Selon une analyse d’Oxford Economics, le commerce mondial reste dans le creux de la vague, après le ralentissement dû à la pandémie. C’est dû à quatre facteurs. Le groupe de réflexion voit des risques à long terme de ralentissement structurel de l’intégration du commerce mondial. Ou comment il pourrait bien y avoir une slowbalisation après la globalisation.
La bonne nouvelle : la chaîne d’approvisionnement se rétablit
Tout d’abord, les bonnes nouvelles. Tous les indicateurs montrent que la chaîne d’approvisionnement internationale revient à la normale après les chocs causés par la pandémie. Les coûts du fret ont baissé, le trafic de conteneurs rattrape les retards et les prix de l’énergie ont baissé par rapport à leur niveau record.
« Même avec la récente flambée des prix du pétrole stimulée par l’OPEP, nos projections de base indiquent que les prix mondiaux du pétrole en 2023 sont en moyenne inférieurs de 14% à ceux de 2022 et que les prix du gaz sont inférieurs de 60% », écrit Oxford Economics. Les entreprises ont ainsi plus de marge de manœuvre pour réaliser de gros investissements et les expéditions par conteneurs sont moins chères.
Mais ensuite, les freins.
Frein 1 : séquelles de la pandémie
Mais cela n’élimine pas tous les effets négatifs de la pandémie sur le commerce mondial, soulignent les chercheurs.
- Par exemple, le commerce des voitures est encore inférieur de 8% au niveau moyen de 2019 et le commerce des produits liés à l’aviation de 40% au niveau de 2019.
- Le tourisme mondial, qui est en quelque sorte aussi un produit d’exportation, se redresse, mais pas partout de la même manière. Plusieurs destinations asiatiques souffrent du retour encore lent des touristes chinois.
- « Paradoxalement, la fin de la pandémie a un impact négatif sur un autre secteur important : les semi-conducteurs », note le groupe de réflexion. Pendant la période de confinement, la demande de puces a explosé en raison d’une hausse de la demande en électronique grand public. Cela s’est transformé, aujourd’hui, en un ralentissement du secteur des puces.
Frein 2 : hausse des taux d’intérêt
La forte hausse des taux d’intérêt au niveau mondial affecte les investissements en machines et autres biens d’équipement. « Le commerce des biens d’équipement pourrait diminuer de 10% dans les économies avancées en raison de la stagnation de l’investissement mondial », prédit Oxford Economics.
Ou encore : si les coûts de l’énergie diminuent pour les entreprises, leurs coûts financiers augmentent, car elles doivent contracter de nombreux crédits. Le resserrement des conditions de crédit à la suite des récents problèmes du secteur bancaire pourrait encore compliquer l’octroi de prêts pour les grands investissements des entreprises.
Frein 3 : le « découplage » occidental par rapport à la Chine
L’Inflation Reduction Act, le plan américain de subventions à ses propres industries, a entraîné une vague de contre-mesures protectionnistes.
Le découplage des échanges commerciaux entre les États-Unis et la Chine est évident dans les chiffres, en particulier dans le domaine de l’électronique. Au cours du dernier trimestre 2022, la part des importations américaines en provenance de Chine est tombée à 13,9%, contre 21% en 2018. La part de marché de la Chine dans les importations américaines d’électronique et d’ordinateurs a chuté de 50% à 30% au cours de cette période.
Frein 4 : Moins d’investissements étrangers
Le Fonds monétaire international (FMI) constate une « fragmentation » des investissements étrangers. Celle-ci se manifeste, entre autres, par une diminution du nombre de nouvelles usines que les multinationales installent loin de leur pays d’origine.
« Il est difficile de savoir s’il s’agit d’un effet de la démondialisation ou d’un simple ralentissement cyclique – il pourrait s’agir des deux à la fois », explique Oxford Economics. « Mais dans tous les cas, cela devrait renforcer le ralentissement de la croissance du commerce mondial à moyen terme. »
Conclusion
Le volume des échanges de marchandises a commencé à se contracter au quatrième trimestre 2022 et Oxford Economics s’attend à de nouvelles baisses au cours de l’actuel premier semestre 2023, avec une possible stabilisation ou reprise à l’automne. Un déclin structurel à moyen terme du commerce mondial n’est pas prévu, mais un fort ralentissement de la croissance semble probable.
Oxford Economics : « Tout indique une slowbalisation, exacerbée par le découplage entre l’Occident et la Chine, par la baisse des investissements directs étrangers et peut-être aussi par de nouvelles mesures protectionnistes ».
(CP)