Depuis que la Russie a commencé à envahir l’Ukraine, de nombreux pays européens tentent vaille que vaille de réduire leur dépendance énergétique vis-à-vis de Moscou. Parmi eux, l’Allemagne est particulièrement mal embarquée et se doit de s’activer massivement. Elle compte notamment sur l’hydrogène.
Ce mardi, le géant énergétique allemand E.ON et l’entreprise australienne Fortsecue Future Industries (FFI) ont annoncé s’être engagés autour d’un protocole d’accord de très grande envergure. Ensemble, les deux groupes vont étudier des pistes qui devront permettre d’acheminer jusqu’à 5 millions de tonnes d’hydrogène vert depuis l’Australie vers l’Europe.
Cela correspond à peu près à un tiers de l’énergie de chauffage que l’Allemagne importe de Russie chaque année, soit une capacité de 165 térawatts, a déclaré Andrew Forrest, le milliardaire australien qui préside FFI. Globalement, le gaz russe a représenté 55% des importations allemandes l’année dernière.
« L’énergie verte réduira considérablement la consommation de combustibles fossiles en Allemagne et contribuera rapidement à substituer l’approvisionnement énergétique russe, tout en créant une nouvelle industrie massive à forte intensité d’emploi en Australie », s’est réjoui celui qui est par ailleurs le deuxième homme le plus riche d’Australie.
E.ON compte fournir cet hydrogène vert australien à des milliers d’entreprises qui sont parmi ses clientes. Elles se situent principalement en Allemagne, mais également aux Pays-Bas. D’autres villes européennes sont également concernées, précise le groupe allemand.
Du très lourd
Une production de 5 millions de tonnes d’hydrogène vert par an nécessitera environ 60 à 70GW d’énergie éolienne et solaire, précise Renews Economy. Cela reviendra à la mise en place d’une capacité d’énergie renouvelable suffisante pour alimenter un pays de la taille du Royaume-Uni, explique le Financial Times.
C’est donc un objectif très ambitieux. Pour le remplir, Forest estime qu’il faudra des investissements à hauteur de 50 milliards de dollars. Soit l’un des plus grands investissements énergétiques jamais réalisés.
« Nous avons suffisamment d’énergie éolienne et solaire en Australie pour submerger complètement le secteur des combustibles fossiles dans son intégralité », a toutefois assuré Forrest. Il faut dire que ses ambitions vont encore plus loin, étant donné que FFI vise les 15 millions de tonnes d’ici 2030.
Au cours de l’année écoulée, FFI a déjà conclu d’autres contrats d’approvisionnement en hydrogène vert pour plusieurs milliards de dollars. Mais l’entreprise australienne n’en a pas encore commencé la production commerciale. Elle a, en revanche, commencé la construction de la plus grande installation de fabrication d’électrolyseurs au monde et prévoit de produire son premier hydrogène vert en Tasmanie d’ici 2024.
2024, c’est aussi l’année à partir de laquelle elle compte effectuer ses premières livraisons vers l’Europe, par bateau, sous forme d’hydrogène liquide et d’ammoniac vert. Il s’agira également de trouver une solution au problème de la liquéfaction et de l’expédition de vastes volumes d’un bout à l’autre du globe à un prix viable.
L’Allemagne multiplie les accords
« La course à la production et au transport à grande échelle d’hydrogène vert a pris son envol », a-t-il ajouté », a souligné le ministre allemand des Affaires économiques et de l’action pour le climat, Robert Habeck. « L’accord entre E.ON et FFI est une avancée majeure et les place en pole position pour la fourniture d’hydrogène vert à l’industrie allemande. Je félicite les deux entreprises et je salue vivement leur contribution à un avenir sans énergies fossiles. »
Dans la foulée, le ministre allemand a également annoncé que l’Allemagne avait accéléré et élargi son partenariat en matière d’hydrogène avec les Émirats arabes unis.
Il y a deux semaines, Berlin avait aussi fait savoir que des discussions étaient en cours avec Oslo en vue de la construction d’un pipeline à hydrogène vert entre la Norvège et l’Allemagne.