Jack-in-the-box : le défaut de conception critique qui fait exploser les chars russes

Il est apparu clairement après quelques semaines que l’armée russe avait sous-estimé la résistance ukrainienne. En plus d’une armée farouchement motivée, les soldats russes ont également dû faire face à des lacunes logistiques et matérielles. Les innombrables chars russes en ruine dans les rues ukrainiennes en sont un signe évident. Souvent, la tourelle se retrouve à plusieurs mètres du véhicule. Un signe évident d’un grave défaut de conception que les Occidentaux connaissent depuis des années.

Les chars russes en ruine sont devenus un spectacle auquel on s’habitue le long des routes ukrainiennes. Selon les renseignements britanniques, l’armée russe a déjà perdu quelque 580 chars depuis le début de l’invasion. Ce qui est frappant, c’est que, souvent, le véhicule blindé se retrouve littéralement éventré. Sa tourelle se trouve quelques mètres plus loin sur le sol. Ce qui indique qu’elle a explosé dans les airs.

Jack-in-the-box

Il s’agit d’un phénomène bien connu avec les vieux chars, parfois appelé l’effet « jack-in-the-box ». C’est le nom du jouet où un diable sort par surprise d’une boîte à musique après l’avoir fait tourner.

Cet effet est dû à une erreur de conception cruciale. L’espace de stockage des munitions des chars utilisés par l’armée russe en Ukraine est placé à l’intérieur du char, au niveau de la tourelle. Lorsque le char est touché par une puissante explosion qui parvient à percer le blindage, celle-ci suffit à provoquer une réaction en chaîne à l’intérieur. Les munitions, qui ne sont pas protégées de manière adéquate, peuvent elles-mêmes exploser. C’est-à-dire que tous les projectiles stockés à l’intérieur du char explosent en même temps, envoyant la tourelle à plusieurs mètres de hauteur dans les airs.

Nicholas Drummord, expert en défense et ancien officier de l’armée britannique, a indiqué à CNN que l’équipage de ces chars – deux hommes dans la tourelle, un troisième au volant – pouvait ainsi être directement ciblé. « Si vous ne pouvez pas sortir dans la première seconde, vous êtes grillé », a-t-il expliqué.

Un char russe détruit à Marioupol. (Maximilian Clarke / Isopix)

Une erreur connue depuis des années

Selon Drummord, ce défaut de conception est présent dans pratiquement tous les chars russes. Les anciens chars T-72, mais aussi les modèles plus récents comme le T-80, le T-92 et le BMD-4 souffrent tous d’un espace de stockage de munitions placé dans la tourelle. Le BMD-4, Drummord parle même de « cercueils mobiles » qui sont « simplement balayés » lorsqu’ils sont touchés par un projectile.

Le fait que l’armée russe n’ait pas résolue le problème est surprenant. L’effet « jack-in-the-box » a déjà été identifié il y a des années et a amené la plupart des fabricants occidentaux à modifier la conception de leurs chars. Les munitions sont souvent placées dans des compartiments séparés et l’équipage est lui aussi séparé de la tourelle. De cette façon, les hommes sont relativement à l’abri d’une explosion, et ils ont une chance de s’échapper à temps du véhicule endommagé. Au lieu d’exploser avec les munitions après le premier coup critique.

La raison pour laquelle l’armée russe n’a pas tiré les leçons du passé et éliminé cette conception dans les chars plus modernes n’est pas tout à fait claire. Celle qu’elle continue d’utiliser présenterait certains avantages. Par exemple, elle permet de gagner beaucoup d’espace, un mécanisme automatique recharge le canon – ce qui réduit le nombre de personnes nécessaires – et cela permet aux chars d’avoir un profil plus bas – ce qui les rend plus difficiles à atteindre.

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