L’histoire se répète, alles komt terug. Ainsi, le MR, avec à sa tête Georges-Louis Bouchez, tire ouvertement dans le dos de son « parti frère » flamand, l’Open Vld. Dans les jours à venir, Bouchez va en effet lancer une grande campagne électorale, également en Flandre, avec même un panneau publicitaire sur la Grand-Place d’Anvers. Bouchez veut ainsi répondre à la N-VA, qui présente des listes en Wallonie. Mais cela souligne d’autant plus « qu’il existe bien un véritable parti libéral, qui tient bon », une désapprobation douloureuse pour le Premier ministre Alexander De Croo et l’Open Vld. Ces derniers reçoivent un nouveau coup : dans les sondages, le parti chute dans la province d’Anvers, la plus grande circonscription électorale, en dessous du seuil électoral avec 4,8 %. Et dans le Limbourg, il ne reste pas grand-chose, avec 7,2 %. De cette manière, il ne reste qu’une poignée de sièges, et le président Tom Ongena (Open Vld) risque même de ne pas être élu. Il est à noter que dans ces sondages, le Vlaams Belang et la N-VA atteignent ensemble une majorité de sièges pour le Parlement flamand.
Dans l’actualité : Un coup dur dans les sondages pour l’Open Vld et une campagne de Bouchez dans son dos.
Les détails : Au MR, on fait un raisonnement très cynique mais pas incorrect : plus les partis flamands actuels de la Vivaldi perdent, y compris le parti frère, l’Open Vld, plus il est probable que le parti de Bouchez soit de nouveau incontournable pour obtenir une majorité fédérale.
- Un sondage très intéressant de Gazet van Antwerpen et Het Belang van Limburg d’iVox, avec une marge d’erreur de 3 %, donne une image pour la Flandre, mais aussi des résultats détaillés pour deux provinces : Anvers et le Limbourg, où 1.000 personnes ont également été sondées, permettant ainsi de tirer des conclusions sur les résultats.
- La tendance observée dans d’autres sondages est confirmée : tant le Vlaams Belang que le PVDA sont en forte hausse, avec Vooruit comme seul parti centriste en progression. Les résultats dans les provinces permettent d’en dire plus sur la répartition des sièges.
- Le Vlaams Belang est en grande progression :
- Pour le sondage qui concerne toute la Flandre, ils obtiennent 27,5 % pour le Parlement flamand, et un peu moins pour la Chambre, avec 26,5 %.
- Dans le Limbourg, où ils marquent traditionnellement un peu moins, ils sont aussi à 26,2 % pour le Parlement flamand, un bond très solide. Ils deviennent ainsi de loin les plus grands dans cette province, avec un gain de sièges certain.
- Mais c’est surtout à Anvers que les résultats sont très frappants : là, la liste flamande menée par le président Tom Van Grieken (Vlaams Belang), et poussée par Filip Dewinter (Vlaams Belang), atteint 30,1 %. Pour la Chambre à Anvers, c’est moins, avec 27,2 %
- Le président Van Grieken apparaît en outre comme le troisième plus populaire à la question « qui voulez-vous comme prochain Premier ministre », avec 9,7 %.
- Ainsi, la N-VA et le Vlaams Belang obtiennent une majorité en sièges pour le Parlement flamand, selon les sondages. Car la N-VA perd bien, mais reste sans conteste le deuxième grand parti dans le paysage flamand.
- Pour les scores sur toute la Flandre, le N-VA est à 22 % pour la Chambre, et à 21,3 % pour le Parlement flamand. Ces scores sont nettement en dessous des 25 % de 2019.
- Plus en détail, pour Anvers, ils obtiennent 26,8 % pour la Chambre, ce qui indique que le président Bart De Wever (N-VA) est au coude à coude avec le Vlaams Belang dans sa circonscription. Pour le Parlement flamand, Jan Jambon (N-VA) fait moins bien à Anvers, avec seulement 23,8 %.
- Dans le sondage plus détaillé du Limbourg, le parti tient bon : là, la perte est limitée à 0,7 %, avec une liste menée par Zuhal Demir (N-VA), ils atteignent 21,3 %.
- De Wever peut également s’appuyer sur la question « qui voulez-vous comme Premier ministre » : avec 18,2 %, c’est de loin le score le plus élevé.
- Cela signifie que la N-VA et le Vlaams Belang n’ont pas de majorité en pourcentage pour le Parlement flamand, avec 48,8 % au total. Mais dans la grande circonscription d’Anvers, ils l’atteignent largement, ce qui devrait certainement leur amener la majorité en nombre de sièges.
- Surtout parce que l’Open Vld s’effondre complètement au niveau provincial. Cela a de grandes conséquences pour la répartition des sièges, s’ils tombaient effectivement sous le seuil électoral : les plus grands partis en bénéficieraient.
- Pour le niveau flamand, les libéraux flamands obtiennent encore 8,8 % pour la Chambre et 8,7 % pour le Parlement flamand. Du côté de l’Open Vld, on peut encore vivre avec ce scénario, selon ce qu’on entend en interne.
- Mais pour Anvers, c’est dramatique : là, le parti s’effondre complètement, avec seulement 5,3 % pour la Chambre, et donc seulement un siège, et même 4,8 % pour le Parlement flamand. Ainsi, le chef de file et président Tom Ongena (Open Vld) perdrait son siège.
- Et dans le Limbourg, ce n’est pas beaucoup mieux : le parti chute à 7,2 %, une perte de 4,7 %. Cela n’est pas loin non plus du seuil électoral de facto, qui est bien au-dessus de 5 % dans le Limbourg.
- Il n’y a donc pas d’effet « De Croo », même si le Premier ministre est deuxième dans le sondage comme candidat Premier ministre, avec 17,5 %.
- À gauche, il est remarquable que Vooruit soit encore en hausse.
- Pour toute la Flandre, Vooruit obtient 14,3 % pour la Chambre et 13,2 % pour le Parlement flamand.
- À Anvers, c’est plus bas : seulement 11,9 % pour la Chambre et 12,1 % pour le Parlement flamand, mais c’est quand même un gain significatif, ce qui donnera certainement de nouveaux visages à Anvers.
- Dans le Limbourg, le gain est minime, avec 14,4 %, soit 0,9 % de plus par rapport aux élections.
- Il est à noter que dans le sondage, Frank Vandenbroucke (Vooruit) recueille 5,5 % de sympathie en tant que potentiel Premier ministre, et que Rousseau obtient encore 5,3 %.
- L’extrême gauche du PTB fait des bonds partout et est clairement en hausse.
- Pour la Flandre, ils sont à 8,7 % pour la Chambre, et à 8,5 % pour le Parlement flamand.
- À Anvers, où Jos D’Haese (PVDA) mène la liste, le score est même de 10,5 %, pour la Chambre, Peter Mertens (PVDA) obtient moins avec 9,4 %.
- Dans le Limbourg, il y a du progrès : avec 8,7 %, ils obtiennent cette fois des sièges.
- Groen (Les Verts) est en difficulté et perd des voix au profit des autres partis de gauche.
- Pour la Chambre en Flandre, ils obtiennent 7,1%, et pour les élections flamandes, 6,9%. Ils sont ainsi le plus petit parti à deux reprises.
- À Anvers, c’est un peu plus élevé, ils y obtiennent traditionnellement de meilleurs résultats : 8,4% pour la Chambre et 7,5% pour le Parlement flamand.
- Dans le Limbourg, avec 5,3%, ils n’obtiennent plus de sièges.
- Au cd&v, le parti a célébré sur les réseaux sociaux une « victoire » par rapport à d’autres sondages, ce qui n’a aucune valeur réelle. Les chrétiens-démocrates perdent encore du terrain, par rapport à 2019.
- Pour l’ensemble de la Flandre, ils sont à 11,5% pour la Chambre, et 12,9% pour le Parlement flamand.
- À Anvers, ces scores sont beaucoup plus bas, ce qui correspond aussi à l’histoire du parti : 9,5% pour la Chambre, ce qui les place parmi les petits poucets, et 9,7% pour le Parlement flamand.
- Dans le Limbourg, le parti perd également 3%, mais il s’agit toujours d’un bastion pour les chrétiens-démocrates : ils conservent 16,2%.
L’essentiel : Le centre politique s’épuise, particulièrement du côté de l’Open Vld.
- Au sein de l’Open Vld, une analyse sombre prévaut, en particulier concernant le groupe parlementaire à la Chambre des libéraux flamands. Actuellement composé de 12 membres, le groupe risque de se réduire considérablement. « En considérant la situation actuelle, il semble que nous n’obtiendrons aucun siège à Anvers, ni au Limbourg. Avec la quasi inconnue Irina De Knop (Open Vld) en Brabant flamand, les perspectives ne sont guère meilleures. Il ne restera vraiment pas grand-chose. »
- Mais il est notable que le sentiment général chez les libéraux flamands est que « les choses auraient pu être pires ». Même le président Ongena, qui risque de perdre son siège, et le ministre Paul Van Tigchelt semblent adopter une attitude de résignation.
- Cependant, les sondages actuels au niveau provincial prévoient un avenir plutôt rude pour les libéraux flamands. Ils pourraient conserver une représentation au Parlement flamand, mais à la Chambre, il ne resterait qu’un petit nombre de députés.
- Par ailleurs, il est observé que la N-VA et le Vlaams Belang ne sont plus perçus comme des entités interdépendantes : ensemble, ils grignotent le centre. Dans la province d’Anvers, leurs scores cumulés atteignent 54% pour la Chambre et 53,9% pour le Parlement flamand, des chiffres inédits pour cette région.
- Dans cette même province, à part Vooruit, aucun autre parti ne dépasse le seuil des deux chiffres. Est-ce le signe d’une campagne électorale dominée par le mécontentement et des thèmes sensibles tels que la migration ?
- Les thèmes prioritaires identifiés par les sondés le confirment : 12,7% placent ‘moins de migration’ en tête de leurs préoccupations, ce qui est nettement prédominant. 10,5% privilégient ‘la valorisation du travail’, et 6,8% souhaitent ‘des soins de santé de qualité pour tous’.
- L’enquête révèle également un sentiment général d’impuissance et de colère.
- À la question « en fin de compte, peu importe pour qui je vote, les politiciens arrangent tout entre eux en coulisse », 66,4% répondent ‘oui’, et seulement 25,3% ‘non’.
- Sur la confiance envers les politiciens, 51,2% disent ‘oui’ à « je ne fais confiance à aucun politicien » et 41,9% ‘non’.
- Concernant la colère envers la politique, 57,5% répondent ‘oui’ et 32% ‘non’.
- Et sur la confiance en la politique, 66,8% disent ‘non’ et seulement 28,2% ‘oui’.
- À « la politique s’est dégradée ces dernières années », 80% répondent ‘oui’ et 12,5% ‘non’.
- Enfin, sur la question « le pays est-il bien gouverné », la réponse est sans équivoque : 68,6% disent ‘non’ et seulement 23,1% ‘oui’.
- Sur l’interdiction du lobbying de groupes de pression comme VOKA, ACOD, Boerenbond, etc., auprès des cabinets et ministres, 51,6% sont pour et 22,2% contre.
- Curieusement, au même moment : Georges-Louis Bouchez lance une campagne en Flandre et adopte en coulisses une démarche cynique.
- Il est de notoriété publique que le président du MR, Georges-Louis Bouchez, envisage depuis longtemps d’entreprendre une offensive en Flandre. Il se sent extrêmement populaire là-bas et est convaincu que son discours profondément libéral y trouve un écho favorable. Cependant, les sondages ne reflètent pas cette popularité : dans les sondages pour le poste de Premier ministre, Bouchez n’obtient que 1%, un score inférieur à celui de Paul Magnette (PS) qui est considéré comme un choix acceptable par 1,6% des Flamands.
- L’an dernier, Bouchez a même envisagé publiquement de lancer des listes propres du MR en Flandre pour promouvoir le « libéralisme pur jus ». Il en a discuté avec l’Open Vld, qui n’était pas particulièrement enthousiaste à cette idée. Bouchez voyait cela comme une « sauvegarde ultime pour Open Vld » en cas de difficultés.
- Cependant, l’idée de former un parti libéral unitaire, un rêve de longue date de Bouchez, qui reste pour sa par un unilingue francophone, n’a pas suscité beaucoup d’enthousiasme parmi les dirigeants de l’Open Vld, sous la direction de Bouchez. Surtout que son comportement a parfois été perçu comme « déloyal » par le Seize, ce qui a fortement détérioré les relations entre le président francophone et le Premier ministre.
- Un point de friction notable a été le transfert d’Alexia Bertrand, figure de proue du MR à Bruxelles, vers l’Open Vld : De Croo a vu cela comme une manœuvre stratégique contre Bouchez, réussissant un transfert de premier plan.
- Néanmoins, les relations se sont quelque peu améliorées récemment : Bouchez se rend maintenant régulièrement au Seize. Les deux partis libéraux doivent encore s’accorder pour créer une liste unique bruxelloise pour la Chambre, faute de quoi le MR pourrait perdre quelques pourcentages, avec Bertrand sur une liste distincte de l’Open Vld, ce qui pourrait leur coûter un quatrième siège.
- L’initiative de De Wever de présenter des listes N-VA en Wallonie pourrait maintenant se retourner contre le MR : cette initiative pourrait coûter quelques voix aux libéraux francophones.
- Mais cela a donné l’occasion à Bouchez de relancer son plan pour mener campagne. Ce matin sur Bel RTL, il a annoncé « une grande campagne », dont les visuels sont déjà prêts.
- Ainsi, de grandes affiches annonceront une campagne du MR en Flandre, avec même un panneau publicitaire sur la Grand-Place d’Anvers, devant la porte de De Wever, à l’hôtel de ville, selon des sources proches du président des libéraux francophones.
- La question demeure de savoir si cette campagne ne sera pas un autre coup porté au Premier ministre et l’Open Vld : les « vrais » libéraux de droite venant chercher des votes à Anvers. « Mais il n’a pas de listes ici, il n’ose pas aller si loin. Alors, quel en est l’intérêt ? », s’interroge un haut responsable de l’Open Vld.
- Au MR, Bouchez a déjà répondu de manière cynique à cette question. Car de l’autre côté de la frontière linguistique, il est généralement admis que la coalition Vivaldi continuera sous une forme similaire : l’axe PS-Ecolo est établi, potentiellement complété par Les Engagés. Ces derniers ont récemment conclu un accord de collaboration avec le cd&v.
- La question est donc de savoir si le MR risque d’être exclu, tant au niveau wallon que fédéral. Et là, les partis flamands jouent un rôle dans l’équation globale : plus la part flamande de la Vivaldi rétrécit, plus le MR pourrait devenir nécessaire. « Si tous les partis flamands du centre continuent à se réduire du côté flamand, ils finiront par revenir vers moi », raisonne froidement Bouchez.
- Ce scénario n’est pas à exclure : actuellement, la coalition Vivaldi ne dispose pas d’une majorité en Flandre, avec 42 sièges sur 88. Ce nombre risque de diminuer encore après les élections. Une extrapolation du dernier sondage du professeur Pascal Delwit de l’ULB, qui semble plutôt être une surestimation, place les partis flamands de la Vivaldi (Open Vld, cd&v, Vooruit et Groen) à seulement 32 sièges. La question est de savoir combien de partenaires francophones seront nécessaires pour atteindre une majorité.