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Le grand fiasco des trains à hydrogène en Allemagne

Le grand fiasco des trains à hydrogène en Allemagne
Volker Wissing (FDP), ministre fédéral des Transports et Knut Ringat, directeur du Rhein-Main-Verkehrsverbund (RMV) à côté du premier train à hydrogène livré. (Photo by Frank Rumpenhorst/picture alliance via Getty Images)

Annoncé en grande pompe lors de leur commande, pour remplacer des machines au diesel polluantes dans la région de Francfort en Allemagne, les trains à hydrogène sont aujourd’hui surtout une source de problèmes pour la société de transports en commun locale. Démissions de conducteurs, bus et locomotives au diesel de substitution, retards de livraison : rien ne va plus.

Pourquoi est-ce important ?

L'hydrogène peut-il être un bon carburant ? La question fait débat. Selon ses défenseurs, l'H2 n'émet pas de gaz à effet de serre (lors de son utilisation dans une pile à combustion) et serait ainsi une option pour remplacer les moteurs thermiques de trains, bus ou même paquebots. Selon ses opposants, sa production peut être polluante et il s'agirait d'une absurdité s'il est produit de manière propre : autant utiliser l'énergie renouvelable directement pour charger les batteries des véhicules électriques, clament-ils.

Les faits : de nombreuses complications sur le réseau de chemins de fer en région de Francfort.

  • Au début de cette année, les trains ont régulièrement dû être remplacés par des bus de substitution, et cela, pour des périodes de plus de deux semaines, chaque fois. Il s’agit de problèmes de ravitaillement en carburant, rapporte Wattisduurzam, un site spécialisé sur les énergies nouvelles.
  • Une situation qui amène la compagnie de transports en commun, Start, à louer des locomotives au diesel supplémentaires pour pallier les défaillances.
  • Mais c’est là que le prochain problème se crée : les conducteurs doivent passer de nombreuses formations pour apprendre à rouler avec ces machines de remplacement ; en plus de leurs heures de travail. En peu de temps, ils ont dû apprendre à rouler sur quatre engins différents, rapporte le média local Hessenschau.
    • Une situation qui a déplu à bon nombre d’entre eux. La semaine dernière, une douzaine de conducteurs a démissionné.
    • Résultat : ces deux dernières semaines, de nombreux trajets doivent être annulés, faute de personnel. Souvent même à la dernière minute, lorsqu’un conducteur tombe malade.
    • La compagnie assure qu’elle a déjà trouvé des remplaçants et que les opérations devraient dorénavant devenir plus « fiables ».

Zoom arrière : un problème de trains, aussi.

  • Les trains présents et défaillants ne sont qu’une partie du problème. Les trains absents compliquent aussi la chose.
  • En effet, Start avait commandé 27 trains – ils devaient être la plus grande flotte de trains à hydrogène du monde. Alstom avait obtenu le chantier public (de 500 millions d’euros) en 2020. Fin 2022, ils devaient tous entrer en service, mais seuls deux trains circulaient finalement sur le réseau à cette date.
    • Sur les quatre lignes exploitées par la compagnie, une seule est d’ailleurs couverte par les trains à hydrogène.
  • Aujourd’hui, seuls 11 ont été livrés, en tout, selon Hessenschau. Les autres se font toujours attendre, et Alstom ne fait que reporter la livraison. Aux dernières nouvelles, elle serait prévue pour le troisième trimestre.

Fiche technique : les trains ont une autonomie de 1.000 kilomètres, pour deux réservoirs d’hydrogène pesant ensemble 250 tonnes. Ils ont une vitesse de pointe de 140 kilomètres/heure et une capacité de 160 sièges.

Le détail : écologique ?

  • Les locomotives au diesel continuent ainsi à rouler sur le réseau (en plus des locomotives au diesel appelées en renfort), le temps que les trains à hydrogène, censés les remplacer, arrivent. Voilà une première source de pollution.
  • Ensuite, l’hydrogène en question, produit par l’industrie chimique locale, n’est pas « vert », rappelle Wattisduurzam.
    • Pour mémoire, l’hydrogène vert est produit via électrolyse, avec de l’énergie renouvelable. Mais l’hydrogène peut aussi être récupéré via du méthane chauffé, ce qui est une méthode très polluante.
  • Le site spécialisé se demande alors s’il ne serait pas plus judicieux d’utiliser des trains à batterie rechargeable pour remplacer les machines au diesel, sur des trajets courts comme c’est le cas à Francfort. Le train classique, alimenté via des lignes aériennes, est encore plus efficace, mais installer tout un réseau de câbles est coûteux, admet-il. Les compagnies pourraient cependant ne pas installer tout un réseau continu et laisser des portions sans câbles, où le train peut rouler à l’aide de la batterie, imagine-t-il.

L’échec du matériel roulant à hydrogène n’est pas une disqualification immédiate – presque toutes les nouvelles technologies connaissent des problèmes de démarrage – mais que ces problèmes de démarrage servent de leçon aux autres opérateurs ferroviaires qui envisagent les trains à hydrogène comme une alternative à l’installation de câbles aériens ; l’infrastructure de l’hydrogène n’est pas si simple non plus.

Wattisduurzam.nl
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