Il y a moins d’un an, la présence d’une molécule liée à l’activité de bactéries était supposée dans les nuages de souffre de Vénus. Mais il faut déchanter : cette sœur de la Terre a pris le chemin le plus inhospitalier possible.
Par Matthias Bertrand
Souvenez-vous,l’année passée : l’ensemble de la presse scientifique reprenait la même information, bientôt suivie par tous les médias du monde. Une nouvelle totalement improbable, et qui nous a tous fait rêver : on venait de détecter un indice possible de l’existence de vie sur Vénus ! En septembre dernier, une équipe d’astronome disait avoir observé des traces de phosphine dans l’atmosphère de la planète la plus inhospitalière qu’on puisse imaginer. Or, la phosphine est un composé organique qui, sur Terre, est massivement rejeté par certaines bactéries anaérobies (qui n’ont pas besoin d’oxygène). Si, par 450°C à la surface et 92 fois la pression terrestre, au milieu des pluies d’acide sulfurique, il y avait de la phosphine, alors peut-être qu’il y a aussi de la vie ! Si pas au sol, peut-être dans ses nuages, un peu moins hostiles, pour des bactéries.
Plus sèche qu’un désert
Sauf qu’une équipe de chercheurs de l’université de Belfast se doit de nous rappeler à la raison : outre que l’existence de cette phosphine ne sera certaine que quand une sonde sera sur place pour le confirmer, Vénus est quand même très, très hostile. La planète possède bien des molécules d’eau en suspension dans ses nuages, mais pas dans une concentration suffisamment élevée pour qu’elle puisse favoriser l’émergence de la vie. En se basant sur des expériences en laboratoire et des observations renvoyées par des sondes, les chercheurs ont théorisé ce qu’ils appellent l’activité de l’eau dans les nuages: l’eau liquide aurait une activité de 1 et la sécheresse totale une activité de 0. Pour exister, la vie aurait besoin d’une activité de l’eau d’au moins 0,585. Dans les nuages de Vénus, l’activité de l’eau ne serait pas supérieure à 0,004, tant l’acide contrebalance sa rare présence. C’est moins que dans le plus sec de nos déserts ! Ils doivent donc bien conclure que le niveau d’eau dans les nuages de Vénus est cent fois inférieur à celui qui serait nécessaire à soutenir la vie: même les bactéries les plus extrémophiles que nous connaissons n’y survivraient pas.
Par Jupiter ?
A tel point que même explorer Vénus avec des robots comme on le fait pour Mars s’avère très difficile : en 1967, le premier objet humain qui est descendu dans les nuages de cette planète, la sonde soviétique Venera 4, a cessé de fonctionner, rongée par les acides, à 25 km de la surface ! Les Russes ne se démontent pas, et réussissent en 1970 le premier atterrissage sur une autre planète avec Venera 7, beaucoup plus résistante : elle a pu fonctionner pendant 23 minutes. On sait depuis que l’être humain ne posera jamais un pied sur Vénus.
Si Vénus n’est vraiment pas une bonne candidate pour la vie, il existe d’autres candidates dans notre propre système solaire comme souligne le chercheur John Hallsworth: »Nous avons découvert que les conditions d’eau — avec une activité de tout juste 0,585 — et de température dans les nuages de Jupiter pourraient permettre à une vie de type microbien de subsister. » C’est une piste bien mince, mais c’est mieux que rien.
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