La population indienne croit encore et dépassera celle de la Chine dès l’année prochaine. Pourtant, la croissance démographique indienne diminue progressivement, voire s’inverse dans les régions les plus riches. Mais le pays doit encore trouver comment satisfaire une jeunesse très nombreuse.
L’Inde sera le pays le plus peuplé au monde en 2023 : vers une bombe démographique ?
Pourquoi est-ce important ?
Les projections sont formelles : l'année prochaine, l'Inde doublera la Chine et deviendra le pays le plus peuplé au monde. Pourtant, sa démographie est plus complexe que la hausse exponentielle autrefois décrite, et la population indienne croît ou décroît selon les régions.Enjeu démographique et climatique
Les faits : la République indienne est actuellement peuplée de plus de 1,39 milliard de citoyennes et citoyens, ce qui en fait la plus grande démocratie au monde et le second pays le plus peuplé de notre planète. Or, la population indienne devrait dépasser celle de la Chine – 1,41 milliard – dans le courant de l’année 2023, et même atteindre le chiffre faramineux de 1,65 milliard à l’horizon 2050.
- La croissance démographique à venir de l’Inde suscite des inquiétudes, alors que le monde se trouve réuni à la COP 27 pour discuter de la crise climatique (et, peut-être, avancer des solutions).
- L’un des enjeux n’est autre que l’avenir de puissances émergentes telles que l’Inde, dont la population nombreuse aspire massivement aux standards des classes moyennes occidentales. Avec ce que cela implique en termes de consommation d’énergie et de rejets de gaz à effet de serre.
- Mais la démographie de l’Inde est complexe : dans le nord, dans les États de Bihar et de l’Uttar Pradesh, la population continue d’augmenter, tandis que dans le sud du pays, plus riche, les chiffres se stabilisent et, dans certaines régions, diminuent. La transition démographique vers un modèle occidental (longue espérance de vie, peu d’enfants) est en cours en Inde, mais pas dans toutes les régions, ni partout à la même vitesse.
L’enjeu : pour le gouvernement indien, c’est un véritable dilemme qui se profile à l’horizon. Dans une partie du pays, la population moyenne vieillit et un déficit des naissances se dessine, tandis que dans l’autre, la population reste jeune et continue de croître, mais avec un déséquilibre des naissances en faveur des garçons qui reste très marqué.
- La natalité a diminué dans tout le pays depuis les années 1950, mais elle reste forte dans le nord de l’Inde, avec encore plus de trois enfants par femme dans l’Uttar Pradesh – la dernière région avec un tel taux de croissance. Dans les années 1950 toutefois, en moyenne, une Indienne avait six enfants.
- La moyenne d’âge est de 29 ans, mais ni le système d’éducation ni le taux d’emploi ne suivent. Dans toute l’Inde, le chômage des jeunes culmine à 23 % et seul un diplômé sur quatre a un emploi. Le taux illettrisme reste élevé, bien que l’alphabétisation soit passée de passé de 12% à 74,4% en 2011, date du dernier recensement général, ce qui plombe les opportunités d’avenir de cette jeunesse.
« L’Inde dispose d’une fantastique fenêtre d’opportunité, mais elle ne sera là que pour les deux prochaines décennies environ. Nous avons la capacité d’exploiter le potentiel de la jeunesse, mais nous devons investir dès maintenant dans l’éducation, la santé et la santé sexuelle des adolescents si nous voulons en récolter les fruits. Sinon, notre dividende démographique pourrait se transformer en catastrophe démographique. »
Poonam Muttreja, directrice exécutive de la Fondation pour la population en Inde, auprès de The Guardian
Des droits des femmes indiennes
- Pour enrayer son explosion démographique, l’Inde doit parier à la fois sur l’éducation et un meilleur accès à la contraception, en particulier pour les femmes. Si le pays est officiellement plutôt libéral sur ces sujets, les tabous demeurent.
- La société traditionnelle indienne favorise les fils aux filles, car ce sont eux qui perpétuent le patronyme, s’occupent des parents lorsqu’ils sont vieux et, surtout, héritent des terres. À l’inverse, une fille représente une dot à payer. Conséquence : dans les régions rurales, le modèle familial repose encore sur aux moins deux fils, tandis que les filles sont négligées et accèdent moins aisément à l’éducation.
- L’avortement sélectif des filles a créé un déséquilibre des naissances : sur une échelle de 20 ans, ce seraient 10 millions de filles qui ne seraient pas nées en Inde en raison de cette préférence masculine.