Bill Gates: « Le développement d’ordinateurs intelligents est bien plus important que le métavers ou le Web3 »

Dans une longue interview accordée à Wired, Bill Gates, très sarcastique, est revenu sur la pandémie et ses conséquences sur un éventuel recul de la science et de la raison dans le débat. Il a conclu l’interview sur un tout autre sujet en donnant son avis sur la technologie qui influencera réellement notre futur.

Bill Gates est assez fan du métavers, qu’il trouve « plutôt cool ». Cette technologie peut rendre des réunions à distance, plus concrètes, « en face à face avec une immersion 3D ». Mais ça n’ira pas beaucoup plus loin selon lui: « Ce qui compte, c’est que les ordinateurs deviennent plus intelligents. C’est plus important que l’immersion 3D ou des lunettes virtuelles ».

« Aujourd’hui, l’ordinateur n’est pas encore très intelligent. Il ne connaît pas vos activités, vos priorités. Vous ne lui feriez même pas confiance pour trier vos mails et vos messages en fonction de vos préférences. Donc, la chose la plus importante qui va se produire dans le logiciel est d’avoir des agents vraiment intelligents. C’est bien plus important que le métavers, bien plus important que le Web3 ».

Bill Gates a toutefois une relation à la fois fascinée et inquiète vis-à-vis de l’intelligence artificielle. Voici ce qu’en disait le co-fondateur dans un chat sur le site Reddit, en 2015: « Je suis dans le camp de ceux qui s’inquiètent du développement d’une super intelligence. D’abord, les machines réaliseront pour nous de nombreuses tâches sans être très intelligentes. Cela devrait s’avérer positif si nous les gérons bien. Mais, quelques décennies plus tard, leur intelligence sera suffisamment développée pour devenir un sujet d’inquiétude. Je rejoins Elon Musk et quelques autres et ne comprend pas pourquoi certaines personnes ne semblent pas s’en inquiéter. »

Mais d’un autre côté, Bill Gates investit largement dans l’intelligence artificielle: « Les progrès seront plus nombreux dans les 30 prochaines années que jamais. Même dans les dix prochaines années, des problèmes comme la vision, la compréhension de la parole et la traduction seront très bonnes. Les tâches mécaniques des robots, comme la cueillette des fruits ou le déplacement d’un patient dans un hôpital, seront résolues. Lorsque les ordinateurs et les robots auront atteint un niveau de capacité tel qu’il leur sera facile de voir et de se déplacer, ils seront très largement utilisés. »

« Tu es naïf »

Dans l’entretien accordé à Wired, à l’occasion de la sortie de son livre Comment prévenir la prochaine pandémie, Bill Gates est interpellé par le journaliste. Ce dernier lui fait remarquer à quel point la science et la raison ont été attaquées de front durant la pandémie. Les explications des épidémiologistes ont divisé la population, c’est vrai en Europe comme aux États-Unis. Bill Gates, qui avait largement prédit notre impréparation à l’arrivée d’une telle pandémie dans une conférence TED de 2015, a lui-même été largement pris à parti, faisant l’objet de nombreuses théories conspirationnistes farfelues comme de menaces de mort. « Assiste-t-on à une marche arrière de la science », demande le journaliste ?

« Je pense que tu es une personne naïve. Quelle était la popularité de la théorie de l’évolution avant la pandémie ? Moins de 50% », lui répond Gates. L’université du Michigan a estimé que l’acceptation de la théorie de l’évolution est devenue l’opinion majoritaire en 2016 aux États-Unis. Bill Gates n’est donc pas très loin de la vérité.

« Mais les gens ne descendaient pas dans la rue pour contester des biologistes », lui rétorque le journaliste. Gates répond laconiquement : « Nous ne sommes pas une société du débat scientifique ».

Plus largement, Bill Gates n’est pas de ceux qui pensent « que c’était mieux avant », une sorte d’âge d’or de tous les possibles, dans lequel le co-fondateur de Miscrosoft et baby-boomer a d’ailleurs fait largement sa grande fortune.

« Auriez-vous voulu être gay il y a 40 ans ? Préférez-vous être une femme à l’époque ou maintenant ? »

« L’idée selon laquelle on vit un retour en arrière, que les années 50 étaient peut-être mieux, c’est une perte totale de perspective. »

« Les rois se sont toujours bien débrouillés. Les ducs aussi. Alors peut-être, récemment, pour les comtes, c’est devenu un peu difficile. »

Bill Gates est toutefois bien conscient que ce qui a changé, c’est la défiance vis-à-vis de l’autorité et des institutions. La plus grande menace actuelle, selon lui, qui est largement imputable aux réseaux sociaux, expliquait-il dans ses réflexions de fin d’année.

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