Il y a quelques semaines, Varsovie et Budapest menaçaient de bloquer le budget et le plan de relance européens, dont ils bénéficient pourtant grandement. En cause, la fameuse clause qui permet de bloquer les fonds en cas de non-respect de l’État de droit. L’Allemagne a servi d’intermédiaire pour pacifier les choses. Une ‘déclaration interprétative’ précisera comment et pour quoi la clause pourra agir, protégeant les deux États.
L’Europe s’évite une nouvelle crise majeure. Depuis un certain temps déjà, la Pologne et la Hongrie suscitent de nombreuses inquiétudes. L’attitude des deux chefs d’État, Andrzej Duda et Viktor Orban, ainsi que les attaques répétées contre la justice, la presse ou encore les droits des LGBT ne sont pas en adéquation avec les valeurs européennes, juge-t-on à Bruxelles.
C’est pourquoi, lors de la création du plan de relance à 750 milliards d’euros et du budget européen à plus de 1.000 milliards d’euros, une clause du respect de l’État de droit conditionnait le soutien financier des institutions européennes. Ainsi, la Commission peut proposer aux États membres de bloquer le versement des fonds. À la suite de quoi les États doivent se prononcer à majorité qualifiée (15 États sur 27, représentant 65% de la population européenne) dans les trois mois.
Cette clause ne sera pas supprimée, malgré la menace de véto des deux États de l’Est. Mais une déclaration interprétative viendra apporter des précisions ‘juridiques et procédurales’ sur ce mécanisme. L’Allemagne, qui est à la tête de la présidence tournante d’UE, a fait un travail diplomatique important pour arriver à ce résultat.
Que contient cette déclaration interprétative ?
- L’utilisation du mécanisme devra reposer sur une base ‘objective, juste et impartiale’
- Aucun État ne pourra être traité ‘de manière discriminatoire’
- Les États concernés par le mécanisme pourront faire appel devant les chefs d’État et de gouvernement
- Ils pourront aussi saisir la Cour de justice de l’UE, et la Commission devra tenir compte de son avis.
Comment comprendre cette séquence ?
Ce mécanisme reste une menace. Chacun espère qu’on ne devra jamais en arriver là. Mais l’UE refusait formellement de retirer cette clause. Et la pression était du côté des deux Etats, car ils bénéficient grandement du budget et du fonds européens.
Les deux chefs d’Etat devaient toutefois montrer qu’ils avaient obtenu quelque chose à leur population, pour ne pas perdre la face. Cette déclaration interprétative est une petite concession qui ne change pas grand-chose. En coulisses, on s’attendait à ce que la Hongrie et la Pologne fassent valoir leurs droits devant la CJUE, quoiqu’il advienne, s’ils devaient un jour être confrontés à ce mécanisme.
L’UE reste une Terre de compromis.