L’inflation sous-jacente reste élevée : ça va faire mal

L’inflation recule lentement, le marché du travail fonctionne à plein régime et les Américains continuent de dépenser allègrement. Derrière ce tableau favorable se cache le danger qu’une hausse inattendue des taux d’intérêt dans le courant de l’année puisse déclencher une récession aux États-Unis.

La semaine dernière, une série de chiffres sur l’économie américaine a une nouvelle fois été déversée sur le monde financier. Le fil conducteur de ces chiffres est que l’économie américaine se porte plutôt bien. L’étroitesse du marché du travail montre que les entreprises sont à la recherche de nouveaux collaborateurs. Et ce n’est pas ce qu’elles feraient si elles s’inquiétaient de l’évolution du chiffre d’affaires pour le reste de l’année. Un nombre impressionnant de 517.000 nouveaux emplois ont été créés en janvier. C’est beaucoup plus que les 200.000 que les économistes avaient prévus. Les gens semblent également peu préoccupés par leur avenir financier. En effet, les ventes au détail ont augmenté de 3% en janvier.

L’inflation sous contrôle, ou pas ?

Le plus grand coup de pouce économique de la semaine dernière est sans doute le fait que l’inflation américaine semble être maîtrisée. En janvier, l’indice des prix à la consommation (IPC) était de 6,4%. Un mois plus tôt, il était de 6,5%. Et pendant l’été, il avait atteint les 9%. C’est une bonne nouvelle car une baisse de l’inflation réduit la pression exercée sur la banque centrale américaine pour qu’elle ralentisse l’économie en augmentant les taux d’intérêt. On s’attendait à ce que la Réserve fédérale augmente les taux d’intérêt jusqu’à 5% au printemps, avant de les baisser progressivement. Au vu des développements récents, la première partie de ces attentes n’a pas besoin d’être modifiée. Pour la seconde, c’est une autre histoire.

Salaires plus élevés, prix plus élevés

En effet, toutes les tendances citées ci-dessus suggèrent qu’il faudra plus d’efforts pour ramener l’inflation américaine vers un niveau de 2% que ce que les marchés financiers et le monde des devises anticipent actuellement. En effet, un marché du travail tendu se traduit par une hausse des salaires, que les entreprises répercutent à leur tour sur leurs prix. En outre, la baisse de l’inflation est principalement due à la diminution des prix de l’énergie et des denrées alimentaires. Le taux d’inflation sous-jacente, sur lequel la Réserve fédérale fonde sa politique, se maintient à 5,6%. C’est à peine moins que les 5,9 % des mois d’été. Dans l’ensemble, il semble que l’inflation soit beaucoup plus tenace que ce que de nombreux partis espèrent secrètement.

Le retour du dollar

Cette attente se modifie lentement mais sûrement. De plus en plus d’économistes ajustent leurs prévisions de hausse des taux d’intérêt américains à 6%. Les disciples de l’économiste John Taylor – qui a lié l’inflation et les taux directeurs dans une belle équation il y a 30 ans – envisagent même une hausse à 8%. Cela n’est pas de bon augure pour l’économie américaine. Mais une telle hausse des taux donnerait un solide coup de pouce au dollar. Car cela rendrait plus attrayant le fait de détenir des actifs dans cette devise. En septembre, l’euro avait regagné beaucoup de terrain par rapport au dollar. Toutefois, en février, cette progression s’est arrêtée. Si l’inflation américaine est aussi forte qu’elle semble l’être cette semaine, le dollar devrait porter une féroce contre-attaque.


Joost Derks est un spécialiste des devises chez iBanFirst. Il a plus de vingt ans d’expérience dans le monde des devises. Cette chronique reflète son opinion personnelle et ne constitue pas un conseil professionnel (d’investissement).

(OD)

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