Les médias américains, Politico en tête, s’accordent à dire que Joe Biden a décidé de nommer Lloyd Austin comme secrétaire à la Défense. Cet ex-général va devenir le premier Afro-Américain à prendre la tête du Pentagone.
Le président-élu Joe Biden devrait officialiser la nouvelle ce mardi, en nommant Lloyd Austin comme son futur secrétaire à la Défense. Si le Sénat approuve son choix, cet ancien général deviendra le premier Afro-Américain à s’installer au Pentagone.
Cette désignation est assez surprenante. Si Austin est confirmé, il aura obtenu la préséance sur Michèle Flournoy, sous-secrétaire à la politique de Défense des États-Unis (2009-2012), sous l’administration Obama. Elle aurait été la première femme à être désignée en tant que secrétaire à la Défense américaine.
Un autre nom régulièrement cité était celui de Jeh Johnson, ancien secrétaire à la Sécurité intérieure des États-Unis (2013-2017), lui aussi sous l’administration Obama. Critiqué pour son rôle actif dans la détention et l’expulsion de familles entrées illégalement sur le territoire, il n’aura finalement pas été choisi.
Parcours et atouts
Ancien général au sein de l’armée américaine, Lloyd Austin avait été promu en 2012 au poste de vice-chef d’état-major de l’armée de terre, devenant le premier homme noir à occuper cette fonction. Un an plus tard, il avait été nommé à la tête du Centcom, le commandement central de l’armée américaine. Là aussi, il s’agissait d’une première pour un Afro-Américain.
Austin a principalement combattu en Irak. Il y a eu un rôle important dans l’augmentation des forces américaines, en 2007. Il était également intervenu pour le retrait de 50.000 hommes, en 2011. C’est lors de cette période qu’il a établi des contacts rapprochés avec Biden, alors vice-président. Les deux hommes ont étroitement collaboré afin de mener à bien la politique demandée par Obama.
C’est notamment parce que Biden a apprécié travailler avec Austin qu’il l’a choisi comme secrétaire à la Défense. Mais pas seulement. Parmi les autres qualités qu’on lui loue, il serait un expert de la logistique. Alors que les États-Unis s’apprêtent à devoir diriger une gigantesque opération d’approvisionnement de vaccins, les talents d’Austin en la matière auraient séduit.
Austin est aussi connu pour être un ‘bon soldat’. Comprenez qu’il se met rarement en porte-à-faux avec sa hiérarchie, ne rechignant jamais à réaliser le programme du président en place, quelle que soit sa nature. Biden apprécierait également le fait qu’il n’aime pas se mettre sous le feu des projecteurs, préférant travailler dans l’ombre.
Enfin, les analystes estiment que la couleur de peau d’Austin a pu jouer un rôle dans la décision de Biden, qui se devait de tenir sa promesse d’ajouter de la diversité au sein des autorités américaines. L’armée a d’ailleurs souvent été ciblée pour nommer quasi exclusivement des blancs à ses plus hauts postes.
Critiques
La future nomination d’Austin ne fait pas que des heureux, notamment dans le camp progressiste. On lui reproche de faire partie du conseil d’administration du géant de l’armement Raytheon Technologies, grand fournisseur du Pentagone. Cependant, les défenseurs d’Austin arguent que ses principaux rivaux dans la course au secrétariat de la Défense n’étaient pas en reste en matière de liens avec les fabricants d’armes.
Ses détracteurs lui reprochent également des manquements lors de ses dernières opérations en tant que directeur du Centcom. En 2015, sous son commandement, les États-Unis avaient investi 500 millions de dollars afin de former des combattants destinés à affronter l’Etat Islamique en Syrie. Une campagne coûteuse qui n’avait pas eu les résultats escomptés.
Autre critique: sous sa direction, le Centcom aurait minimisé les rapports des services de renseignement sur la menace posée par le groupe terroriste sur le sol américain. L’inspecteur général du département de la Défense avait même lancé une enquête visant le commandement d’Austin. Il avait finalement été blanchi.
Enfin, les analystes estiment que le choix d’une personne issue de l’armée est néfaste à l’équilibre civilo-militaire censé régner au Pentagone, Trump s’étant principalement entouré d’anciens militaires (Flynn, Mattis, Miller, Kelly, …). Beaucoup estiment que Biden envoie un mauvais signal.
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Besoin d’une dérogation
Etant donné que Austin n’a quitté l’armée qu’en 2016, il ne dispose pas des sept années de retraite requises pour pouvoir prétendre au poste de secrétaire à la Défense. Il va donc devoir demander une autorisation particulière devant le Congrès.
Il y a quatre ans, James Mattis, n’avait lui aussi mis un terme à sa carrière militaire que quatre ans avant d’être choisi par Trump pour prendre la tête du Pentagone. Il avait obtenu une dérogation auprès du Congrès. Cependant, certains de ses membres seraient désormais réfractaires à l’idée d’octroyer une deuxième autorisation particulière aussi rapidement. Cet accord exceptionnel est pourtant nécessaire à la nomination d’Austin comme secrétaire à la Défense.