Un nouveau jour amène une nouvelle discussion sur la controversée concession de distribution de journaux au sein du gouvernement. La situation a évolué : il est presque certain que le contrat, remporté par PPP et Proximy, ne leur sera finalement pas accordé. Le fait que le vice-premier ministre libéral, Paul Van Tigchelt, ait annoncé cela hier sur la radio VRT n’a pas été bien accueilli par les partenaires de la coalition : “Rien n’a été définitivement décidé”. Les libéraux flamands doivent admettre qu’il est “quasiment certain à 99 %” que “personne au sein du gouvernement ne soutient vraiment la concession”. Dès lors, la question se pose de ce qui va la remplacer. Hier, le PS a mis sur la table une idée originale : une déduction fiscale pour les abonnés aux journaux via leurs impôts, permettant ainsi aux éditeurs d’augmenter leurs tarifs pour compenser les coûts de distribution plus élevés. Toutefois, cette proposition est rejetée par presque tous les partenaires de la coalition. Le ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (cd&v), responsable des impôts, a déjà exprimé sa réticence à créer une nouvelle complexité fiscale. Pour Vooruit, c’est de la “folie” : “Cela n’aide pas du tout les facteurs”. Chez l’Open Vld, on préfère utiliser les fonds ainsi libérés pour renforcer le budget. Ainsi, il semble que le contrat de distribution de journaux soit en passe d’être abandonné, laissant place à des “mesures d’extinction” : envisage-t-on quand même une période de transition de 3 ou 6 mois, pendant laquelle Bpost recevrait encore une compensation pour la distribution des journaux ?
Dans l’actu : Un autre débat sur le contrat des journaux au sein du gouvernement cet après-midi.
Les détails : La fin du soutien de l’État à Bpost semble actée, il ne reste plus qu’à régler les modalités. Mais cela implique encore un financement public pour l’entreprise d’État.
- “Il est évident que les libéraux tenaient absolument à triompher, et que Vincent Van Quickenborne (Open Vld) voulait s’attribuer le mérite. Mais ils ont parlé prématurément, attention à ne pas provoquer de mauvaises réactions du côté du PS ou d’Ecolo aujourd’hui.” Un haut responsable gouvernemental souligne la délicatesse de la situation autour de la concession de presse.
- Plusieurs partenaires gouvernementaux ont donc été surpris quand le vice-premier ministre Van Tigchelt a annoncé hier soir (après la clôture de la bourse, selon la logique de l’Open Vld) à la radio que “le contrat de distribution de journaux ne sera probablement plus accordé”. “Désolé, mais ce n’est pas une décision officielle, c’est l’interprétation d’Open Vld”, ripostent plusieurs partenaires de la coalition.
- Même l’Open Vld l’admet : “Ce n’est pas à 100 % certain, mais presque. Hier, personne au gouvernement ne voulait réellement défendre le contrat, et cela sera probablement pareil aujourd’hui, dans sa forme actuelle, où les deux petits concurrents de Bpost l’emportent”, selon une source gouvernementale de haut niveau.
- Lors de la longue réunion tenue par le Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) avec ses vice-premiers ministres sur ce contrat, Ecolo était pratiquement le seul à essayer d’attribuer le contrat à Bpost. “Mais c’est une bataille perdue d’avance”, selon d’autres vice-premiers ministres. “Même Groen réalise qu’on ne peut pas simplement ignorer la procédure d’appel d’offres européen.”
- La conséquence immédiate est que le gouvernement n’attribuera pas le contrat, et PPP et Destiny se retrouvent avec une victoire à la Pyrrhus : ils ont le contrat, mais il est annulé immédiatement. PPP a déjà annoncé envisager des démarches juridiques auprès du Conseil d’État, mais une procédure d’appel d’offres européen a des règles claires : il est toujours possible de ne pas attribuer le contrat.
- L’Open Vld remporte donc une victoire politique symbolique que Van Quickenborne et De Croo peuvent revendiquer. Déjà dans le gouvernement Di Rupo, mais aussi dans le gouvernement suédois, les libéraux flamands s’étaient toujours opposés à ce contrat de distribution de journaux, avec De Croo en tant que vice-premier ministre à l’époque, mais ils avaient dû chaque fois concéder.
- La N-VA s’est également positionnée contre lorsqu’elle était au gouvernement et a exercé une forte pression depuis l’opposition. Mais ce sont Bpost, ainsi que les éditeurs flamands Mediahuis et DPG Media, qui, lors de la précédente concession, ont provoqué un scandale de collusion, attirant ainsi l’attention sur le contrat. Cela a rendu toute manipulation impossible lors de la nouvelle procédure d’attribution, où la concurrence a gagné avec des offres à moitié prix par rapport à celle de Bpost.
- Politiquement, ce sont maintenant les libéraux flamands au sein du gouvernement qui peuvent donner le coup de grâce. Après dix ans de lutte et peu d’attention dans la presse écrite, De Croo et Van Quickenborne remportent finalement leur bataille.
Les perdants : Les organisations du milieu associatif et les éditeurs ayant des abonnés dans des « zones blanches ».
- La fin du contrat de distribution de journaux suscite une panique immédiate parmi plusieurs groupes d’intérêt influents. En premier lieu figurent les organisations du milieu associatif : Beweging.net avec leurs revues et les syndicats avec leurs publications. Ils perdent leurs tarifs préférentiels avantageux. Cela explique l’inquiétude manifestée par le cd&v, ainsi que par Groen et Ecolo.
- Puis viennent les éditeurs. Ici, une fracture est perceptible dans le paysage médiatique : les acteurs flamands, Mediahuis et DPG Media, ne sont guère préoccupés. Ils pourront assurer la distribution de leurs publications dans un marché libre, connaissant déjà bien les tarifs proposés dans le contrat des journaux.
- Dans le scénario le moins favorable, ils pourraient même gérer eux-mêmes leur distribution, une idée déjà discutée par Christian Van Thillo, CEO de DPG Media, et Gert Ysebaert, CEO de Mediahuis. L’éditeur Roularta, plus modeste, a même déjà annoncé son intention d’établir sa propre chaîne de distribution.
- C’est exactement ce qu’espèrent les membres du PS et de Groen, fervents défenseurs de Bpost au sein du gouvernement : “Les éditeurs, tellement soucieux de la qualité, pourraient finalement revenir à Bpost par le biais du marché libre, sauvegardant ainsi les emplois”, d’après une source du PS. Cependant, il reste à voir si cette approche est réaliste, compte tenu de la différence significative de prix avec le concurrent PPP.
- Cependant, la situation est bien plus délicate du côté francophone. Là, la crainte est plus profonde et l’argument que « la démocratie est en péril » trouve un écho plus fort. “Il ne faut pas oublier qu’il existe beaucoup plus de ‘zones blanches’ ici. Le vice-premier ministre du MR, David Clarinval, réside dans une telle région rurale où la distribution des journaux est nettement plus onéreuse, en raison de la faible densité de population”, explique un membre du gouvernement.
Et maintenant ? La question politique essentielle est de déterminer ce qui va remplacer le contrat des journaux et combien cela coûtera.
- Cela signifie qu’aujourd’hui, au kern, le débat se concentrera principalement sur les alternatives à la concession presse. Le vice-premier ministre PS, Pierre-Yves Dermagne, a déjà été chargé de développer des propositions. Un budget est disponible pour cela : jusqu’à 125 millions d’euros sont alloués pour l’année prochaine à ce contrat des journaux, ce qui laisse une certaine marge de manœuvre.
- Hier après-midi, une communication enthousiaste a émergé à ce sujet : le PS a activement promu l’idée d’une réduction fiscale pour tous les abonnés aux journaux via leur déclaration d’impôts, présentée comme un « soutien à la presse ». Le raisonnement est que les éditeurs de journaux pourraient augmenter leurs tarifs d’abonnement pour couvrir les coûts de distribution plus élevés, et les consommateurs pourraient récupérer ces frais via les impôts. Ainsi, ces 125 millions d’euros seraient utilisés annuellement.
- Cependant, cette idée semble déjà abandonnée. Chez l’Open Vld, on souhaite simplement rediriger ces 125 millions vers le budget et réaliser des économies. Du côté du cd&v, le ministre des Finances Van Peteghem n’était pas du tout enthousiaste : « Pas de complications supplémentaires avec les impôts ». “Après avoir échoué à obtenir une réforme fiscale, devrait-il maintenant accepter une nouvelle complexité fiscale ? » C’est trop, selon un autre membre du gouvernement.
- Par ailleurs, il est notable que les socialistes flamands rejettent catégoriquement l’idée de telles réductions fiscales. « Absurde », est leur conclusion succincte. Ils soulignent que ce n’est pas la bonne méthode pour aider les employés de Bpost, qui sont menacés de licenciement. De plus, cela représente un cadeau fiscal aux lecteurs de journaux, généralement issus de la classe moyenne supérieure, un groupe qui, selon Vooruit, n’a pas besoin de fonds publics supplémentaires.
- Chez Open Vld, on souligne également les risques de discrimination de cette mesure fiscale, à deux égards. « Et les abonnés numériques, qui ne recevraient rien ? Cela pose un problème. Et les librairies seraient encore plus désavantagées. Impossible« , selon eux. Le PS serait cependant prêt à inclure les abonnés numériques dans la proposition.
- Aucune réduction fiscale n’est donc envisagée, mais l’idée de « mesures d’extinction » est évoquée partout, y compris chez les libéraux. « Le contrat de distribution de journaux s’arrête brusquement, il est probable qu’une période de transition soit mise en place chez Bpost, pouvant durer de 3 à 6 mois », selon les libéraux.
- Il faudrait donc une dernière fois puiser dans les fonds, ce qui est financièrement faisable : ces 125 millions d’euros sont disponibles. Ironie du sort, si le contrat avait été attribué à PPP, une telle période de transition aurait été nécessaire. Et aucun budget n’avait été prévu pour cela par Dermagne, tant on était sûr que Bpost l’emporterait.
- Il semble plutôt que Bpost pourrait recevoir une somme unique d’environ 80 millions d’euros, avec une simple « prolongation finale » de la concession de presse. Cela permettrait d’éviter à court terme un désastre social chez Bpost, ce que personne au sein du gouvernement Vivaldi ne souhaite à quelques mois des élections.
- On réfléchit également à des « mesures de soutien spécifiques pour aider ces zones peu peuplées ». Cependant, comment cela peut-il être techniquement réalisé et peut-on le développer rapidement ? Hier, rien n’était encore prêt : tout le monde s’attendait à ce que Bpost remporte finalement le contrat de distribution de journaux, toute autre issue semblait impensable.
- Cette situation amène les membres du gouvernement à réfléchir : tout le monde a constaté l’énorme différence de prix avec les concurrents : Bpost proposait de distribuer les journaux pour environ 30 centimes par journal, contre environ la moitié pour PPP. Mais le contrat précédent se faisait à plus de 60 centimes. “Nous n’avons jamais reçu de Dermagne un audit externe décent sur les coûts de Bpost. Mais cela montre clairement que trop a été payé”, commentent certains membres du gouvernement.
- Depuis l’opposition, Michael Freilich (N-VA) fait une prédiction : “Le PS perd maintenant ce contrat de plusieurs millions. Mais attendez-vous à de nouvelles subventions (indirectes) de plusieurs millions pour Bpost dans les mois à venir. Par exemple : 20 millions supplémentaires pour augmenter l’accessibilité des points postaux, 50 millions pour ancrer le projet pilote de numérisation, 25 millions pour réaliser la mission ‘durabilité écologique’ et 10 millions comme compensation pour l’installation de distributeurs automatiques. Bpost, en fin de compte, gagne toujours.”