Bientôt une avancée pour l’ajustement budgétaire ? Dans plusieurs interviews, le vice-premier ministre PS, Pierre-Yves Dermagne, ne ferme pas la porte à des économies. Et le président du MR, Georges-Louis Bouchez (MR), place soudainement la barre beaucoup plus bas, sur le plateau de la RTBF. En outre, il y a une autre petite aubaine technique, suite à une erreur de calcul du Comité de monitoring.
- Quiconque a regardé VTM le week-end dernier a vu un Georges-Louis Bouchez combatif, qui veut mettre de l’ordre dans le budget. Une communication tout à fait calibrée pour le public flamand, où le thème de l’assainissement des finances publiques est bien présent.
- À la table des négociations, il n’y avait et il n’y a que peu de traces de cette volonté budgétaire de réduire les déficits, au MR. Le contraire serait surprenant : en trois décennies au pouvoir, le budget n’a jamais été une véritable préoccupation pour les libéraux francophones, le thème n’étant pas vraiment porteur au sud du pays. Le vice-premier ministre David Clarinval (MR) n’a donc pas l’intention de suivre le discours volontariste du Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) et de sa secrétaire d’État au Budget, Alexia Bertrand (Open Vld) : faire un effort supplémentaire de 0,3 % du PIB, comme l’a suggéré la Banque nationale.
- Hier, à Jeudi en Prime, après le JT de la RTBF, Bouchez a clairement réglé la mire sur le public francophone. Oubliant son langage dur sur VTM, il a soudainement déclaré qu’il ne s’agissait que d’un contrôle budgétaire technique, à la marge.
- L’Open Vld se retrouve donc bien seul. D’un autre côté, le PS est passé à l’offensive aujourd’hui. Tant dans Het Laatste Nieuws que dans Le Soir, le vice-premier ministre Pierre-Yves Dermagne est passé déposer brièvement son message à l’intention des interlocuteurs présents à la table des négociations ce week-end. C’est à ce moment-là que la Vivaldi se retrouvera autour des chiffres, après la fin du sommet européen.
- Et Dermagne met l’essentiel sur la table. Il ne rejette pas l’effort de 0,3 % proposé par De Croo. Cela représente 1,8 milliard d’euros. « Pour le PS, 600 millions d’euros peuvent être économisés, du moins s’il y a aussi 600 millions d’euros de recettes supplémentaires et 600 millions d’euros de budget pour les extras. C’est le deal. »
- Dermagne répète ainsi ce qui est vrai depuis longtemps dans la rue de la Loi : toujours cette règle du 1/3 d’économies, 1/3 de nouveaux impôts, et 1/3 en ajustements. Mais c’est là que le bât blesse, surtout pour Bouchez : 600 millions d’euros de recettes, ce sont de nouveaux impôts, et ça, c’est non. Dermagne avait pourtant bien une idée : l’impôt sur la fortune.
- En outre, le PS s’en tient à sa doctrine selon laquelle tout n’est pas si noir au niveau des finances publiques : « Le gouffre est beaucoup moins profond que prévu. Je sais que ce n’est pas bon, mais nous faisons beaucoup mieux que prévu. Et puis, qu’on nous dise où il faut faire des économies ? Sur la justice, la police ou la sécurité sociale ? Pas question ! »
- Le week-end s’annonce donc difficile pour De Croo et Bertrand. Ils ont cependant une petite marge de manœuvre supplémentaire. En effet, il s’avère que le comité de monitoring a fait une erreur de calcul en émettant des prévisions à long terme trop négatives. Une erreur à 5 milliards d’euros, quand même, d’ici 2028, avance l’administration.
À suivre également : Combien nous coûterait un non-accord sur les pensions ?
- C’est le gros bâton pour amener le PS à réformer les pensions : l’argent du plan d’aide européen. Après tout, la Belgique a promis, par l’intermédiaire de Thomas Dermine (PS), le secrétaire d’État à la Relance, de réformer ces pensions. Une réforme neutre budgétairement, afin de ne pas engendrer de coûts supplémentaires liés au vieillissement.
- Cela met la pression sur le PS. Mais il y a peu de chances qu’il soit prêt à faire de nombreuses concessions : Paul Magnette a déjà déclaré par le passé que « le chantage » de l’UE n’était « pas acceptable ».
- Ainsi, il est intéressant de constater que le PS a déjà commencé à estimer ce que la Belgique risque de perdre en fonds d’aide européens si elle ne parvient pas à un accord. Selon les calculs fournis par Dermine au Soir, il s’agirait d’une simple « amende » allant jusqu’à 200 millions d’euros.
- Ce n’est pas si terrible, constate-t-il, sur un total de 4,5 milliards d’euros d’aide d’urgence que la Belgique attend. Ce qui est plus ennuyeux, c’est qu’il y a des accords conclus avec les entités fédérées, qui reçoivent une partie de cette manne financière : ces 200 millions doivent donc provenir entièrement des poches fédérales.
- Mais, au sein de la Vivaldi, cette hypothèse du PS est vigoureusement contrée: « Non, ce n’est pas correct, ce sera plus que 200 millions », nous glisse une source libérale haut placée. « La Commission garde une marge d’interprétation. Nous ne savons pas à quel point elle sera stricte, cela dépendra de l’accord sur les pensions que nous conclurons. »
Tombera, tombera pas : après le gouvernement flamand, c’est la majorité au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui tangue.
- La menace d’un changement de majorité au sein du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, dirigée par le libéral Pierre-Yves Jeholet (MR), semble revenir un peu comme un boomerang pour Paul Magnette (PS). Ce dernier a mené le forcing ces derniers jours, dans le dossier de la formation des médecins à l’UMons et l’UNamur.
- La ministre libérale de l’Enseignement supérieur Valérie Glatigny (MR) ne veut pas proposer de nouvelles formations dans ces deux petites universités : le paysage éducatif y est déjà très fragmenté et la Fédération peine à payer toutes ses factures. Mais c’était sans compter le coup de pression du PS et d’Ecolo, les partenaires gouvernementaux du MR.
- Magnette en a fait un point d’honneur et a menacé à plusieurs reprises d’approuver les nouveaux programmes avec une majorité alternative, voire de chasser le MR du gouvernement communautaire. Il a d’ailleurs réitéré cette menace, hier matin sur la RTBF.
- Mais cette politique du coup de poing ne semble pas fonctionner : Ecolo ne veut pas vraiment entrer dans la logique d’une majorité alternative. Bouchez a d’ailleurs souligné, et c’est rare, la bonne volonté de Jean-Marc Nollet (Ecolo) dans ce dossier.
- En fait, Ecolo sait que cela mettrait également sous pression le niveau fédéral, où il a déjà été question de majorité alternative sur la question nucléaire.
- Du côté des Engagés, on ne rejette pas de voter pour cette alternative. Mais cela semble s’arrêter là. « On n’est pas à vendre », a déclaré Maxime Prévot sur Bel-RTL, ce matin. Il a nié dans toutes les langues qu’il était en train de négocier une entrée au gouvernement.
- La rivalité entre Magnette et Bouchez est à nouveau en jeu : aucun des deux n’est prêt à céder. Le ministre-président Jeholet a jusqu’à mardi prochain pour désamorcer la crise. Il se dit dans les couloirs qu’un compromis est toujours possible. On ne parle plus d’un budget de 500.000 euros mais de 200.000 euros par an.