Nouvelle conséquence de la peur de la Russie: et si la Finlande envoyait des soldats sur des îles démilitarisées depuis le 19e siècle ?

Depuis que la guerre en Ukraine a éclaté, la Finlande figure parmi les pays qui craignent le plus d’être les suivants sur la liste russe. Son adhésion à l’OTAN sera probablement effective d’ici quelques mois, voire moins. Dans le même temps, des voix s’élèvent pour envoyer une présence militaire sur un archipel au statut bien particulier.

Cet archipel, c’est Åland. Situé tout au sud-ouest de la Finlande, dans le golfe de Botnie, dans la mer Baltique, il dispose du statut de province autonome depuis un siècle. Majoritairement suédophone, la région fait également partie de l’Union européenne depuis 1995. Comme la Finlande, Åland ne fait en revanche pas partie de l’OTAN. Pas encore, du moins.

L’archipel est d’ailleurs démilitarisé depuis 1856 et la fin de la guerre de Crimée (1853-1856). À cette époque, les îles appartenaient à la Russie, qui avait, à la demande du Royaume-Uni et de France, accepté de ne pas les fortifier. Cette démilitarisation a perduré jusqu’à aujourd’hui, en tout cas sur papier. Car dans les faits, cela n’a pas toujours été le cas, notamment au sortir de la Première guerre mondiale.

Ce statut de territoire démilitarisé a par la suite été renouvelée dans l’accord de Genève de 1921. Un troisième accord définissant le statut de l’archipel a été signé en 1940, en vertu duquel l’Union soviétique s’est vu accorder le droit d’y établir un consulat pour surveiller le respect de cette démilitarisation.

« C’est au peuple d’Åland de décider »

En Finlande, certaines voix s’élèvent pour réévaluer ce statut de démilitarisation de Åland au vu de la plus que probable entrée de la Finlande dans l’OTAN. Les déclarations du président du Parlement finlandais, Matti Vanhanen, ont notamment provoqué pas mal de réactions.

Dimanche, le journal finlandais Etelä-Suomen Sanomat a rapporté que M. Vanhanen avait déclaré qu’il espérait que Åland prenne l’initiative de déployer des troupes finlandaises dans la province. Il aurait aussi laissé entendre qu’une proposition visant à modifier le statut spécial de Åland pourrait être présentée en juin, lorsque la province célébrera un siècle d’autonomie.

Le lendemain, le responsable politique finlandais est revenu sur ses propos, indiquant que ceux-ci avaient été mal interprétés. « J’ai participé à un événement à Lahti hier et un membre du public a posé une question sur les troupes sur Åland. En réponse à cette question, j’ai souligné que le statut démilitarisé de Åland est basé sur des accords internationaux. Dans ce contexte, j’ai déclaré qu’il serait plus facile – du point de vue de la défense – d’avoir des troupes stationnées sur Åland, mais qu’aucune proposition de ce type n’est en cours. C’est au peuple de Åland de décider s’il veut entamer un processus pour changer ce statut », a-t-il précisé, selon le média suédois Svenska Yle.

« [Nos] accords permettent à la Finlande de prendre en charge la défense de Åland si le besoin s’en fait sentir. Il incombe aux forces de défense d’évaluer correctement l’état de préparation requis », a-t-il ajouté.

Aucun processus engagé, mais…

Rebondissant sur les propos du président du Parlement finlandais, le député de Åland Mats Löfström a confirmé qu’à ce stade, aucun processus n’avait été engagé en ce sens. Il a toutefois confié comprendre toute l’agitation autour d’un éventuel changement de statut de sa province. Åland n’est pas naïve et voit que la situation sécuritaire en Europe s’est détériorée, a-t-il reconnu, cité par The Saxon.

« C’est naturel, étant donné ce qui se passe dans le monde et étant donné que la Finlande poursuit sérieusement la discussion sur le changement de sa ligne de politique étrangère en rejoignant l’Otan. C’est pourquoi tout le monde est très excité par les déclarations qui sont faites », a-t-il déclaré à Åland Radio, ajoutant que ces discussions peuvent prendre des proportions démesurées « parce que tout le monde attend et veut les entendre. »

C’est la Finlande qui doit défendre Åland

Dans la foulée, la Première ministre de Åland, Veronica Thörnroos a, elle aussi, assuré qu’aucune discussion n’avait été lancée sur un possible changement de statut de son archipel. En revanche, elle a rappelé que, le cas échéant, c’était bien la Finlande qui avait la responsabilité de défendre la région. »Si quelque chose arrive à Åland – si les Ålandais sont attaqués – il est du devoir de la Finlande d’envoyer une armée ou tout ce qui est nécessaire à Åland, mais vous ne pouvez pas faire cela à l’avance », a-t-elle indiqué.

À l’heure actuelle, il n’y aurait donc pas de grandes évolutions dans le dossier. Mais à mesure que la Finlande se rapprochera de son adhésion à l’OTAN, la question sera probablement mise à l’agenda. Et la Russie, qui dispose d’un consulat dans la capitale d’Åland, suivra cela de très près.

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