La Belgique compte 16 nouvelles étoiles Michelin, mais ce classement est-il encore objectif ?

La nouvelle liste des restaurants étoilés en Belgique est parue ce lundi. 16 nouvelles étoiles et une nouvelle deuxième étoile. C’est la première version numérique du fameux guide. Mais le modèle économique derrière cette nouvelle formule pose question : est-il un parti pris ?

Dans l’actu : les nouvelles étoiles du guide Michelin pour la Belgique et le Luxembourg, annoncés ce lundi lors d’une cérémonie à Mons.

  • 16 restaurants gagnent une première étoile. Un seul reçoit sa deuxième étoile (le Bozar à Bruxelles). Pas de nouvelle troisième étoile, comme l’année passée, mais aucune troisième étoile n’est retirée : il y en a toujours trois en Belgique. « Boury » à Roulers, « Hof van Cleve » à Kruishoutem, Flandre-Orientale) et « Zilte » à Anvers.
    • La Belgique et le Luxembourg comptent 149 établissements étoilés.
  • À cela il faut ajouter les étoiles vertes, une distinction pour une « gastronomie responsable et durable ». Une seule étoile verte avait été donnée l’année passée ; cette année il y en a 15.
  • Les distinctions « Bib Gourmand » récompensent les restaurants qui proposent « un très bon rapport qualité-prix », sous forme d’un menu d’environ 45 euros. Elles ont également été annoncées ce lundi : il y a 22 nouveaux noms. Belgique et Luxembourg en comptent désormais 147.

Un parti-pris ?

L’essentiel : le (nouveau) business model derrière le fameux guide.

  • Autre nouveauté en 2023 : c’est le premier guide en version numérique (pour la Belgique). C’est-à-dire que le fameux guide n’est plus vendu sous sa forme de livre, avec sa couverture rouge emblématique, mais les commentaires sur les restaurants sont disponibles gratuitement sur le site de Michelin ou via l’application.
  • Le hic : on peut également réserver via les outils de Michelin, et le groupe touche une commission sur la réservation, rapporte le site De rijkste Belgen, spécialisé sur les questions d’argent et des structures pyramidales des entreprises.
  • Ainsi, l’intérêt du Guide Michelin aurait changé. Avant, il s’agissait d’un livre objectif, recensant des critiques, permettant à un lecteur de se faire une idée. Le lecteur devait acheter le livre, bien entendu, mais le livre se vendait aussi pour découvrir quels restaurants se faisaient critiquer par le guide.
  • Maintenant, « Michelin va gagner de l’argent en promouvant les restaurants », selon le site. Le guide n’aurait donc plus d’intérêt à émettre des critiques négatives – car sinon personne ne réserverait via Michelin, qui ne toucherait pas sa commission. « Les critiques objectives deviendront donc de plus en plus rares. Michelin soutiendra son propre marché grâce au marketing numérique », peut-on lire.
    • De rijkste Belgen s’attend ainsi à ce qu’il « pleuve » des étoiles, dans le futur.

Le détail : une question de prestige.

  • En plus de 120 ans d’existence, le Guide Michelin, créé comme un gadget offert avec l’achat de pneus, est devenu synonyme de prestige dans le monde de la restauration. Obtenir ces étoiles reste une récompense pour les restaurateurs et le classement fascine toujours, comme le montre l’importante couverture médiatique autour de ces nouvelles étoiles, tous les ans. Ou comme l’a montré le cas du « Comme chez soi », un restaurant bruxellois qui a perdu sa deuxième étoile l’année dernière : un fait qui avait fait beaucoup de bruit dans la presse.
  • Mais force est de constater que le Guide n’est plus le seul faiseur d’opinion en la matière. Les influenceurs des réseaux sociaux et les consommateurs qui commentent les restaurants sur les plateformes dédiées distribuent aussi des étoiles et peuvent faire ou détruire la réputation d’un établissement. Les concours de cuisine télévisés sont aussi des faiseurs de roi dans le domaine.
    • Reste à voir si les traditionnels guides comme le Michelin peuvent garder leur statut de prestige, et surtout leur pertinence. Cela dans un monde où les habitudes de consommation changent rapidement et où le bouche-à-oreille et l’avis de ces influenceurs et commentateurs anonymes, presque vu comme des « proches », est de plus en plus omnipotent.
    • Bref, dans ce contexte, changer une identité respectée de critique pour devenir un marketeur peut s’avérer périlleux.
Plus