Au mois de juin, il y a eu 600.000 offres d’emploi en moins aux États-Unis par rapport au mois précédent. Une baisse historique. Les embauches et les licenciements restent constants. Voilà un premier signe de ralentissement du marché du travail. Sa pleine force, ces derniers mois, a été un moteur de l’inflation. Une baisse des offres d’emploi peut être vue comme une bonne nouvelle, pour l’instant.
The Great Resignation. Un marché de travail en pleine force, où il y a quasi deux fois plus de postes à pourvoir que de demandeurs d’emploi. Ceux qui sont à la recherche d’un emploi le trouvent facilement, et ceux qui veulent changer de carrière le font facilement aussi. Pour attirer ou garder les talents, les entreprises doivent proposer des salaires plus élevés.
Voici l’état du marché du travail aux États-Unis. Ce phénomène accompagnait la relance post-pandémique, mais l’expansion effrénée de ce marché semble désormais ralentir. Au mois de juin, 10,7 millions d’emplois étaient à pourvoir, contre 11,3 millions en mai, annonce le Bureau of Labor Statistics, cité par CNN Business. Il s’agit du plus bas niveau depuis septembre 2021.
Mais c’est un autre chiffre qui se fait remarquer dans les données : la différence entre les deux mois (-600.000) est la plus forte baisse jamais enregistrée dans les données du Bureau (si on exclut les deux premiers mois de confinement, en 2020, qui sont un cas de force majeur). Cet organe public collecte ces données depuis l’an 2000.
Les entreprises commencent à engager moins, au lieu de licencier
Entre les deux mois, les autres données ont moins changé. 6,4 millions de personnes ont été engagées (contre 6,5 millions en mai), 4,24 millions de personnes ont démissionné (même chiffre) et 1,3 million de personnes ont été licenciées (contre 1,4 million de personnes en mai). En d’autres termes, il y a toujours autant de poissons dans le lac, mais le lac est devenu plus petit.
Les postes ouverts sont les premiers à être coupés, dans un contexte de ralentissement économique et de risques de récession. « Lorsque des récessions surviennent, beaucoup de personnes pensent que les licenciements sont la principale raison de la hausse du chômage et de la baisse des niveaux d’emploi, mais ce n’est pas ce qui se passe. Les licenciements n’augmentent généralement que très, très légèrement », explique Julia Pollak, économiste en chef pour ZipRecruiter, à CNN. « Pendant une récession, l’action se situe au niveau des ouvertures de postes et des embauches, et les ouvertures de postes diminuent considérablement pendant une récession. »
Les entreprises préfèrent d’ailleurs réduire les offres d’emploi plutôt que de se séparer de personnes, du moins pour l’instant. « Les employeurs disent ‘nous n’allons pas licencier, mais nous allons renoncer à trouver certains des talents que nous voulons’ « , explique Layla O’Kane, économiste auprès de Lightcast, à CNN.
Une bonne chose pour l’inflation
Cette baisse d’emplois à pourvoir est-elle alors un signe de la récession ? Oui et non, peut-on répondre. D’un côté, certes, cela montre que les entreprises veulent réduire la voilure, mais d’un autre côté, les signaux sur lesquels se base le National Bureau of Economic Research, qui est le seul à être apte à décréter officiellement la récession aux États-Unis, sont encore au vert.
Au final, une perte de vitesse du marché de l’emploi est souvent vue comme un outil pour lutter contre l’inflation. S’il y a moins de postes à pourvoir, les personnes vont plus facilement garder leur poste (au lieu d’aller voir ailleurs), et les demandeurs vont plus facilement accepter une offre. Les entreprises ne doivent plus proposer des salaires plus élevés que d’habitude pour garder ou attirer des talents, ce qui réduit la pression sur les prix. Mais il reste à voir si cette baisse des offres d’emploi n’est pas le signe avant-coureur d’une baisse des embauches et d’une hausse des licenciements.
Ainsi, une réduction des offres d’emploi est accueillie avec le sourire, surtout du côté de la Fed, tant qu’elle n’affecte pas les embauches et les licenciements. Très concrètement, il y a 5,91 demandeurs d’emploi aux Etats-Unis au mois de juin, pour 10,7 millions d’offres d’emploi. Le ratio est d’1,8 (contre plus de 2 après la pandémie, comme indiqué plus haut), ce qui est un signe que le marché du travail a encore de la puissance, malgré de premiers signes de ralentissement.
Les données du mois de juillet (publiées début septembre) seront un élément intéressant pour voir si cette forte baisse devient une véritable tendance. La Fed, qui annoncera une nouvelle hausse des taux d’intérêt fin septembre, sera très attentive à ces chiffres. Elle s’appuie notamment sur la puissance du marché du travail pour légitimer les hausses des taux d’intérêt – tant que ce fameux ratio ne s’approche pas trop de 1 et que les embauches restent constantes, on peut s’attendre à des hausses des taux d’intérêt dans les mois à venir.