Réunis ce vendredi à Bruxelles, les ministres européens de l’Énergie se sont mis d’accord autour de quelques mesures destinées à surmonter la crise énergétique en cours. Une décision a notamment été prise concernant les surprofits des entreprises produisant de l’électricité à faible coût.
Comme cela avait été annoncé plus tôt dans le mois, ces mesures consisteront:
- D’une part, en un prélèvement sur les bénéfices excédentaires des entreprises de combustibles fossiles (gaz naturel, pétrole brut, charbon et raffinage). C’est la fameuse « contribution de solidarité ». Elle sera applicable aux bénéfices imposables qui dépassent de 20% la moyenne annuelle des bénéfices imposables réalisés depuis 2018 et devra être d’au moins 33%. Temporaire, cette contribution de solidarité pourra être demandée par les États lors des exercices financiers 2022 et/ou 2023.
- D’autre part, en un prélèvement sur les recettes excédentaires que les producteurs d’électricité à faible coût (via le nucléaire, le renouvelable et le lignite) tirent de la flambée des coûts de l’électricité. Le plafond de revenus sera situé à 180 euros/MWh, du 1er décembre 2022 au 30 juin 2023.
L’argent récolté via ces deux mécanismes sera utilisé pour mettre en place des mesures de soutien aux consommateurs finaux, particuliers comme entreprises.
En outre, les ministres ont décidé d’ordonner une réduction obligatoire de 5% de la consommation d’électricité pendant les périodes de pointe, entre le 1er décembre 2022 et le 31 mars 2023. Cela se traduira principalement par la mise en place d’outils de gestion de la demande : les grands consommateurs baisseront leur consommation durant ces périodes, contre des subsides. Un objectif volontaire de réduction globale de 10% de la consommation a été aussi décrété.
Encore du pain sur la planche
Il ne s’agit là – normalement – que de la première grande salve de mesures prises par l’UE en vue de lutter contre la crise. À présent, les discussions autour d’un potentiel plafonnement des prix du gaz vont pouvoir reprendre.
Quinze pays, dont la Belgique, la France, l’Espagne et l’Italie, sont favorables à la mise en place d’un tel plafonnement. Dans le camp opposé, on retrouve notamment l’Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas ou encore l’Autriche. La Commission n’est, elle non plus, pas convaincue.
Certains estiment qu’il ne faut pas manipuler un mécanisme qui a fait ses preuves en dehors de cette période de crise. D’autres ajoutent que cela pourrait alourdir les risques pesant sur l’approvisionnement européen, car un plafonnement pourrait pousser la consommation à la hausse. La Commission évoque aussi le risque de voir le gaz être acheminé vers d’autres marchés, plus rémunérateurs.
Dans un courrier adressé cette semaine à la Commission, les quinze États favorables au plafonnement ont toutefois assuré que cette mesure ne nécessiterait pas des « ressources financières importantes » pour couvrir des achats de gaz d’urgence si les prix du marché dépassaient le plafond fixé par l’UE.
La ministre belge de l’Énergie, Tinne Van der Straeten, a calculé que seuls 2 milliards d’euros seraient nécessaires, étant donné que la plupart des importations européennes font l’objet de contrats à long terme ou arrivent par gazoduc sans qu’il soit facile de trouver d’autres acheteurs. Un montant dérisoire face aux 140 milliards d’euros que l’UE prévoit de récolter grâce à ses prélèvements sur les surprofits des entreprises énergétiques.
La Commission juge que le risque est trop élevé. Elle préférerait une mesure plus ciblée, comme un plafonnement portant uniquement sur le gaz russe. Mais de nombreux Etats membres y sont opposés : ile craignent que le Kremlin ne riposte en coupant le gaz qu’il leur envoie encore. Une menace déjà brandie par Vladimir Poutine en personne.