait considéré que les paramètres de confidentialité par défaut du réseaux social, de même que son utilisation des données personnelles contrevenaient à la loi allemande. La cour a jugé que Facebook collectait les données personnelles de ses utilisateurs sans les informer suffisamment ses utilisateurs.
“Facebook dissimule des paramètres par défaut qui ne sont pas respectueux de la vie privée dans son centre de confidentialité et n’informe pas suffisamment ses utilisateurs concernant ce point lorsqu’ils s’enregistrent. Les conditions du consentement éclairé ne sont donc pas remplies”, a expliqué Heiko Duenkel, qui dirige le service contentieux de la Fédération des organisations de consommateurs allemands (VZVB), qui avait porté plainte.
Facebook a annoncé qu’elle allait faire appel.
A la fin du mois de décembre, l’Office allemand des cartels avait déjà accusé le réseau social d’abus de position dominante, et qu’il avait profité de cette domination pour recueillir des données de ses utilisateurs sans avoir obtenu préalablement leur consentement.
Les choses se compliquent de jour en jour pour plus gros réseau social du monde. La tempête qui a commencé après les élections présidentielles américaines de 2016 est loin d’être terminée. Non seulement le réseau social coté en bourse demeure une énorme entreprise opaque, mais il continue de soutenir qu’il n’est pas une entreprise des médias, bien qu’une grande partie de ses 2 milliards de visiteurs quotidiens viennent y chercher des actualités. Rien qu’aux États-Unis, cela représente 45 % de la population.