La croissance du PIB de l’Inde explose, mais les emplois qualifiés ne suivent pas dans un pays encore très rural

La croissance du PIB de l’Inde explose, mais les emplois qualifiés ne suivent pas dans un pays encore très rural
Une population indienne au potentiel énorme, mais qui reste encore largement rurale et dépendante de l’agriculture. Photographer: Dhiraj Signh/Bloomberg via Getty Images

Alors qu’elle occupe actuellement la cinquième place du classement des plus grandes économies mondiales, l’Inde est bien partie pour décrocher la deuxième place. Un cap qu’elle atteindrait vers 2075, pour se placer juste derrière la Chine et devant les États-Unis, selon les prévisions de Goldman Sachs. Que l’économie indienne grimpe, c’est un fait. Reste toutefois à voir comment elle fait évoluer la société de la « plus grande démocratie du monde ».

Les chiffres : l’Inde mise sur un taux de croissance annuel du produit intérieur brut (PIB) d’environ 8 % pour les 25 prochaines années. Selon un sondage réalisé par Reuters auprès de 53 économistes, ça n’est toutefois pas ce vers quoi elle se dirige en 2023, même si la performance reste impressionnante. L’économie indienne devrait croître de 6,1 % au cours de cette année, alors que d’autres grandes régions économiques frôlent la récession, comme les États-Unis, et que d’autres sont en plein de dans, comme l’Union européenne.

  • Le climat reste favorable à la croissance indienne, en particulier alors que la Chine traverse quelques difficultés, et que de nombreuses grandes firmes mondialisées ne veulent plus tout miser sur l’Empire du Milieu. Une politique d’entreprise qualifiée de « China Plus One » qui consiste à bâtir de nouvelles unités de production ailleurs qu’en République populaire, là où c’est moins cher et surtout plus sûr, au vu de la méfiance croissante envers une Chine agressive.
  • Le premier pays à en bénéficier fut le Vietnam, mais ce flux vers l’autre pays communiste d’Asie semble se tarir au profit de l’Inde. New Delhi a d’ailleurs lancé un programme nommé Production-Linked Incentive (PLI), avec des milliards de roupies alloués pour inciter les fabricants étrangers à installer des usines en Inde en 2023-2024.
  • Un plan de croissance toutefois conditionné à la capacité de l’Inde à proposer une main-d’œuvre qualifiée en nombre suffisant. Et c’est là que le bât blesse, selon les économistes interrogés par Reuters : malgré son nombre record de diplômés – dont beaucoup émigrent – l’Inde peine à convertir sa croissance économique en moteur pour éduquer et qualifier son immense population rurale.

« Si nous voulons réaliser ce potentiel de croissance de 8 % au cours de cette décennie […], le plus grand défi auquel sont confrontés les décideurs politiques est de réaffecter la main-d’œuvre excédentaire de l’agriculture à des secteurs plus productifs offrant des emplois rémunérateurs. Si l’élan réformateur de l’Inde n’est pas au rendez-vous, c’est un tableau moins enthousiasmant qui se profile à l’horizon. »

Dhiraj Nim, économiste chez ANZ Research, cité par Reuters

La main-d’œuvre, un obstacle conséquent

La demande est là, mais l’Inde peine encore à offrir à l’économie mondialisée des travailleurs en nombre suffisant, et avec des compétences compatibles avec des emplois de cols bleus modernes. Un problème qui, par ailleurs, frappe aussi la Chine, qui croule sous les surdiplômés, mais manque de bras dans ses usines, et voit en parallèle le chômage des jeunes augmenter.

L’Inde – et le monde – est de toute évidence en plein dans un tournant économique. Reste à bien le négocier, car la situation n’avait jamais été aussi favorable pour New Delhi – demande mondiale pour de nouveaux lieux de production, difficultés chinoises -, mais une sortie de route reste possible.

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