Deuxième attaque au missile balistique en une semaine sur Abu Dhabi, quels risques pour le marché du pétrole?

Deux attaques au missile balistique, revendiquées par les rebelles houthis, ont touché Abu Dhabi en l’espace d’une semaine. La première a fait trois morts, la deuxième a pu être interceptée. Il s’agit des premières attaques sur le sol des Emirats Arabes Unis, qui devraient continuer à maintenir les prix du pétrole élevés, indique un expert.

« Le ministère de la défense a annoncé lundi que ses forces de défense aérienne avaient intercepté et détruit deux missiles balistiques visant les Émirats arabes unis, tirés par la milice terroriste houthie », selon l’agence de presse des Emirats Arabes Unis. L’interception a eu lieu tôt lundi matin, et n’a pas fait de blessés. Des résidents, interrogés par CNBC, ont été réveillés par « des bruits de tonnerre ».

La bourse de Dubaï a aussi eu un réveil difficile suite à la nouvelle : l’indice principal, Dubai Financial Market General Index, a perdu 2%, et le géant de l’immobilier Emaar même 3,5%.

Le Département d’Etat (ministère des Affaires étrangères) a avertit ses ressortissants sur place de prendre « des mesures de précaution ».

Guerre avec le Yémen

La réponse militaire des Emirats a été immédiate. Juste après l’interception, un lanceur de missiles situé au Yémen a été détruit, comme le montre une vidéo partagée sur Twitter par le ministère de la Défense.

L’attaque a été revendiquée par les rebelles houthis, dont un porte-parole s’est exprimé sur la télévision houthie Al Masirah. Il a annoncé que les attaques, avec des missiles et des drones continueront aussi longtemps que les Emirats font la guerre contre le Yémen. Il encourage encore les compagnies étrangères à quitter le Yémen, qui « est devenu un endroit dangereux ».

En 2015, les rebelles houthis avaient renversé le gouvernement du Yémen, allié de l’Arabie Saoudite. Depuis, une coalition menée par les Saoudiens, dont les Emirats font partie, et les Houthis se font la guerre, et des dizaines de milliers de personnes souffrent de famine. Selon les Nations Unies, près de 380.000 personnes ont déjà perdu leur vie suite à cette guerre.

Les Houthis ont le soutien de l’Iran, qui leur envoie de l’armement. Selon des spécialistes de la région, les attaques importantes seraient commanditées par l’Iran, ou devraient au moins être approuvées par l’Iran.

Trois morts à Abu Dhabi, la semaine dernière

La semaine dernière, une attaque houthie avec ce que les Emirats ont identifié comme des drones et des missiles avait fait trois morts à Abu Dhabi, sur un chantier près de l’aéroport et une installation de stockage de carburant.

Cette attaque, et celle de lundi, sont les deux premières attaques houthies qui ont lieu sur le sol des Emirats. Elles sont aussi les premières à avoir une telle portée et une telle intensité.

Après l’attaque du 17 janvier, la coalition a mené des frappes sur la capitale du Yémen, Sanaa, faisant 20 morts. Le week-end passé, une autre frappe aurait fait 70 morts dans une prison au nord du pays, selon des images partagées par les Houthis. Un autre frappe a encore visé la ville portuaire de Hodeida et ses installations de télécommunication, qui a tué trois enfants et mené à un panne d’internet sur l’ensemble du Yémen.

Crainte pour le cours du pétrole

C’est que les Emirats sont un pays très important dans la production du pétrole. Avec quatre millions de barils par jour, ils sont le septième producteur mondial, et le troisième de l’OPEP. Les risques accrus d’attaques vont alors augmenter les craintes du marché de pétrole, estime Ed Bell, économiste pour la banque Emirates NBD.

« Les risques géopolitiques survenus ces dernières semaines en Europe de l’Est et au Moyen-Orient élargi susciteront des inquiétudes quant à la sécurité de l’approvisionnement énergétique à un moment où de nombreuses économies subissent déjà des coûts énergétiques élevés », explique-t-il à CNBC. « Bien qu’il n’y ait pas eu de perturbation matérielle de l’approvisionnement physique, les marchés vont probablement ajouter une prime de risque politique aux prix du pétrole à court terme, ce qui contribuera à maintenir les prix élevés ».

Dans la région, la situation est également tendue, notamment entre l’Iran et les pays de la coalition menée par les Saoudiens. Les Emirats n’ont pas accusé l’Iran d’ingérence lors de ces deux dernières attaques houthies. Dernièrement, des pourparlers de médiation sont en cours, entre l’Iran et l’Arabie Saoudite. « Il convient de rappeler que cette récente escalade intervient dans le cadre d’une politique étrangère plus conciliante à Abu Dhabi », analyse Taufiq Rahim expert en sécurité internationale auprès du think tank New America. « Cette posture sera alors testée dans les semaines à venir ».

L’Iran a, ce lundi, tenu une conférence de presse pour exprimer son soutien au « peuple yéménite opprimé ». Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Saeed Khatibzadeh, accuse l’Occident de profiter de la guerre au Yémen, notamment via la vente d’armes à la coalition. « Sans le soutien des Occidentaux, les derniers bombardements n’auraient pas eu lieu », ajoute-t-il.

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