Contre la volonté de l’Union européenne, la Hongrie paiera dorénavant le gaz russe en roubles. Budapest se désolidarise ainsi de l’appel européen à poursuivre les paiements en euros et en dollars.
En représailles aux sanctions économiques internationales, la Russie a lancé un ultimatum : tous les pays européens devront bientôt payer leurs importations de gaz en roubles, au lieu des habituels euros ou dollars. S’ils refusent, la Russie fermera le robinet du gaz. De cette façon, Poutine veut renforcer la devise de son pays et réduire sa dépendance à l’égard de l’euro et du dollar.
Malgré ces propos menaçants, les pays européens ont collectivement gardé leur sang-froid. Les différentes capitales européennes ont fait savoir avec détermination qu’elles n’avaient pas l’intention de suivre la proposition de Poutine. Mais cette détermination unie semble maintenant montrer des fissures. La Hongrie a annoncé mercredi qu’elle se conformerait à l’ultimatum russe. Son prochain paiement pour du gaz naturel se fera en roubles.
« L’UE n’a aucun rôle à jouer dans la politique énergétique »
Le fait que la Hongrie, parmi tous les pays, ait pris cette décision n’est pas surprenant. Orbán fait de l’obstruction au sein de l’Union depuis des années, et le premier ministre n’a pas de mauvaises relations avec Moscou. En outre, la Hongrie est extrêmement dépendante des sources d’énergie russes.
Auparavant, le pays avait également refusé de bloquer un investissement russe prévu dans sa seule centrale nucléaire suite à l’invasion de l’Ukraine. Selon M. Orbán, les sanctions sévères de l’UE détruiraient son pays sur le plan économique.
Le ministre hongrois des affaires étrangères, Peter Szijjarto, a déclaré que l’UE « n’a aucun rôle à jouer » dans la politique énergétique de la Hongrie. Szijjarto a déclaré à Reuters qu’une réponse européenne commune à la Russie n’était pas nécessaire. Selon le ministre, les pays déterminent eux-mêmes ce qui est prévu dans les contrats par le biais de traités bilatéraux « et personne n’a son mot à dire sur la manière dont nous devons adapter nos propres contrats. »
Les relations de la Hongrie avec la Russie sont un sujet de discorde au sein du groupe de Visegrad, une alliance entre la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie. Ce groupe s’est associé assez étroitement depuis la crise des réfugiés de 2015, prenant régulièrement ensemble des positions opposées à diverses propositions de l’UE, notamment sur le plan de dispersion des réfugiés syriens.
Bruxelles et Zelensky sont des « adversaires »
Dimanche, le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a été réélu. Il semble qu’il se comportera encore plus durement envers l’UE au cours du prochain mandat. Dans son discours de victoire, M. Orbán a qualifié « d’adversaires » les « bureaucrates de Bruxelles » et le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Selon Euractiv, Orbán n’a pratiquement reçu aucune félicitation pour sa victoire de la part de ses collègues européens, ce qui montre que le fossé est profond.
Mardi, la Commission européenne a même annoncé qu’elle étudiait les possibilités de réduire une part importante des fonds européens dont bénéficie la Hongrie. La décision de la Commission découle des inquiétudes suscitées par l’orientation que le parti Fidesz donne à l’État de droit hongrois. Depuis son arrivée au pouvoir en 2010, M. Orbán a considérablement resserré l’emprise de son parti sur les médias et le monde des affaires hongrois, ce qui a entraîné des allégations de corruption et de clientélisme dans le pays. Selon plusieurs députés européens, la Hongrie utilise l’argent des contribuables européens pour construire un système corrompu. C’est pourquoi la Commission examine actuellement dans quelle mesure elle peut drainer ces flux de fonds à titre de sanction.
Les relations entre la Hongrie et l’Union européenne sont dans une spirale descendante depuis des années, et il ne semble pas qu’Orbán ait l’intention de baisser la voix. Le conflit avec la Russie accentue encore ces tensions.