La volte-face d’Erdogan : la banque centrale turque relève ses taux d’intérêt à 15%

Comme prévu, la banque centrale turque a fortement relevé ses taux d’intérêt pour freiner l’inflation élevée. La banque centrale change complètement son fusil d’épaule. Jusqu’à alors, Erdogan misait sur la baisse des taux d’intérêt pour juguler une inflation record de 40%, soit l’exact contraire de la politique monétaire des banques centrales dans le monde.

Pourquoi est-ce important ?

Dans le passé, Erdogan était convaincu - contrairement au consensus économique - que des taux d'intérêt élevés créent plus d'inflation. C'est dans cette optique qu'il a baissé les taux d'intérêt pour faire baisser les prix. Aujourd'hui, il est en train de revoir sa vision de l'économie.

Dans l’actualité : Le taux d’intérêt de la Turquie a été revu à la hausse, passant de 8,5% à 15%.

« Les indicateurs récents indiquent une augmentation des pressions inflationnistes sous-jacentes dans notre pays », a indiqué la banque centrale dans un communiqué.

  • La forte demande intérieure de biens et de services, les pressions élevées sur les coûts et les augmentations soutenues des prix des services sont les principaux moteurs de l’inflation. Elle s’élevait à 39,6% en mai.
  • En outre, la livre turque a perdu plus de 80% de sa valeur ces dernières années.
  • La tendance a commencé à s’inverser, en partie en raison de la nomination de Hafize Gaye Erkan, un faucon, au poste de gouverneur de la banque centrale turque.
  • Les économistes s’attendaient à une augmentation plus importante, mais il s’agit de la première augmentation des taux d’intérêt depuis mars 2021.
    • Les économistes sont en effet divisés sur l’ampleur de la hausse des taux d’intérêt nécessaire. La banque d’investissement Morgan Stanley estime qu’une augmentation immédiate de 1.150 points de base est nécessaire. En d’autres termes, il s’agit de porter les taux d’intérêt à 20% d’un seul coup.
    • Sa consœur Goldman Sachs renchérit. Elle s’attend à ce que les taux d’intérêt augmentent jusqu’à 40%.
  • Erdogan rompt ainsi avec son propre point de vue économique, selon lequel des taux d’intérêt bas sont plus efficaces pour lutter contre l’inflation. La Turquie suit à nouveau la doctrine conventionnelle, dans l’espoir de remettre l’économie sur les rails.

La volte-face d’Erdogan

  • Lors de sa campagne, Erdogan a promis de s’en tenir à cette politique de faibles taux d’intérêt. Mais moins d’un mois après sa victoire, son équipe économique pourrait en décider autrement.
    • Mehmet Simsek : le nouveau ministre des Finances a affirmé avec force que la Turquie n’avait « pas d’autre choix que de revenir à une approche rationnelle ». Il a accepté de prendre ses fonctions à condition d’être pleinement autonome dans ses choix.
    • Hafize Gaye Erkan : la nouvelle gouverneure de la banque centrale de Turquie. C’est la première femme à occuper ce poste. Elle est connue à Wall Street et était directrice de la First Republic Bank avant sa faillite.
  • Il est remarquable qu’Erdogan choisisse une équipe qui recourra aux mesures habituelles de lutte contre l’inflation, alors que lui-même affirme que sa vision est inchangée. Au cours des deux dernières années, il a écarté trois gouverneurs de banque centrale qui ne partageaient pas sa vision.

(JM)

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