Faire preuve de créativité avec l’argent russe, c’est ce qu’Euroclear est en train de faire : comment cela fonctionne-t-il ?

Un grand bâtiment situé près de la gare du Nord à Bruxelles attire ces jours-ci plus d’attention qu’il ne le souhaiterait. Il s’agit du siège d’Euroclear. C’est à cet endroit-là que ce géant de la finance fait preuve d’une grande créativité avec l’argent russe, pour le plus grand bonheur de l’exercice budgétaire du gouvernement De Croo. Mais que se passe-t-il exactement ? Business AM s’est entretenu avec Tom Simonts, économiste à la CBC.

La société : Euroclear est un géant des valeurs mobilières basé à Bruxelles, dont l’État belge est l’un des principaux actionnaires. La société est l’un des principaux acteurs du système financier international et gère les transactions nationales et internationales en actions, obligations et autres produits dérivés.

Le gardien : Euroclear s’assure tout d’abord que l’acheteur d’une transaction ait suffisamment de fonds sur son compte pour confirmer l’achat. Il s’assure également que le vendeur dispose des actifs sur son compte pour les livrer. Euroclear s’interpose donc entre les deux parties en tant que « gatekeeper« . Lorsque les deux parties disposent de fonds suffisants, Euroclear réalise la transaction.

Quelques chiffres stupéfiants :

  • 37.600 milliards d’euros de titres sous gestion
  • 295 millions de transactions traitées par an
  • Plus de 2 000 clients, dont de grandes banques, dans le monde entier.

Dans l’actualité : Euroclear a gelé les fonds russes. Cela est dû aux diverses mesures et sanctions prises à l’encontre de la Russie par l’Europe. Par conséquent, Euroclear ne renvoie plus d’argent russe en Russie.

L’analyse : Actuellement, Euroclear est assis sur une montagne d’argent russe et a décidé de « faire preuve de créativité », note Simonts. Par exemple, l’entreprise investit l’argent russe gelé dans des obligations.

  • « Depuis que cet argent stagne, Euroclear a décidé de l’investir – et pas dans le bitcoin ou quoi que ce soit d’autre, pour être clair. Il s’agit d’obligations de la Banque centrale européenne. Euroclear peut donc utiliser l’argent pour son propre intérêt ».
  • Cette décision a suscité des protestations en Russie. Simonts en fait l’écho : « Plusieurs banques russes et d’autres parties affirment qu’elles n’ont rien à voir avec le régime russe. ‘Il est injuste que nos avoirs soient gelés’, disent-ils. De plus, les revenus de ces investissements sont également versés à Euroclear. »
  • Cela va-t-il en rester là ? « Les lois applicables en temps de guerre ne sont pas les mêmes qu’en temps de paix », répond Simonts. « Les avocats ont dû se pencher sur la question. Ils se retranchent naturellement – et à juste titre – derrière les grandes sanctions internationales et européennes contre la Russie. Il se peut que, s’il s’avère que certaines parties étaient finalement innocentes, elles aient droit aux bénéfices réalisés. Mais c’est une question qui se posera dans quelques années. »
  • Euroclear est-il en danger ? « Dans le pire des cas, ils devront rembourser ces bénéfices supplémentaires. Il ne s’agira jamais d’amendes ou autres », conclut l’expert de la CBC.

En attendant, l’Etat belge en profite bien, le gros chiffre d’affaires d’Euroclear a rapporté 625 millions d’euros de recettes supplémentaires qui ont permis de clôturer le dernier exercice budgétaire de la Vivaldi.

BL

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