De 87 à 99% de « oui » : après les référendums, Poutine s’apprête à annexer un territoire grand comme le Portugal

Ça ne sera une surprise pour personne : les référendums organisés dans les régions occupées d’Ukraine, censés interroger la population sur son désir de rejoindre la Russie et évidemment pilotés depuis Moscou, ont tous conclu à une victoire écrasante du « Oui ». L’annexion est toute tracée, pour Moscou. Mais c’est aussi le chemin d’un isolement complet, et le chantage nucléaire ne semble pas ébranler la détermination des Ukrainiens.

Les résultats complets des votes dans les quatre provinces varient de 87 % à 99,2 % en faveur de l’adhésion à la Russie, selon les responsables désignés par le Kremlin. Le chef de la chambre haute du parlement russe a déclaré que l’assemblée pourrait envisager l’annexion le 4 octobre. « Les résultats sont clairs. Bienvenue à la maison, en Russie », a déclaré sur Telegram Dmitri Medvedev, ancien président, vice-président du Conseil de sécurité de la Russie et ferme allié du président Vladimir Poutine.

Parodie de démocratie

Évidemment, dans le reste du monde et à commencer par l’Ukraine, on ne voit pas les choses de la même manière : « Cette farce dans les territoires occupés ne peut même pas être appelée une imitation de référendum », a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans une allocution mardi en fin de journée. Tout ce qui nous provient des zones concernées lui donne raison : un vote organisé à la va-vite, sans véritable isoloir, parfois en présence de soldats ou de mercenaires en armes. Moscou n’a même pas pris la peine de rendre crédible cette parodie de démocratie.

Les États-Unis présenteront une résolution au Conseil de sécurité des Nations unies appelant les États membres à ne reconnaître aucun changement en Ukraine et obligeant la Russie à retirer ses troupes, a déclaré l’envoyée américaine Linda Thomas-Greenfield. « Les référendums fictifs de la Russie, s’ils sont acceptés, ouvriront une boîte de Pandore que nous ne pourrons pas fermer », a-t-elle déclaré lors d’une réunion du Conseil, signale Euractiv.

Isolement grandissant

Jusqu’ici, la communauté mondiale semble exceptionnellement unanime : même des alliés fervents de la Russie, comme la Serbie ou la Chine, et des États attentistes tels que l’Inde, ont condamné la tenue de ces référendums. La Russie a la possibilité d’opposer son veto à une résolution du Conseil de sécurité condamnant ces annexions, mais Mme Thomas-Greenfield a déclaré que cela inciterait les États-Unis à porter la question devant l’Assemblée générale des Nations unies.

Mais les Russes n’en démordent pas, comme sourds et aveugles aux conséquences que pourrait avoir l’annexion d’un territoire d’une taille équivalente à celle du Portugal ou de la Bulgarie à son propre territoire, et ce d’une manière unilatérale à peine saupoudrée de ces référendums de prétexte. L’ambassadeur russe auprès des Nations unies, Vassily Nebenzia, a déclaré à la réunion que les référendums avaient été menés « de manière transparente et dans le respect des normes électorales » : « Ce processus va se poursuivre si Kiev ne reconnaît pas ses erreurs et ses fautes stratégiques et ne commence pas à se laisser guider par les intérêts de son propre peuple plutôt que d’exécuter aveuglément la volonté de ceux qui jouent avec eux. »

De nouvelles armes pour Kiev

L’enjeu pour Poutine est bien sûr de pouvoir considérer toute nouvelle avance ukrainienne dans ces territoires comme une agression envers la Russie elle-même. Mais cela revient à s’isoler encore plus qu’auparavant sur la scène internationale, et sans pour autant ébranler la détermination du gouvernement ukrainien, malgré le chantage nucléaire sous-jacent. Mykhailo Podolyak, un conseiller de Zelensky, a déclaré à Reuters que Kiev ne se laisserait pas influencer et poursuivrait ses projets de reprise de tous les territoires occupés par les forces d’invasion russes. Il a déclaré que les Ukrainiens ayant participé à l’organisation des référendums seraient accusés de trahison et encourraient au moins cinq ans de prison. Les Ukrainiens qui ont été contraints de voter ne seront pas poursuivis.

Du côté de l’Occident, c’est aussi un signal clair que l’aide à l’Ukraine doit continuer à arriver : un nouveau programme d’envoi de matériel militaire est en tain d’être mis sur pied, et comprendra des systèmes de lancement HIMARS, des munitions, divers types de systèmes de contre-drones et de systèmes radars, ainsi que des pièces de rechange et un soutien technique.

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