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La flambée des prix de l’énergie provoque une grande agitation dans le monde industriel allemand : « Une désindustrialisation progressive peut être à craindre »

La flambée des prix de l’énergie provoque une grande agitation dans le monde industriel allemand : « Une désindustrialisation progressive peut être à craindre »
Südzucker/Hans-Rüdiger Kemter/Getty Images

L’Allemagne, le centre industriel de l’Europe, fait face à des nuages sombres. Il faudra peut-être même tenir compte du départ d’un certain nombre de producteurs importants. La raison de cette agitation est la hausse des coûts de l’énergie qui pèse de plus en plus sur les fabricants de composants pour les industries automobile, chimique et sidérurgique, piliers essentiels de l’économie allemande.

Les prix du gaz et de l’électricité ont plus que doublé en Allemagne sur les deux derniers mois. L’électricité est désormais cotée à 570 euros par mégawattheure. Il y a deux ans, le MWh était à 40 euros.

Dramatique

« L’inflation énergétique est beaucoup plus dramatique en Allemagne qu’ailleurs », affirme Ralf Stoffels, directeur général de la société BIW Isolierstoffe, fabricant de silicones pour les industries automobile, aérospatiale et de l’électroménager. « Une désindustrialisation progressive de l’économie allemande peut être à craindre », explique-t-il à l’agence Bloomberg.

Jusqu’à présent, l’Allemagne dépendait principalement du gaz russe pour alimenter ses centrales électriques et ses usines. « Cependant, la Russie ayant fortement réduit l’approvisionnement en gaz, l’Allemagne est confrontée à un défi sans précédent pour répondre aux besoins en électricité du pays et faire fonctionner les entreprises. »

« Sous l’influence des prix élevés de l’énergie, des arrêts temporaires ont déjà été enregistrés. En conséquence, entre décembre et mars, en Allemagne, la production d’engrais et d’acier, entre autres, a été sévèrement limitée. »

Les analystes soulignent que les prix de l’énergie enregistrent actuellement des pics encore plus élevés, ce qui exerce une pression croissante sur l’industrie. « Les prix du gaz en Europe ont récemment atteint un niveau record de 241 euros par mégawattheure », font-ils valoir. « Ce niveau est environ onze fois supérieur aux prix habituels pour cette période de l’année ».

« Bien que le gouvernement allemand tente de limiter dans une certaine mesure la hausse des tarifs pour les ménages, les entreprises ne sont pas à l’abri de la montée en flèche des coûts », ajoute Bloomberg. « Beaucoup répercuteront les coûts sur les clients, mais d’autres menacent même d’envisager une fermeture. »

La transmission

Les porte-paroles d’Evonik Industries, un fabricant de produits chimiques présent dans vingt-sept pays, reconnaissent que les prix font peser une lourde charge sur de nombreuses entreprises à forte intensité énergétique ayant des activités internationales.

Le groupe a décidé de remplacer 40 % de sa consommation de gaz en Allemagne par du GNL et du charbon. L’entreprise répercute également la hausse des coûts sur les clients. « Une éventuelle délocalisation des activités vers d’autres endroits dans le monde n’est pas discutée », indiquent en revanche les porte-parole.

Mais plusieurs éléments indiquent que la position industrielle de l’Allemagne se détériore. « Au cours des six premiers mois de cette année, le volume des importations de produits chimiques a augmenté d’environ 27 % par rapport à la même période de l’année dernière », note-t-on.

« Dans le même temps, la production chimique allemande a connu une contraction. En juin de cette année, ces chiffres étaient inférieurs de près de 8 % à ceux de décembre de l’année dernière. »

Agitation sociale

« Si l’industrie doit passer à des semaines de travail plus courtes et à des salaires plus bas en raison de la crise énergétique, il faudra compter avec une nervosité croissante », souligne Martin Devenish, analyste chez S-RM Intelligence & Risk Consulting. « Tous les ingrédients de l’agitation sociale sont réunis. Le risque de tels problèmes est sous-estimé. »

Le Fonds monétaire international a prédit le mois dernier que la dépendance de l’Allemagne à l’égard des approvisionnements en gaz russe ferait de ce pays le plus mauvais élève du Groupe des Sept, un forum des principales nations industrielles, cette année.

Bloomberg note qu’Aurubis, le plus grand producteur de cuivre d’Europe, cherche également à minimiser la consommation de gaz et à en répercuter le coût sur les clients. Le fabricant de sucre Südzucker, quant à lui, a élaboré des plans d’urgence pour son approvisionnement énergétique au cas où la Russie couperait complètement l’approvisionnement en gaz de l’Allemagne.

Le constructeur automobile allemand BMW se prépare également à d’éventuelles pénuries: « Le constructeur automobile exploite trente-sept centrales à gaz qui produisent de la chaleur et de l’électricité dans des usines en Allemagne et en Autriche », ont précisé les analystes. « Cependant, BMW envisage de remplacer cet approvisionnement par l’utilisation de services publics locaux. »

L’entreprise d’emballage Delkeskamp Verpackungswerke annonce qu’elle envisage de fermer une usine de papier dans la ville de Nortrup, en Basse-Saxe, en raison des coûts élevés de l’énergie. Quelque 70 employés perdraient leur emploi dans le processus.

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