En Turquie, toute personne qui effectue des recherches économiques et publie des données non officielles sur, par exemple, l’inflation, risque trois ans de prison. Une autorisation doit d’abord être demandée à l’office statistique du pays. Ce dernier dispose ensuite de deux mois pour évaluer la méthodologie de recherche.
L’économie turque est aux prises depuis des mois avec des hausses de prix ininterrompues dues à la faiblesse de sa monnaie, la lire. Les prix sont en hausse depuis des mois en raison des doutes sur la stabilité de la monnaie. Ce qui n’aide pas, c’est l’opposition d’Erdogan à la hausse des taux d’intérêt, qui, selon les économistes, est un moyen de lutter contre une inflation élevée. La hausse des prix de l’énergie et des matières premières suite à la guerre en Ukraine vient s’ajouter à cette situation déjà délicate.
En outre, différents taux d’inflation circulent actuellement dans le pays : le taux officiel, fourni par le gouvernement Erdogan, et le taux officieux, calculé par des parties indépendantes.
L’une de ces voix indépendantes est l’agence de statistiques ENAGrup. En mars, elle a fait état d’un taux annuel d’inflation de 142,63 %. C’est plus du double du chiffre officiel de 61,14% pour le même mois. L’inflation galopante est une source d’inquiétude pour le gouvernement Erdogan, à un peu plus d’un an des élections.
Le parti AKP du dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan voulait soumettre la proposition de loi au Parlement dès cette semaine, mais ces projets ont maintenant été retardés, car ils nécessitent des recherches supplémentaires.
« L’agence statistique a été délibérément diffamée »
L’agence statistique turque a déjà déposé une plainte pénale contre ENAGrup, cette agence de recherche indépendante se spécialisant dans le domaine de l’inflation. ENAGrup est accusé de « diffamer délibérément » l’agence nationale de statistiques et de « tromper l’opinion publique ».
L’agence de presse Bloomberg a pu voir le projet de loi de l’AKP. Celui-ci stipule que les chercheurs n’ont pas le droit de publier des données sur quelque plateforme que ce soit sans demander au préalable l’autorisation de l’Office statistique turc. Ce dernier dispose ensuite de deux mois pour évaluer la méthodologie. Les personnes qui enfreignent la loi risquent entre un et trois ans de prison.
Le projet de loi initial prévoit également l’interdiction des sites web publiant de statistiques non approuvées. Dans le cas d’ENAGrup, l’entreprise a publié les données sur son site web et sur son compte Twitter.