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Réforme de l’impôt des propriétaires à Bruxelles : la taxation différenciée dans les communes, un jeu dangereux ?

Réforme de l’impôt des propriétaires à Bruxelles : la taxation différenciée dans les communes, un jeu dangereux ?
À Bruxelles, être propriétaire, c’est parfois compliqué. (Photo by: Andia/Universal Images Group via Getty Images)

Dans notre pays découpé dans tous les sens, il n’y a pas que l’État fédéral qui travaille sur des réformes de la fiscalité. Les régions s’y attèlent également de leur côté, mais quand les communes commencent aussi à avoir leur mot à dire, la situation devient encore plus complexe. Décryptage.

Quand les communes comptent les centimes

Actuellement : les propriétaires doivent s’acquitter d’un précompte immobilier, une taxe régionale annuelle sur les maisons, les appartements, ou encore les terrains qu’ils possèdent. Il est calculé sur la base du revenu cadastral, un revenu fictif qui correspond au revenu annuel moyen net qu’un immeuble procurerait à son propriétaire. Le taux de base régional pour tous biens immobiliers est de 1,25% du revenu cadastral indexé, mais il existe des mécanismes de réduction.

  • Une partie du précompte revient à la Région bruxelloise, mais une autre atterrit dans la poche des communes, et celle-ci est calculée via le mécanisme des « centimes additionnels ». Pour chaque euro versé à la région, la commune perçoit un multiplicateur, qui est en moyenne de 2.940 centimes additionnels.
  • Chaque euro versé à la Région de Bruxelles-Capitale s’accompagne donc, en moyenne, de 29,40 euros payés à la commune par les propriétaires. Et les divergences sont grandes d’une commune à l’autre, rappelle l’Ibsa, l’Institut bruxellois de statistiques et d’analyses : 1.990 centimes additionnels à Auderghem, contre 3.390 à Schaerbeek.

Le détail : huit des 19 communes de la capitale vont augmenter ce multiplicateur cette année.

Le projet de réforme

Mais ce taux est le même partout au sein d’une même commune, ce qui ne reflète donc pas les différences sociales ou d’usage du bâti d’un quartier à l’autre. Les bourgmestres bruxellois étudient donc une méthode pour rendre ce système plus souple.

« La différenciation ne doit pas obligatoirement avoir lieu par quartier ou partie de la ville. La commune peut appliquer d’autres critères, par exemple l’utilisation qui est faite du bien immobilier (privée ou professionnelle) ou la qualité du contribuable (résident ou non-résident) »

Un extrait du compte rendu du groupe de travail, repris par La Libre
  • Le sujet ne fait toutefois pas l’unanimité, et l’opposition dans les différentes communes – NV-A, entre autres – craint que ce genre de réforme ne fasse que stimuler un exode urbain des propriétaires, donc des classes moyennes et supérieures. Un mouvement déjà bien présent, la population de Bruxelles ayant apparemment atteint son pic de croissance.
  • Bruxelles Fiscalité, l’organisme public chargé des conseils financiers aux particuliers dans la capitale, a examiné la situation, tout en soulignant que la taxation différenciée n’était pas une nouveauté dans notre pays : elle est déjà pratiquée en Flandre, dans six communes.

« Les exemples des communes flamandes montrent que seules des différenciations simples ont été possibles jusqu’à présent, par exemple, entre zones non bâties et zones bâties. En effet, les données du cadastre ne permettent pas de distinguer facilement, par exemple, les surfaces de bureaux. »

Bruxelles Fiscalité

Un cadre de référence de 1975

C’est là tout le problème : sans données précises sur l’usage exact du bâti, de telles mesures risquent de donner un rendu chaotique. Or le cadastre belge – une compétence fédérale – n’est notoirement pas à jour : le moment de référence utilisé pour calculer la valeur locative moyenne nette d’un an du bien immeuble est fixé au 1ᵉʳ janvier 1975.

  • « Il convient d’être prudent quant à l’utilisation du précompte immobilier comme instrument pour mettre en œuvre une simple augmentation d’impôt et une mesure sociale. En effet, le risque d’effets pervers et de litiges juridiques est réel », estime prudemment Bruxelles Fiscalité.
  • Du côté des bourgmestres, on nuance : pour l’instant, ce sont seulement des pistes. Et la différenciation pourrait se faire sur de nombreux critères autres que la localisation, comme la taille de l’immeuble ou son usage (logements, bureaux, commerces). Encore que de nombreux bâtiments soient en fait d’un usage mixte. Affaire à suivre donc, qui va peut-être devenir le prochain grand casse-tête administratif bruxellois.
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