La démission inéluctable de Sarah Schlitz : le coup de grâce est venu de l’intérieur de la majorité

La position de la secrétaire d’État à l’Égalité des chances et des genres était devenue intenable.

Dans l’actu : Sarah Schlitz (Ecolo) a annoncé sa démission ce matin sur La Première.

  • La secrétaire d’État était attendue en commission ce mercredi pour une nouvelle salve de questions, puis le lendemain à la Chambre, où elle aurait dû affronter une motion de défiance.
  • Sarah Schlitz a préféré s’éviter (et à son parti) cette humiliation, face au manque de confiance des partis de la majorité.
  •  « C’est ma décision, je n’en veux à personne », a-t-elle déclaré. « La N-VA a fait de moi un symbole. En démissionnant, je leur enlève ce symbole ».

Les détails : ce matin, le coup de grâce est venu de la presse (et de la majorité).

  • De nouvelles révélations de la Dernière Heure montraient que le nom stylisé de la secrétaire d’État figurait déjà sur des flyers et le site de l’association BruZelle de septembre à novembre dernier, avant d’être subitement retiré. Une association qui faisait partie de l’appel à projets « Tant qu’il le faudra ».
  • La question était de savoir qui avait fait retirer ce logo. Si c’était la secrétaire d’État, c’est qu’elle était déjà au courant que cette pratique était frauduleuse, ce qui aurait mis en miettes sa défense. Le cabinet de Sarah Schitz s’en est défendu, mais il est revenu à l’oreille du journal que cette pratique énervait les autres partis de la majorité bien avant le récent scandale.
  • L’irritation face aux positions parfois un peu extrêmes du cabinet de la secrétaire d’Etat, qualifiée de « woke » par l’aile droite de Vivaldi, ne date pas d’hier. Ce n’est pas un hasard si le MR et Ecolo se sont souvent opposés par rapport aux décisions de Schlitz et de son équipe en cours de législature.
  • Mais c’est surtout chez les socialistes que l’agacement est monté en flèche lorsqu’il s’est avéré que Schlitz était finalement peu regardante sur le plan déontologique, avec l’utilisation intensive de son logo personnel. « Le parti qui prétend être plus blanc que blanc se met lui-même à dire des contrevérités lorsqu’il doit comparaître devant une commission. Devrions-nous laisser passer cela ? », s’est interrogé un dirigeant socialiste cette semaine.
  • Le MR, puis le PS et enfin Vooruit, dimanche dernier, lors de l’émission dominicale flamande De Zevenda Dag, ont fini par lâcher Schlitz. Ce sont ces mêmes partis qui avaient donné à la secrétaire d’État une semaine « de sursis ».
  • Ce qui transparaissait le plus dans l’article de la DH est que son contenu avait sans doute été divulgué par les partis de la majorité, qui étaient visiblement très bien informés, et agacés depuis longtemps. Une nouvelle bombe qui ne laissait plus qu’une seule option : la démission.

Une série de couacs

  • Le « logo-gate » aurait pu être une faute pardonnée. Car la secrétaire d’État a d’abord fait amende honorable, en s’excusant devant la commission de contrôle des dépenses électorales, puis devant le parlement.
  • Sauf qu’entre les deux, sa version a changé. Pour le député de l’opposition Sander Loones (N-VA), cela ne pouvait se traduire que par une seule issue : la démission.
  • Pour ne rien arranger, une campagne visant à décrédibiliser et diaboliser le député et son parti, qualifiés d’extrême droite, avec des références au nazisme, est partagée sur les réseaux sociaux et soutenue par Sarah Schiltz qui poste en commentaire : « Merci pour le soutien, on lâche rien ».
  • La scène en 4 actes se termine hier par les plates excuses sur Twitter de Sarah Schlitz à la demande du Premier ministre Alexander De Croo.
  • Un dérapage politique à montrer dans toutes les écoles de communication comme exemple à ne pas reproduire. La militante devenue secrétaire d’État à la surprise générale redeviendra militante.

Et maintenant ? Pour la Vivaldi, c’est une affaire douloureuse. Pour Ecolo, un supplice.

  • Car l’opposition ne lâche pas sa proie : la N-VA et le Vlaams Belang ont immédiatement suggéré de ne pas remplacer Schlitz, un an avant les élections. Cette idée a également été distilée hier par Het Laatste Nieuws dans son édito, avec une subtile référence à Alexander De Croo, qui prônait autrefois la création d’un gouvernement avec seulement dix ministres.
  • Après tout, les budgets de la secrétaire d’État à l’égalité des chances sont largement épuisés, il ne reste plus grand-chose sur l’étagère non plus : en trois ans, d’ailleurs, Schlitz n’a pris aucune initiative législative.
  • Pour la Vivaldi, c’est douloureux : l’équipe de départ, qui portait le sceau d’un vent de fraicheur et de l’égalité de genre, n’est plus ce qu’elle était. Exit Eva De Bleeker (Open VLD), Meryame Kitir (Vooruit) et maintenant Sarah Schlitz (Ecolo).
  • De son côté, Sander Loones (N-VA) sort triomphant : c’est déjà son deuxième scalp au sein de la Vivaldi, après la secrétaire d’Etat au budget.
  • Ecolo panse ses plaies : tout le monde aura remarqué la résistance du parti, Nollet l’ayant personnellement soutenue. Ce dernier a donc dû, bien malgré lui, se débarrasser de sa membre du gouvernement. Cela doit faire mal.
  • En même temps, il est tout à fait prévisible et logique que les Verts francophones veuillent capitaliser sur le soldat Schlitz : martyre, injustement tuée pour sa lutte contre l'(extrême)-droite flamande.
  • C’est d’ailleurs cette voie qu’a semblé aussi emprunter l’intéressé en conférence de presse : « La gouvernance fait partie de l’ADN d’Ecolo. Nous sommes plus durs avec nous-mêmes qu’envers les autres, c’est normal. Ma démission ouvre la voie pour élever les standards en politique, y compris pour davantage lutter contre les violences sexistes et sexuelles en politique”. Pas de place pour les questions ni pour les réponses. Sarah Schlitz a maintenu sa ligne de défense et se présente toujours en victime.
Plus