La crise du coronavirus a démontré à quel point l’UE ne disposait pas des outils pour réagir à une pénurie de médicaments, dont la production a été largement délocalisée. La Commission planche sur une stratégie pour éviter une nouvelle période de disette médicamenteuse.
La crise sanitaire induite par le coronavirus a mis en évidence à quel point nos sociétés mondialisées étaient vulnérables aux pénuries. Alors que le monde entier avait un grand besoin de paracétamol, d’aspirine, et autres médicaments d’un usage courant et qui permettaient d’atténuer les symptômes du Covid-19, les pays d’Europe se sont rendu compte un peu tard que toute leur production avait été délocalisée en Asie, ce qui a entrainé une véritable pénurie. En France par exemple, les pharmacies ont reçu l’ordre de rationner le paracétamol, alors qu’une partie de la population tentait de se constituer des stocks.
Des pénuries à répétition
Une situation qui a fort embarrassé l’UE et qui a aggravé la crise dans les hôpitaux, qui avaient aussi un besoin pressant de ces médicaments. Et si cette crise était sans précédent par son ampleur, il ne s’agissait pas vraiment d’un cas isolé: entre 2000 et 2018, la Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI) de l’UE a constaté que les épisodes de pénuries de médicaments avaient été multipliés par 20.
Celle-ci a donc entamé un projet de rapport « pour une politique pharmaceutique de l’UE qui répond aux futurs besoins » sous la direction de la parlementaire espagnole Dolors Monsterrat (PPE). « Le rapport renforce la stratégie pharmaceutique européenne en vue de la prochaine révision et mise à jour de la législation pharmaceutique européenne, en plaçant les patients au cœur des politiques de santé », a-t-elle résumé. Concrètement, celui-ci doit mettre à jour la politique médicamenteuse de l’Union pour 2022 et assurer l’accès à des stocks suffisants.
Dépendance asiatique
Une tâche difficile alors que 40% des médicaments consommés en Europe proviennent de Chine ou d’Inde, mais ces deux pays produisent aussi 80% des IPA (ingrédients pharmaceutiques actifs), qui servent à fabriquer les médicaments. Donc en cas de rupture de la chaine d’approvisionnement, ou d’une décision d’un de ces pays de limiter les ventes, c’est l’ensemble de l’industrie pharmaceutique qui se retrouve dans le rouge.
La Commission compte donc revaloriser les productions nationale et européenne. Une démarche de relocalisation que la France a par exemple déjà annoncée cet été, avec l’ouverture d’une nouvelle usine dédiée à la production de paracétamol. Mais elle avance aussi d’autres pistes, comme un plus grand contrôle de l’aspect financier, et une transparence accrue sur les prix pratiqués par le secteur et le financement des pôles de recherche.
Des tests à l’échelle européenne
Plus novateur: les députés proposent de mettre en place des essais cliniques à grande échelle coordonnés au niveau européen, afin d’accélérer la validation des nouveaux produits. Ils insistent également pour que la Commission, les États membres et l’Agence européenne des médicaments développent « un système d’alerte précoce pour les pénuries de médicaments, qui s’appuierait sur une plateforme numérique européenne transparente et centralisée. »
L’ensemble des membres du Parlement se prononceront sur le rapport de Dolors Monsterrat lors de la session plénière de novembre.