Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Allemagne s’affaire de toutes parts pour réduire sa dépendance à l’énergie russe. À court terme, elle veut que cela passe par le gaz naturel liquéfié (GNL). Le Parlement se prépare à donner son feu vert à une loi d’accélération de ces installations, au grand dam des organisations de défense de l’environnement.
Si la Russie est la plus grande exportatrice de gaz naturel, elle ne figure pas dans le haut du tableau des pays qui produisent et vendent du GNL. C’est pourquoi l’Allemagne veut transformer son approvisionnement. Le hic, c’est qu’elle ne dispose pas des terminaux pour en réceptionner.
Depuis quelques mois, les autorités allemandes multiplient les efforts pour se doter des installations ah hoc. Il faudra toutefois plusieurs années avant qu’elle dispose de ses propres terminaux méthaniers. En attendant, elle a débloqué le mois dernier 3 milliards d’euros pour acquérir quatre terminaux flottants, qui devraient déjà pouvoir être opérationnels pour l’hiver prochain.
Pour faciliter le développement de ces installations, le Bundestag doit voter ce jeudi soir une loi qui accélérera leur construction. Celle-ci doit notamment permettre aux autorités publiques de « renoncer à certaines exigences procédurales » rendues obligatoires par la législation européenne, comme les évaluations d’impact environnemental, explique Euractiv. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles, insiste le gouvernement, à l’initiative de cette loi.
Prêts pour l’hydrogène, vraiment ?
Face à cette ruée vers les terminaux GNL, les principales organisations de défense de l’environnement actives en Allemagne montent au créneau. « La loi d’accélération nous enferme dans une planification surdimensionnée et néfaste pour le climat », a notamment averti BUND.
Si l’ONG emploie des mots si forts, c’est parce que la loi en question prévoit d’autoriser l’exploitation des terminaux méthaniers jusqu’en 2043. Les autorités ont justifié ce très long délai par le fait que ces installations seront « H2-ready », c’est-à-dire qu’elles pourront, à un moment donné, servir à importer de l’hydrogène vert plutôt que du gaz. Pourtant, la loi « n’oblige pas les exploitants de terminaux GNL à les rendre prêts pour l’hydrogène », dénonce WWF.
De son côté, la NABU déplore l’exemption de l’étude d’impact sur l’environnement prévue par la loi, qu’elle considère comme un « atout précieux dont l’efficacité ne doit pas être affaiblie à la légère ». « Cette approche ne doit en aucun cas servir de modèle pour tous les futurs projets d’infrastructure », ajoute l’ONG.
Environnement contre approvisionnement
Les trois ONG précitées ont déjà annoncé qu’elles prévoyaient de porter plainte et d’utiliser toutes les voies légales pour faire cesser les différents projets de terminaux méthaniers autorités par cette future loi. Elles ont notamment dans le viseur le terminal flottant de Wilhelmshaven, dont la construction vient de débuter.
Le vice-chancelier Habeck – qui est aussi ministre de l’Économie et du Climat – a tenu à contrer les arguments environnementaux par des enjeux plus pragmatiques. « Je voudrais expressément mettre en garde contre le fait d’intenter des procès contre cette infrastructure [de GNL] « , a-t-il prévenu début mai sur RTL. « Si nous n’avons pas les terminaux GNL, et si le gaz ne vient pas de Russie, la sécurité de l’approvisionnement en Allemagne n’est pas garantie. »
Un argument qui ne fera sans doute pas mouche auprès des ONG.