Un peu moins de la moitié des Américains souhaitent que les sociétés Big Tech en général, et Facebook en particulier, soient démantelées. C’est ce qui ressort d’une série de sondages récents et d’enquêtes réalisés dans les médias américains. Au début du mois, Chris Hughes, l’un des cofondateurs de Facebook, avait appelé à la dissolution de la société.
«Le gouvernement doit rappeler à Mark (Zuckerberg) sa responsabilité. Pendant trop longtemps, les régulateurs se sont émerveillés de la croissance explosive de Facebook et ils ont négligé leur responsabilité de protéger les Américains et de maintenir la concurrence sur les marchés. (…) Nous, Américains, sommes une nation qui a pour tradition de maîtriser les monopoles, indépendamment des bonnes intentions que les dirigeants de ces entreprises peuvent avoir. Le pouvoir de Mark est inédit, et non américain. Il est temps de démanteler Facebook », a écrit Hughes.
En plus de son réseau social éponyme, Facebook est également propriétaire de l’application photo Instagram et des services de messagerie Whatsapp et Facebook Messenger.
« Zuckerberg est associé à la tête d’un empire dont le contenu, l’influence et le vote façonnent une communauté plus vaste que le christianisme, l’hémisphère Sud et l’Inde. » C’est ainsi que Scott Galloway, professeur de marketing à la Stern School of Business de l’Université de New York, décrit la puissance de Mark Zuckerberg dans son livre « The Four : The Hidden DNA of Amazon, Apple, Facebook et Google. »
Diviser Facebook ?
L’idée de scinder Facebook devient de plus en plus populaire. Plusieurs candidats à l’investiture présidentielle du Parti démocrate (DNC) se sont déjà exprimés dans ce sens. Parmi eux, Elizabeth Warren et Bernie Sanders.
Il ne s’agit pas seulement de Facebook. Galloway, avec de nombreux politiciens occidentaux, plaide en faveur de la division des GAFA. Un acronyme qui regroupe les géants technologiques Google, Amazon, Facebook et Apple.
Toutes ces entreprises sont des leaders mondiaux en intelligence artificielle (IA). Leurs activités génèrent des chiffres de vente supérieurs au PIB de nombreux pays. Leurs CEO sont plus puissants que beaucoup d’hommes politiques.
Le Danemark a compris cela depuis un certain temps et a même un ambassadeur numérique. Il est responsable de la canalisation optimale des relations du pays avec les principaux représentants du secteur en ligne. En effet, ces entreprises peuvent exercer autant d’influence sur le Danemark que d’autres pays.
« Si des entreprises semblent avoir plus de pouvoir qu’un grand nombre de pays, les gouvernements doivent s’adapter à cette nouvelle situation « , a souligné Anders Samuelsen, ministre danois des Affaires étrangères.
Le coup d’Etat numérique invisible de Big Tech
Une nouvelle situation se présente en effet. Selon Larry Page, cofondateur de Google, des entreprises comme la sienne remplaceront bientôt les politiciens. « Parce que l’IA comprend mieux les défis de l’avenir que nos décideurs politiques. »
Nous sommes confrontés à un coup d’Etat numérique invisible des GAFA. Ils manipulent les électeurs grâce à la meilleure compréhension de nos fonctions cérébrales par ces entreprises.
Eric Schmidt, l’ancien président de Google, l’a dit encore plus clairement dans le Wall Street Journal : « La plupart des gens ne veulent pas que Google réponde à leurs questions, ils veulent que Google leur dise quoi faire. »
Celui qui contrôle l’Intelligence Artificielle contrôle donc l’humanité, car l’IA signifie le pouvoir. Pour l’instant, ce pouvoir est partagé par deux pays : les États-Unis (GAFA) et la Chine (BATX). Ce dernier acronyme représente les sociétés Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi. Mais c’est là que réside le danger.
L’intelligence artificielle devient de plus en plus intelligente à mesure qu’elle est alimentée de toujours plus de données. Et les Chinois génèrent deux fois plus de données chaque jour que les États-Unis et l’Europe réunis. C’est ainsi que Xi Jinping se bâtit une avance effrayante.
Démanteler Big Tech = apprendre le mandarin
Dans un article d’opinion publié dans le magazine français L’Express, le chirurgien français Laurent Alexandre, installé en Belgique, décrit le vrai problème posé par cette situation :
«Logiquement, l’IA panique les autorités antimonopole, qui ne savent pas comment réglementer les services qu’elle produit, contrairement aux anciens géants industriels (…). De surcroît, les GAFA et les BATX vont aider la Chine et les Etats-Unis à se partager le monde, comme l’Espagne et le Portugal l’Afrique et l’Amérique du Sud au 16ème siècle. (…)
Puisque l’IA est le coeur de la puissance militaire au 21ème siècle, l’Europe, qui a perdu la guerre technologique, aura besoin d’être protégée et doit accepter la realpolitik : notre cybersécurité ne peut être assurée que par l’OTAN et les GAFA. (…)
Et le Pentagone s’opposera au démantèlement des géants de l’IA, qui donnerait à la Chine le leadership mondial. Si l’Occident cassait en morceaux les GAFA, au moment où la Chine soutient énergiquement ses champions en IA pour devenir la première puissance mondiale, il serait vraiment urgent d’apprendre le mandarin à nos enfants ».