Les mesures de Pékin pour sauver les promoteurs immobiliers pourraient bien mettre en danger tout le secteur bancaire

Les mesures de Pékin pour sauver les promoteurs immobiliers pourraient bien mettre en danger tout le secteur bancaire
(Photo by STR/AFP via Getty Images)

En lançant à tout-va des bouées de sauvetage aux promoteurs immobiliers lourdement endettés, la Chine pourrait faire bien plus de mal que de bien. Les banques, qui n’avaient jusque-là rien demandé, en seront les principales victimes.

Pourquoi est-ce important ?

Bien que les deux situations ne soient pas de la même ampleur, l'exposition des banques chinoises aux risques accrus en prêtant à des promoteurs immobiliers en difficulté n'est pas sans rappeler la chute de Lehman Brothers. La banque américaine était fortement exposée aux prêts hypothécaires à risque (subprimes) et à des actifs liés à l'immobilier. Ce qui a causé des pertes massives et sa faillite, un moment clé qui a précipité la crise financière mondiale de 2008.

Dans l’actu : La Chine pousse ses géants bancaires à soutenir les promoteurs immobiliers au bord du gouffre, avec une explosion des créances douteuses.

  • Selon Bloomberg, en continuant sur cette pente, ces mastodontes pourraient bientôt être invités (lisez : obligés) à accorder des prêts non garantis aux promoteurs en difficultés. Dont beaucoup sont en défaut de paiement.
  • 11 grandes banques pourraient ainsi devoir mettre de côté l’an prochain 89 milliards de dollars supplémentaires pour les créances immobilières douteuses. Cela représente 2% des bénéfices estimés avant provisions en 2024. C’est énorme.
  • Et comme si les promoteurs immobiliers ne suffisaient pas, les banques sont également invitées (lisez toujours : obligées) à reconduire la dette des gouvernements locaux à des conditions favorables. Le tout afin d’éviter une crise de 9.000 milliards d’euros.

À noter : Contrairement aux banques occidentales, les banques publiques chinoises suivent les directives gouvernementales concernant les prêts et les secteurs ciblés, surtout en période de ralentissement économique. Les prêteurs risquent des conséquences de la part de la Banque populaire de Chine s’ils n’atteignent pas leurs objectifs de prêt ou s’ils ne suivent pas ces directives.

Ne pas prendre à la légère le risque de crédit des promoteurs immobiliers

Zoom arrière : Si les banques commencent à accorder des prêts non garantis à ces promoteurs immobiliers, cela pourrait augmenter le risque de non-remboursement. Ce qui affecterait négativement leur santé financière. Au mieux.

  • Les banques envisagent déjà de réduire leurs objectifs de croissance face à ce couteau sous la gorge. Leurs marges nettes d’intérêts ont déjà chuté à un niveau record de 1,73% en septembre. En dessous du seuil de 1,8% considéré comme nécessaire pour maintenir une rentabilité raisonnable.
    • La réponse du Parlement chinois : le secteur financier a de la marge et peut encore voir ses bénéfices se réduire. Comme si c’était une simple formalité.
  • Elles considèrent aussi la suppression de postes comme une des options envisageables pour faire face aux risques.

« Le gouvernement ne peut pas simplement demander aux banques d’intensifier leurs efforts sans proposer de solution à leurs problèmes. Leurs profits peuvent encore paraître bons en surface, mais si l’on examine de plus près leurs actifs et leurs prêts non performants, la situation ne restera pas positive longtemps. »

Shen Meng , directeur de la banque d’investissement pékinoise Chanson & Co à Bloomberg

Un bis repetita de 2008 à la sauce chinoise ?

Toutefois : Ces mesures internes pourraient ne pas suffire à endiguer le risque de crédit des promoteurs immobiliers. Dans le pire des cas, le secteur immobilier gangrené pourrait entraîner dans sa chute plusieurs banques chinoises. Un peu comme aux États-Unis il y a 15 ans…

  • En témoigne le cours des actions des quatre grands prêteurs d’État chinois, qui se vendent à Hong Kong à des niveaux planchers… Une situation qu’ont connue les grandes banques américaines lors de la crise financière de 2008.
  • Le gouvernement chinois pourrait toutefois intervenir pour soutenir les grandes banques face aux risques liés aux créances douteuses.
    • Les régulateurs envisagent d’exempter les banquiers de responsabilité pour ces créances. Ce qui souligne la volonté du gouvernement de maintenir la stabilité dans les opérations des grands prêteurs.
    • Logique, puisque les grandes banques sont la propriété du gouvernement central et une source majeure de revenus fiscaux. Il est donc improbable que ces banques soient laissées à elles-mêmes pour sauver le secteur immobilier.
  • Par contre, les nombreuses banques régionales de Chine pourraient être les plus exposées aux risques.
    • Selon S&P Global Ratings, ces banques pourraient faire face à une perte de capital de 2,2 billions de yuans. Soit environ 301 milliards de dollars.
    • Reste à voir ici si le parallèle avec la crise financière de 2008 se concrétisera. Un nombre important de banques régionales américaines avaient à l’époque mis la clé sous la porte…
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