Nous avons déjà truffé notre planète de microplastiques, des minuscules particules issues de la dégradation de nombre de nos objets éphémères du quotidien et qu’on retrouve déjà tant sur les hauts plateaux de l’Everest que dans nos propres vaisseaux sanguins. Il s’agit là d’une pollution chimique qualifiée « d’éternelle », car ces plastiques ne se décomposeront pas naturellement de si tôt. Mais ce n’est pas la seule : il pleut littéralement des substances toxiques.

Une équipe de scientifiques européens craint désormais que nous ayons franchi une ligne critique rapporte Science Alert : ils ont relevé des taux très alarmants de produits chimiques persistants dans notre hydrosphère, l’ensemble des zones d’une planète où l’eau est présente, que ce soit sous forme liquide, solide, ou gazeuse. Jusqu’à considérer que nous avons franchi la limite planétaire de sécurité pour les produits chimiques synthétiques.

Suspectés de jouer un rôle dans les cancers

Or ces produits chimiques à très longue durée de vie dans l’environnement, les per- et polyfluoroalkyles (PFAS), abondamment utilisées dans les emballages et dans les matières ignifugées, partagent un autre point commun avec les microplastiques : nous n’avons absolument aucune idée de leurs conséquences à long terme sur notre santé, mais nous nous doutons qu’elles ne seront pas réjouissantes. On suspecte que certains types de PFAS ont un rôle à jouer dans l’apparition de certains cancers, mais nous manquons de recul pour nous avancer plus, et le monde scientifique craint que, quand on découvrira la véritable dangerosité de ces substances, il soit trop tard pour faire quoique ce soit.

Si certaines de ces substances ont été interdites par précaution, parfois depuis plus de 20 ans, elles restent encore présentes dans l’environnement, dans des proportions qu’on ne soupçonnait même pas.

14 fois plus que les recommandations environnementales

Une analyse mondiale au cours des dix dernières années a révélé que les niveaux de PFAS dans l’eau de pluie « dépassent souvent largement » les niveaux recommandés par l’Agence américaine pour la protection de l’environnement (EPA), et ce même dans des régions reculées comme le plateau tibétain, où les chercheurs ont constaté que certains produits chimiques dépassent de 14 fois les recommandations de l’EPA.

« Sur la base des dernières directives américaines concernant la présence de produits chimiques dans l’eau potable, l’eau de pluie serait partout jugée impropre à la consommation », estime Ian Cousins, chimiste de l’environnement à l’université de Stockholm, en Suède. Or, il ne faut pas perdre de vue que cette eau est effectivement bue par une large partie de la population mondiale, et qu’à côté de ça c’est elle qui abreuve la totalité des cultures de notre planète:

La moitié des eaux potables suédoises contaminées

« Bien que dans le monde industriel, nous ne buvions pas souvent l’eau de pluie, de nombreuses personnes dans le monde s’attendent à ce qu’elle soit potable et elle alimente un grand nombre de nos sources d’eau potable », continue le chercheur. En Suède, la moitié des eaux potables municipales dépassaient les niveaux de sécurité. Et on retrouve ensuite ces polluants dans les sols. On n’a décidément pas fini de découvrir à quel point nous changeons la face de notre planète, et pas en bien.