Mille milliards de dollars – au minimum – pour que les pays en développement suivent les plus riches sur la voie de la transition

La transition énergétique et les mesures visant à limiter le changement climatique mises en place sont bien trop lentes, personne ne le niera. Le problème, c’est que cet enjeu reste encore aujourd’hui une affaire de pays riches, même si des puissances émergentes comme l’Inde et la Chine sont devenues des actrices de premier plan. Pour que le reste du monde prenne le train du renouvelable en marche il va falloir investir, et beaucoup.

Mari Pangestu n’est pas n’importe qui : ancienne ministre du Commerce de l’Indonésie, elle a aussi été directrice générale de la Banque mondiale pour les politiques de développement et les partenariats. Or, elle estime qu’il faudrait plus d’un billion de dollars – mille milliards – chaque année pour réaliser des progrès significatifs dans la transition climatique dans les pays en développement. Et c’est là sa fourchette basse.

La question à 3.000 milliards

  • Lors d’un entretien avec CNBC’s « Squawk Box Asia », jeudi dernier, elle a estimé que ce budget pourrait atteindre les 3 milles milliards par an.
  • Mais c’est un investissement qu’on ne pourra pas contourner éternellement : sans cet argent, de nombreux pays peinent à s’engager dans la transition énergétique et restent dépendants de sources certes bon marché, mais très polluantes, comme le pétrole et surtout le charbon.
  • Or, les injonctions des pays développés à changer de route passent mal, si elles ne sont pas accompagnées d’un bon coup de main.

« Ce débat va continuer à moins que les pays développés puissent voir que cela concerne le développement et le climat – pas seulement le climat. Et c’est là la source de tension. On ne peut pas séparer les deux. […] Comment passer de l’émission élevée actuelle à l’énergie propre ? Cela nécessitera que nous ayons des ressources. »

Mari Pangestu

Source de friction entre le Nord et le Sud

  • L’ancienne directrice au sein de la Banque mondiale souligne que ce sera là un point de friction lors de la prochaine assemblée du G20, qui doit se tenir en Inde en septembre prochain. Et que celui-ci s’est déjà manifesté lors du rassemblement de nombreux ministres mondiaux pour le G20 Environment and Climate Sustainability à Chennai, en Inde aussi, fin juillet.
  • Cette réunion des ministres du climat devait permettre de trouver un consensus sur des objectifs atteignables. Ce fut un échec total, malgré les euphémismes du ministre indien qui présidait la réunion, Bhupender Yadav, qui évoque « quelques problèmes liés à l’énergie et à certains objectifs. »
  • Entre les lignes : la Chine et l’Arabie saoudite, grandes pollueuses devant l’éternel, ont été accusées de saboter la réunion pour défendre leurs objectifs de croissance.

Pangestu a fait valoir que si les pays développés veulent s’éloigner des combustibles fossiles et « mettre à la retraite les centrales au charbon plus tôt », davantage de soutien devrait être fourni aux pays en développement pour suivre le même mouvement. Alors que pour l’instant, ceux-ci restent dépendants au charbon pour nourrir leur croissance et le niveau de vie de leurs populations.

« C’est bien, vous voulez que nous quittions [l’usage du charbon] tôt » – mais qui va financer le coût d’une sortie anticipée ? Ce sont des entreprises privées, il faut aussi les indemniser. Il y a un problème juridique, un problème financier. C’est donc là que nous devons vraiment entrer dans les politiques et les réformes. […] Une partie devra provenir des ressources propres des pays. Une autre partie doit provenir des banques de développement multilatérales et d’autres sources, qui vont réduire les coûts et les risques – pour que le secteur privé puisse suivre. »

Mari Pangestu
Plus