On se dirige vers une redistribution des cartes dans la diplomatie du Moyen-Orient. Et cela pourrait avoir un impact sur le monde entier. Ainsi, Israël serait en train de négocier avec trois pays voisins en vue d’une coopération face à l’Iran. Une organisation qui pourrait ne plus nécessairement chercher le soutien des États-Unis.
Longtemps isolé au sein du Moyen-Orient, Israël est en train de se trouver de nouveaux alliés. L’an dernier, Israël a signé les accords d’Abraham avec les Émirats Arabes Unis, Bahreïn, le Soudan, le Maroc et le Kosovo. Un traité de paix également synonyme d’établissement formel des relations diplomatiques entre ces pays et de coopérations dans de nombreux domaines.
Des accords, vivement encouragés par les États-Unis de Trump, qui ont eu pour autre effet d’accentuer la rupture entre les États sunnites et l’Iran chiite.
Craintes vis-à-vis de l’Iran
Il semble que ce phénomène soit en train de se confirmer. Le Jerusalem Post, citant un responsable israélien resté anonyme, a annoncé qu’Israël avait entamé des ‘discussions informelles’ avec les Émirats Arabes Unis, Bahreïn et l’Arabie Saoudite afin de faire face à des ‘ennemis communs’.
‘Il y a beaucoup de choses pour lesquelles nous pourrions élargir notre coopération’, a confié la source au média israélien.
S’il ne l’a pas dit explicitement, le responsable de l’État hébreu vise principalement l’Iran et ses grandissantes ambitions nucléaires, qui inquiètent ses voisins du Moyen-Orient. Tous alliés des États-Unis, ces quatre pays craindraient la volonté de Joe Biden de réintégrer l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien (aussi appelé JCPOA).
Vers un OTAN du Moyen-Orient…
Cette annonce semble corroborer les propos tenus par Ronald Lauder, le président du Congrès Juif Mondial, dans le quotidien saoudien – pro-gouvernemental – Arab News. L’homme a eu l’occasion d’y écrire un plaidoyer visant à l’instauration de ce qu’il nomme un ‘Middle East Defense Organization (MEDO)’, un OTAN à la sauce moyen-orientale.
Là aussi, Lauder pointe l’Iran comme l’ennemi public numéro 1. Il dénonce les avancées iraniennes en termes d’armement nucléaire, ‘ses provocations répétées à l’encontre de la communauté internationale’ et ‘ses violations des engagements qu’il a pris dans le Plan d’action global conjoint de 2015 (JCPOA’. L’attitude de l’Iran, selon Lauder, serait de nature à ‘déstabiliser la région’.
D’après le président du Congrès Juif Mondial, les accords d’Abraham ont initié une ‘véritable révolution régionale’. D’autres pays arabes seraient sur le point de rejoindre ce traité. Pour Lauder, il faudrait même ‘aller au-delà’.
… et un retournement contre l’Occident ?
Lundi, l’ancien chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo, cité par l’AFP, a confirmé cette tendance. Il a désigné l’Arabie Saoudite parmi les autres pays arabes susceptibles de rejoindre les accords d’Abraham.
Interrogé sur l’éventualité de créer un OTAN du Moyen-Orient – incluant Israël – le cabinet du Premier ministre Benyamin Netanyahou est resté évasif.
‘Ce rapport ne confirme pas les faits, mais nous sommes toujours intéressés par le renforcement des liens avec nos partenaires du Moyen-Orient’, a répondu le ministère, cité par le Jerusalem Post.
Notons que Lauder ne s’est pas contenté de plaider pour un OTAN moyen-oriental. Il a également fait savoir qu’une telle organisation pourrait se détourner totalement du monde occidental.
‘[Les leaders d’opinion et les décideurs au Moyen-Orient] constatent, consternés, l’incapacité de l’Occident à mettre un terme aux développements belliqueux et dangereux [de l’Iran]. Beaucoup ont perdu confiance en l’Amérique et en Europe. Certains envisagent de se tourner
vers la Russie et la Chine. Tous se retrouvent dans une situation déconcertante et angoissante, reconnaissant qu’ils ont atteint un tournant capital’, a-t-il ainsi annoncé.
Rappelons qu’il s’agit là de l’opinion de Lauder et non d’Israël. La semaine dernière, l’État hébreu a d’ailleurs relancé un groupe de travail avec les États-Unis contre l’Iran.
L’Europe hausse le ton
Ce lundi, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont dénoncé, dans une résolution, l’accord technique bilatéral conclu le 21 février entre l’Iran et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Cet accord réduit le rythme des inspections des sites de production nucléaire iraniens. Une résolution soutenue par les États-Unis, mais pas (du tout) par la Russie.
L’ambassadeur russe Mikhail Ulyanov a appelé à ‘être prudents et à s’abstenir de prendre des mesures maladroites et irresponsables qui peuvent (même vont) compromettre les perspectives de restauration complète du JCPOA dans un avenir proche’.