Dimanche dernier, nous vous expliquions que la Suède déployait des centaines de militaires sur l’île de Gotland, en mer Baltique. Une décision prise de façon préventive, face à des agissements russes jugés suspects. « Une attaque contre la Suède ne peut être exclue », avait déclaré le ministre suédois de la Défense, Peter Hultqvist. Il y a déjà du neuf dans cette affaire, mais le flou règne toujours.
L’île suédoise de Gotland occupe une position stratégique, dans la mesure où la flotte russe de la Baltique est basée à Kaliningrad, non loin de là. Face à l’arrivée de trois navires d’assaut amphibies russes dans la zone, la Suède avait décidé d’augmenter sa présence militaire sur son île.
« Il est clair comme de l’eau de roche qu’il y a un risque. Une attaque contre la Suède ne peut être exclue », avait annoncé le ministre suédois de la Défense, Peter Hultqvist, à la radio suédoise. « Il est important de montrer que nous ne sommes pas naïfs. La Suède ne sera pas en sommeil quand quelque chose arrivera. Il est crucial que nous fassions clairement savoir que nous prenons cela au sérieux. »
Depuis, des centaines d’hommes ont débarqué à Gotland.
Trois navires de guerre s’en vont, d’autres restent
Quasiment en même temps que le déploiement suédois, trois autres navires de guerre russes – le Korolev, le Minsk et le Kaliningrad – ont quitté la Baltique. Ils se dirigent vers l’Atlantique, mais leur destination finale est inconnue. Si les transits navals, y compris ceux impliquant des navires d’assaut amphibies, à destination et en provenance de Kaliningrad sont loin d’être rares, les responsables suédois ont indiqué que le niveau d’activité actuel était inhabituellement élevé.
Il s’agit de navires de la classe Ropucha, note le média américain The Drive. Chacun peut transporter jusqu’à 10 chars de bataille et 340 soldats, 550 tonnes de marchandises ou des charges équivalentes.
Deux autres navires de ce type – l’Olenegorskiy Gornyak et le Georgiy Pobedonosets – sont toujours dans la Baltique. Ils y sont accompagnés depuis la semaine dernière par le Pyotr Morgunov, un autre navire de débarquement ,qui appartient lui à la classe Ivan Gren: plus moderne, il peut transporter jusqu’à 13 chars et environ 300 soldats.
« Pas étrange en soi, mais… »
« Nous disposons de différents types de capteurs et de systèmes qui nous aident à surveiller les navires », a déclaré Therese Fagerstedt, attachée de presse des forces armées suédoises. « Nous avons également été en mesure de les suivre via nos pilotes de l’armée de l’air et de prendre des photos ».
Un avion de patrouille maritime P-8A de l’US Navy a été observé au large des côtes danoises et au-dessus de la Baltique. Plus que probablement pour lui aussi surveiller le mouvement des navires russes.
« Nous sommes toujours intéressés par les mouvements dans notre zone immédiate, et ceci en soi n’a rien d’extraordinaire », a ajouté Mme Fagerstedt. « Mais étant donné les tensions croissantes dans la zone, nous avons voulu suivre et surveiller ces navires. Nous le faisons également pour donner à nos commandants une bonne base pour toute décision sur les mesures à prendre par les forces armées. »
« Ce n’est pas étrange en soi. Le fait est que lorsque le tableau normal change, et ce fut le cas à cette occasion, nous agissons en conséquence, entre autres choses. Mais bien sûr, il n’y a pas que ce type de mouvement, c’est l’ensemble du tableau qui sert de base au type de décisions que j’ai prises à ce stade », s’est contenté de commenter Michael Claesson, le commandant de l’opération du déploiement à Gotland, à la station de radio suédoise P1 Morgon, dans des propos rapportés par Euractiv.
En plus du déploiement sur l’île, les forces de défense suédoises mènent actuellement diverses opérations autour de la Suède, à la fois visibles et invisibles, a précisé M. Claesson. Une réaction à l’activité accrue de la Russie en mer Baltique, mais aussi à la situation tendue entre la Russie et l’Ukraine.
Certains analystes estiment que les trois navires qui se dirigent vers l’Atlantique se rendraient en réalité vers la mer Noire. Ce qui donnerait un peu plus de poids à la présence russe dans la zone… et donc une force de frappe encore plus importante en cas de tentative d’invasion de l’Ukraine par le sud, opération redoutée depuis plusieurs mois par Kiev et ses alliés occidentaux.
D’étranges drones survolent les centres nucléaires suédoises
En parallèle, en fin de semaine dernière, des drones dont l’origine n’a pas été identifiée sont apparus mystérieusement au-dessus des centrales nucléaires suédoises de Forsmarsk – la plus grande du pays -, Oskarshamn et Ringhals.
Une enquête a été lancée pour faire la lumière sur ces étranges incursions. Actuellement, aucune piste ne semble se dégager. A noter tout de même que ces survols de drones surviennent peu après que la Suède a annoncé qu’elle allait déployer des centaines d’hommes sur l’île de Gotland pour faire face aux drôles de manœuvres des Russes.
Une autre officière militaire suédoise, la générale de division Lena Hallin, cheffe de l’agence de renseignement militaire de la Suède, a déclaré la semaine dernière que le pays était « loin d’une situation normale pour la sécurité de la Suède aujourd’hui ».