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Quand Patrick Pouyanné (TotalEnergies) dézingue « madame Soleil » Catherine MacGregor (Engie) et le coût de l’énergie renouvelable

Quand Patrick Pouyanné (TotalEnergies) dézingue « madame Soleil » Catherine MacGregor (Engie) et le coût de l’énergie renouvelable
Patrick Pouyanne : Andrey Rudakov/Bloomberg via Getty Images

Le patron de TotalEnergies est un personnage haut en couleur. Et il n’est certainement pas à son coup d’essai pour mettre en garde l’opinion publique sur les risques de déséquilibre du marché de l’énergie, en particulier du renouvelable, qui entrainerait une flambée des prix. Il n’en reste pas moins intéressant à écouter.

Le débat se déroulait dans le cadre des rencontres économiques d’Aix-en-Provence, ce samedi 8 juillet. Dans les rôles principaux : Patrick Pouyanné (TotalEnergies), Catherine MacGregor (Engie) et Luc Rémont (EDF). Un débat dans un esprit assez bon enfant mais pour le moins très franc.

Sur l’énergie décarbonée

  • Patrick Pouyanné dit croire en l’électricité, « c’est d’ailleurs pour ça que Total est devenu TotalEnergies et que l’on investit massivement dans l’électricité (30 milliards d’euros, ndlr.) ». Mais il ne faut pas se leurrer, le système décarboné sera plus cher : « Quand on prend un système complet, à moins d’accepter de garder pas mal de fossiles, ça coûtera plus cher qu’aujourd’hui. […] Il ne faut pas dire aux gens que parce que le soleil est gratuit, ça ne va pas être cher, ce n’est pas vrai ! […] Le système sera de plus en plus complexe à manipuler »
  • Pour le patron de TotalEnergies, « l’intermittence » des énergies renouvelables reste l’une des définitions du solaire et de l’éolien. Contrairement aux énergies fossiles qui sont pilotables, il faudra mettre en place « des capacités de stockage » d’électricité, afin de la restituer quand le soleil ne brille pas et que le vent ne souffle pas. Or, « on en est loin », estime Pouyanné. Aucune technologie ne permet aujourd’hui de stocker de l’électricité à grande échelle.
  • Le patron de TotalEnergies répondait ainsi à une affirmation lancée par Catherine MacGregor, la directrice générale d’Engie, qui a pris en exemple l’Espagne, qui bénéficie beaucoup de l’énergie solaire : « Sur les 135 jours du premier semestre, les prix spot en Espagne étaient bien inférieurs à ceux de la France (…). » La preuve que le renouvelable peut fonctionner, selon MacGregor, qui s’est vue être qualifiée de « madame Soleil » dans la foulée par Pouyanné.
  • MacGregor lui a rétorqué qu’il faut bien sûr investir dans les capacités de stockage, ainsi que « dans les centrales à gaz, fonctionnant au gaz décarboné, qui vont jouer un rôle massif » pour contrer l’intermittence des énergies renouvelables. Engie mise en effet sur des centrales électriques à cycle combiné alimentées par du gaz à l’hydrogène bas-carbone, mais aussi sur le biogaz. Comme la multinationale l’a présenté le mois dernier dans son scénario de transition énergétique pour l’Europe à l’horizon 2050.

L’éolien

  • Pouyanné a répliqué : « Si tu veux faire de l’électricité avec de l’hydrogène et du biogaz, ça coûte cher ! » Le patron de TotalEnergies n’a pas non plus manqué de tacler les conditions dans lesquelles les derniers appels d’offre ont été remportés par EDF pour l’éolien offshore, à moins de 50 euros le mégawattheure (MWh). « Si tu fais un investissement, tu ne prends pas 50 euros le MWh comme hypothèse, mais sans doute beaucoup plus. On n’investit pas dans l’éolien offshore en Europe à 50 euros le MWh, ce n’est pas vrai ! »

Le pétrole et le gaz

  • Selon Pouyanné, dans un monde où l’on désinvestit dans le fossile, « le pétrole sera plus cher. » À quel prix ? « Je ne sais pas, mais il sera élevé. »
  • Par contre, « pour le gaz, comme il y a eu de la panique, on est en train de construire des usines partout […]. À la fin de la décennie, on aura trop de GNL, ce qui est bon parce qu’à ce moment-là le prix se cassera la figure, et que l’on recréera des consommateurs en Asie, parce que c’est là-bas qu’ils en ont besoin. »
  • Mais à court terme, dès l’hiver prochain, Pouyanné craint que les capacités de stockage ne soient pas suffisantes en cas d’hiver très froid, malgré le fait qu’elles devraient être pleines dès le mois d’octobre. Le Vieux continent devra alors se tourner vers du gaz à des prix très élevés. Et il ne faut pas attendre « un prix ami » des Américains pour leur GNL, selon le CEO de TotalEnergies, pour qui « les ‘prix d’ami’ ne marchent pas dans un marché d’offre et de demande ». Pouyanné s’attend donc à voir « un système très volatil dans les années qui viennent ».

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