L’Arabie saoudite coupe dans sa production de pétrole, sauf pour son partenaire chinois

Riyad et Pékin sont-ils les nouveaux meilleurs amis du monde ? L’Arabie saoudite nous donne en tout cas une belle illustration d’un traitement de faveur, alors que le reste de la planète souffre des conséquences de sa diminution de production de pétrole. Pendant ce temps, la demande devrait atteindre de nouveaux records cette année.

Dans l’actu : Malgré une baisse volontaire de sa production, l’Arabie saoudite va inonder la Chine de pétrole, avec une hausse de 40% de ses livraisons.

  • L’Arabie saoudite va ainsi renforcer son partenariat énergétique avec la Chine en lui expédiant 52 millions de barils de pétrole en septembre, d’après un rapport de Bloomberg qui s’appuie sur les témoignages de traders du secteur. Une fameuse augmentation par rapport aux 37 millions de barils annoncés pour août.
  • Riyad renvoie l’ascenseur à Pékin, puisqu’en mars dernier, Aramco, le géant pétrolier saoudien, s’est offert une part de 10 dans la méga-raffinerie chinoise Rongsheng Petrochemical, pour la somme de 24,6 milliards de yuans (3,6 milliards de dollars). Un investissement qui lui permet de consolider sa position sur le marché chinois.
    • En retour, Aramco avait accepté de vendre à Rongsheng du pétrole saoudien dans le cadre de l’accord. Comme les bons comptes font les bons amis, voici que le royaume du Golfe tient sa promesse. Une bonne nouvelle pour la Chine, dont la demande en pétrole a été plus solide que prévu, atteignant de nouveaux sommets malgré des préoccupations persistantes concernant la santé de son économie.
    • La Chine n’est pas la seule à profiter des engagements d’Aramco : la firme saoudienne a assuré qu’elle respecterait ses contrats avec la Corée du Sud, Taïwan, la Thaïlande et la Chine en septembre malgré ses coupes de production, d’après Bloomberg.

Vers un record de la demande de pétrole

Zoom-arrière : Une stratégie bien huilée (sans mauvais jeu de mots) de Riyad pour faire flamber les cours du brut et ainsi remplir les caisses du royaume.

  • Cet échange de bons procédés avec la Chine survient alors que l’Arabie saoudite vient d’annoncer le maintien de ses coupes de production de pétrole. Le pays a diminué sa production de 10%, soit 1 million de barils par jour, depuis avril.
  • Son objectif avec cette réduction drastique : faire grimper les prix toujours plus haut. C’est plutôt réussi, on doit le reconnaître. Le pétrole flambe sur les marchés, atteignant des sommets inédits depuis trois mois.
    • Le Brent affiche une envolée de 14%, dépassant les 86 dollars le baril.
    • De son côté, le West Texas Intermediate a bondi de 18% depuis début juillet, frôlant les 83 dollars.
    • Chez nous, ces variations des prix des produits pétroliers se font sentir directement à la pompe.
      • Depuis ce vendredi, vous payez 0,048 euro plus cher pour le litre de diesel (B7), dont le prix maximum est passé à 1,9530 euro le litre.
      • Le gasoil de chauffage (50S) connait aussi une hausse à 1,0286 euro le litre (+0,0321 depuis jeudi) pour les commandes de plus de 2.000 litres. 
      • Le prix gasoil de chauffage pour les commandes de moins de 2.000 litres baisse légèrement, à 1,0662 euro le litre.

À suivre : Alors que la demande mondiale de pétrole a atteint un record de 103 millions de barils par jour en juin et août, elle pourrait encore connaître un nouveau pic ce mois-ci, note l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) dans un rapport.

  • « Pour l’année, la demande mondiale de pétrole semble être en bonne voie pour augmenter de 2,2 mb/j à 102,2 mb/j, son niveau annuel le plus élevé jamais enregistré« , écrit l’AIE.
  • Dans le détail, si les objectifs actuels de l’OPEP+ sont maintenus, les stocks de pétrole pourraient diminuer de 2,2 mb/j au troisième trimestre 2023 et de 1,2 mb/j au quatrième trimestre. La croissance devrait ensuite ralentir pour atteindre une hausse de 1 mb/j en 2024.
  • Ce qui pourrait (et devrait, même) se convertir par une nouvelle hausse des prix. On entend déjà l’Arabie saoudite se frotter les mains.

Trouver le juste milieu

À noter : À force de faire monter les enchères, Ryad pourrait bien se brûler les ailes. Une réduction excessive de la production de pétrole comporte plusieurs risques bien réels :

  • Le pays parie forcément sur des prix élevés du pétrole à l’international pour garder ses revenus, essentiels à son économie. C’est risqué puisque les prix du pétrole peuvent changer selon la situation géopolitique mondiale, elle-même imprévisible. Sans compter qu’un prix trop élevé pourrait finir par freiner la demande.
  • En vendant moins de pétrole brut à l’étranger, l’Arabie saoudite pourrait alors souffrir du retour de flamme et gagner moins d’argent, jusqu’à peiner pour financer ses projets et ses programmes.
  • Nous sommes toujours dans le conditionnel, mais en perdant des revenus à cause du pétrole, le pays creuse son déficit et doit soit dépenser moins, soit taxer plus, soit s’endetter plus. Il laisse ce faisant la porte grande ouverte à la concurrence des autres producteurs de pétrole, qui n’hésiteront pas à sauter sur l’occasion pour combler le trou.
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