Virage à 180°C ? La Vivaldi va tenter de prolonger Doel 1, Doel 2 et Tihange 1 pour « quelques années de plus ». Vendredi matin, un rapport d’Elia, responsable du réseau haute tension, indiquait un risque de pénurie d’électricité pour deux hivers.
Un rapport d’Elia est arrivé sur la table du gouvernement et a fuité dans la presse. Il indiquait le risque non nul de manquer entre 900 et 1,2 MW pour les hivers 2025 et 2026. Réuni en kern, le gouvernement veut se donner la possibilité de prolonger les trois plus vieux réacteurs, pour quelques années.
- Le hic, c’est que la loi de la sortie du nucléaire ne le permet pas. Ce qui signifie qu’elle doit d’une façon ou d’une autre être abrogée, un tabou qui était pourtant absolu pour les Verts (ce ne serait toutefois pas le premier à sauter).
- L’autre épine dans le pied de la Vivaldi pour franchir cette étape est de s’entendre avec Engie. Or, l’énergéticien ne prendra aucune décision concernant les plus vieux réacteurs avant un accord définitif sur la prolongation pour dix ans de Doel 4 et Tihange 3.
- Un « accord de principe » a été signé début janvier par rapport aux deux plus jeunes réacteurs. Mais il reste à déterminer un prix maximum pour la gestion des déchets. Les trois réacteurs les plus anciens ajoutent donc une variable à l’équation, qui devra trouver une solution pour le mois de mars.
- Le temps presse, car une fois ces deux difficultés franchies, il faudra mettre en route la procédure technique (permis environnementaux, enquête publique et travaux de maintenance).
- Alexander De Croo (Open VLD) et Tinne van der Streaten (Groen) ont été chargés de contacter Engie et de demander à l’AFCN de contrôler le volet sécurité.
- Rappelons que Tihange 2 a passé l’arme à gauche plus tôt cette semaine. Doel 3 avait fait de même en septembre dernier. La politique énergétique de la Vivaldi défie décidément toute logique.
Les Verts boivent le calice jusqu’à la lie
- Pour les Verts, c’est un énième camouflet. Les écologistes étaient entrés dans la Vivaldi avec la ferme intention de fermer le parc nucléaire belge, pour le remplacer provisoirement par du gaz. L’invasion de la Russie en Ukraine les a obligés à concéder la prolongation de deux réacteurs, en mars dernier. Les Verts ont ensuite dû se résoudre à partager les risques au sein d’une structure commune, condition sine qua non pour convaincre Engie de prolonger Doel 4 et Tihange 3. Désormais, ce ne sera peut-être pas 2 mais 5 réacteurs qui seront prolongés. C’est aussi un camouflet pour Elia dont un précédent rapport avait pourtant assuré qu’il n’y avait pas de risque pour l’approvisionnement.
- Pour le MR, qui a poussé pour prolonger 5 réacteurs dès 2021, c’est clairement une victoire. Certainement l’un des plus grands mérites de son président, Georges-Louis Bouchez : avoir perçu que le vent tournait au sujet du nucléaire pour en profiter politiquement. Le Montois n’a même pas à en faire des caisses et n’a qu’à se baisser pour ramasser les lauriers : « Le MR le réclamait depuis deux ans, le gouvernement fédéral s’engage enfin dans la prolongation de 5 réacteurs nucléaires. Après déjà deux en début d’année, ce sont trois autres unités qui s’ajoutent. Il y a une obligation de résultat pour garantir la sécurité d’approvisionnement. Un prix maîtrisé de l’énergie et la diminution des émissions de CO2. Le défi climatique sera relevé en choisissant les bonnes technologies. Et le seul mix crédible est renouvelable et nucléaire. En route vers les nouveaux réacteurs ! »