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L’initiative Belt and Road, 10 ans après : un grand projet qui s’essouffle, mais qui a fait de la Chine le bailleur de fonds du monde

L’initiative Belt and Road, 10 ans après : un grand projet qui s’essouffle, mais qui a fait de la Chine le bailleur de fonds du monde
Xi Jinping avait lancé ce « projet du siècle » en 2013. | Getty / Fotojet.

La Chine construit moins dans les autres pays, faute de fonds. Mais l’endettement de ses partenaires est vu comme l’opportunité d’effectuer un grand pivot économique. Pourquoi bâtir, quand on peut prêter ?

Pourquoi est-ce important ?

En 2013, le président chinois - c'était déjà Xi Jinping - lançait en grande pompe l'initiative Belt and Road. Plus connue en Occident sous le surnom de "nouvelle Route de la Soie", il s'agit d'une série de projets d'infrastructure de grande envergure, destinés à dynamiser la présence de la Chine et son économie à travers 150 pays, majoritairement en Eurasie.

962 milliards de dollars

10 ans après : le « projet du siècle » de Xi Jinping marque le pas. La Chine a largement joué les bailleurs de fonds pour financer ces immenses projets de routes et de ponts, mais les remboursements ne suivent pas.

  • Le projet Belt and Road, pris dans son ensemble, représente un budget de 962 milliards de dollars, dont 573 milliards de contrats de construction et 389 milliards d’investissements non financiers, selon un rapport de l’université Fudan de Shanghai.
  • De l’argent que les pays partenaires – plutôt pauvres, pour beaucoup – ont emprunté à la Chine afin de mener les grands chantiers nécessaires au projet. Mais le remboursement de ces dettes ne suit pas. Au risque de nourrir une spirale de la dette.

« Pékin s’est lancé dans une frénésie de prêts, accordant des milliers de prêts d’une valeur de presque mille milliards [de dollars] pour des projets d’infrastructure de grande envergure répartis dans 150 pays. Aujourd’hui, de nombreux emprunteurs éprouvent des difficultés à rembourser leurs dettes à Pékin pour ces projets d’infrastructure. En 2010, seuls 5% du portefeuille de prêts à l’étranger de la Chine soutenaient des emprunteurs en difficulté financière. Aujourd’hui, ce chiffre s’élève à 60% »

Bradley Parks, directeur exécutif du groupe de recherche AidData, interrogé par CNBC

Les partenaires de Pékin deviennent ses débiteurs

Les projets d’infrastructure s’essouflent, d’abord par le passage du Covid-19, puis à cause du ralentissement économique de la Chine elle-même, qui peine à redémarrer. Vient maintenant s’ajouter le problème de la dette. Mais Pékin semble avoir opéré à un grand rock dans sa stratégie : si le béton et l’acier ne suffisent pas à assurer sa prééminence économique, alors ce seront les cordons de la bourse.

  • En Chine, l’aide d’urgence à des pays en difficulté est devenue un secteur économique en soi. « Nous avons toujours fait tout notre possible pour aider les pays en développement à alléger le fardeau de leur dette », euphémise le porte-parole de l’ambassade de Chine à Singapour auprès du média économique américain.
  • Mais Pékin a lâché un total de 240 milliards de dollars en guise de prêts de sauvetage à des pays en développement depuis 2008, rapportait Reuters en mars dernier, dont 104 milliards rien qu’entre 2019 et la fin de 2021.
  • La Chine se présente en fait comme une alternative au FMI – auquel elle participe pourtant – dans le domaine de l’aide d’urgence à des États en détresse financière. Sauf que l’or du dragon n’est pas gratuit : elle pratique des taux d’intérêt léonins de 5%, là où le FMI ne demande que 2% environ pour les opérations de prêts non concessionnels au cours des dix dernières années.
  • En outre, la Chine s’en défend, mais cet argent peut avoir une influence sur les décisions politiques des pays concernés. Ces dernières années, plusieurs nations pauvres ont finalement décidé de ne plus reconnaître Taïwan comme Chine légitime, mais bien le gouvernement de Pékin. Le Honduras est le dernier en date.
  • La Chine opère ainsi une transition de plus en plus marquée de l’économie de production et d’exportation – qui nécessite des infrastructures – à une économie basée sur les flux financiers. Reste à voir si cette stratégie est viable, car jouer les bailleurs de fonds reste un jeu dangereux.
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