Pourquoi Avatar n’est pas à la hauteur de la formule magique de Disney

Le réalisateur le plus célèbre de ces 20 dernières années, James Cameron, récidive. Son nouvel « Avatar : La voie de l’eau » bat à nouveau tous les records mondiaux et figure déjà dans le top 10 des films les plus rentables de l’histoire et sera sans doute le film le plus regardé de tous les temps. Et pourtant, la machine Disney se grippe, car Avatar ne parvient manifestement pas à se montrer à la hauteur de sa formule magique. 

En 1996, lorsque James Cameron – également réalisateur de la superproduction Titanic – a élaboré ses premiers plans pour Avatar, la technologie nécessaire à la réalisation d’un tel film n’était pas du tout au point. L’imagerie générée par ordinateur (CGI) était la nouvelle mode grâce à Jurassic Park, qui a vu le jour en 1993, mais il n’était pas si facile de mettre à l’écran de véritables humanoïdes – des créatures ressemblant à des humains. En 2009, il a finalement réussi avec Avatar dont le succès a été sans précédent. Il est devenu le film le plus regardé de tous les temps avec des recettes de près de 3 milliards de dollars.

La formule magique = la franchise

Il a fallu attendre 13 ans pour que le numéro deux sorte, mais entre-temps, le monde du cinéma a changé. Au cours des 20 dernières années, l’industrie cinématographique ne jure que par un seul concept : la franchise.

Bob Iger, le PDG de Disney, a qualifié une franchise d’entreprise qui peut être construite sur de nombreuses plateformes, dans de nombreuses régions et pour une longue période. Vous pouvez donc diviser cette formule en trois parties.

Première partie : une série de films réussis

Une franchise commence naturellement par un concept réussi, généralement sous la forme d’un film. Il s’agit généralement d’un film aux proportions épiques, avec des personnages très clairs et un monde déjà dominant dans lequel vous pouvez rêver avec beaucoup de sens du détail, comme des anneaux, des masques, des épées et des boucliers.

La série de films la plus réussie n’existe que depuis 2008. Les recettes cinématographiques des personnages Marvel, dont Iron Man et les X-Men, ont rapporté à elles seules 28 milliards de dollars. James Bond et Batman ont eu droit à 27 films chacun jusqu’à aujourd’hui.

Selon les chiffres de Franchise Entertainment Research, 42 % de tous les films en 2019 étaient des films de franchise qui représentaient également 83 % (!) de toutes les recettes dans le monde.

Avatar sera confortablement installé en tête de liste ici, car deux autres nouveaux Avatars sont prévus.

Partie 2 : la longévité

En outre, une franchise se préoccupe en permanence d’attirer de nouveaux téléspectateurs.  La préquelle sert à attirer une nouvelle génération qui va ensuite regarder le premier film. Pour certains personnages, il faut un reboot pour transférer la magie du père au fils ou à la fille. Et parfois, un spin-off peut faire l’affaire, en faisant jouer le même rôle à un autre personnage, mais d’un groupe ethnique ou d’un sexe différent. Wonder Woman en est un bon exemple.

Mais cela ne suffit pas à satisfaire la formule magique. Pour cela, Avatar doit aussi se traduire par des produits dérivés.

Partie 3 : un merchandising réussi

Le merchandising est le Saint Graal qui fait tourner la machine à fric et permet à Hollywood de rester pertinent face à de nouveaux acteurs comme Netflix. Elle leur permet de générer des liquidités pour des productions géantes.

Harry Potter en est un bon exemple. La franchise Harry Potter comprend 7 livres, 8 longs métrages, 3 films dérivés, 30 jeux vidéo, un spectacle à Broadway, 5 parcs à thème, un site web interactif, etc. La boisson gazeuse Butterbeer était si populaire qu’un million d’unités ont été vendues au cours des six premiers mois dans le premier parc à thème.

 Harry Potter est maintenant aussi une pièce de théâtre à Londres (Mike Kemp/In Pictures via Getty Images)

Nous sommes très loin de l’apogée créatif de Walt Disney, qui créait de nouveaux personnages originaux à la chaîne. Aujourd’hui, tout doit être fait pour maintenir la franchise. Un terrain sur lequel Disney excelle. La firme aux grandes oreilles a vendu un montant improbable de 56,2 milliards de dollars de produits dérivés en 2021.

Comme le mastodonte de Burbank est propriétaire d’Avatar par l’intermédiaire de la 20th Century Fox, qui a produit le film, il peut tout à fait faire ce qu’il veut. Il est toutefois remarquable que si Avatar se prête très bien aux émissions de télévision, aux jeux, aux figurines, aux cartes à jouer, aux produits alimentaires, etc., Disney a beaucoup de mal à transposer ces personnages dans ses parcs à thème, une condition essentielle au succès d’une franchise.

Les principaux personnages de Disney sont Mickey Mouse, les princesses, La Reine des Neiges, Winnie l’ourson et les personnages de Marvel. Avatar n’apparaît nulle part dans ces listes.

Pourquoi cette évolution a-t-elle eu lieu ?

Si les vrais connaisseurs disent que l’apogée du cinéma se situe dans les années 1970 et 1980, où la créativité régnait en maître, tout a changé dans les années 1990. La raison est d’ordre commercial. L’industrie cinématographique est une affaire essentiellement américaine. C’est là qu’a été votée en 1996 la « loi sur les télécommunications » qui a déréglementé l’industrie de la télévision et du cinéma. Depuis lors, les grands acteurs peuvent racheter d’autres acteurs plus petits – l’acquisition de Marvel par Disney pour 4 milliards de dollars en est le parfait exemple – laissant le secteur obsédé uniquement par la taille.

Désormais, un seul paramètre compte, en partie dicté par l’importance croissante de Wall Street : les revenus récurrents et non les revenus si imprévisibles du cinéma où il a toujours été impossible de prévoir les succès.

C’est donc la raison pour laquelle VOUS et vos enfants regarderez toujours les mêmes personnages à l’avenir et il ne faut pas s’attendre à beaucoup plus de créativité de la part d’Hollywood. James Bond combattra toujours les méchants de l’époque en 2054, un Tom Cruise plus jeune sautera toujours d’avions en feu et Mickey Mouse vous accueillera toujours lorsque vous entrerez à Disneyland.


Xavier Verellen est un auteur et un entrepreneur (www.qelviq.com)

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