Ebrahim Raisi, chef du pouvoir judiciaire iranien, fait figure de grand favori de l’élection présidentielle du 18 juin prochain. Ce religieux traditionaliste de 60 ans est un proche allié du Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, dont il a gagné la confiance au fil des ans en occupant des postes clés du pouvoir. Il est considéré comme un sadique, adepte de la torture des dissidents.
- Le très conservateur Ebrahim Raisi est l’un des sept candidats restants dans la course présidentielle (dont cinq sont conservateurs) qui ont été autorisés par l’organe de contrôle des élections en Iran à se présenter à l’élection du 18 juin.
- Après avoir interdit la candidature de la plupart des grands réformateurs le 25 mai dernier, le Conseil des gardiens de la Constitution semble offrir la victoire sur un plateau d’argent à Ebrahim Raisi. Il était déjà le favori, mais la presse iranienne réformiste le qualifie désormais de ‘candidat incontournable’.
- La décision du Conseil a été initialement soutenue par Khamenei, bien qu’il ait légèrement reculé vendredi dernier, déclarant que certains des candidats rejetés pour l’élection présidentielle de ce mois avaient été ‘lésés’. Néanmoins, le Conseil des gardiens a déclaré que sa décision initiale de les exclure était toujours en vigueur.
- Candidat malheureux lors de l’élection de 2017 face à Hassan Rohani, Ebrahim Raisi revient cette fois sur le devant de la scène politique iranienne avec un nouvel élan derrière lui, conforté par les 38% de voix qu’il a obtenues lors de la précédente élection face au président désormais sortant.
- Raisi est un confident de Khamenei, qui a été l’un de ses professeurs au séminaire. Comme le dirigeant suprême, Ebrahim Raisi est originaire de la ville sainte de Mashhad, dans le nord-est de l’Iran. Ce n’est pas un hasard si Khamenei l’a nommé à la tête de la puissante fondation religieuse Astan Quds Razavi en 2016. La fondation gère le sanctuaire de l’Imam Reza – le huitième successeur du Prophète selon les chiites duodécimains – et se trouve dans la même ville de Mashhad.
- Ebrahim Raisi a fait de la lutte contre la corruption l’un des thèmes centraux de sa campagne. Dans une déclaration, il s’est présenté comme ‘l’adversaire de la corruption, de l’inefficacité et de l’aristocratie’ et il a promis de lutter sans relâche ‘contre la pauvreté’ s’il était élu.
Peine de mort et torture
En mars 2019, Ali Khamenei a nommé Raisi à la tête du système judiciaire iranien. On estime qu’il a ordonné plus de 500 exécutions au cours de ses deux premières années seulement à ce poste. L’Iran occupe la deuxième place mondiale (après la Chine) au nombre de condamnations à mort officielles par an. Les critiques du régime iranien pointent cependant que beaucoup d’autres exécutions sont susceptibles d’être effectuées, même si elles ne sont pas documentées. L’Iran est également l’un des sept pays au monde connus pour appliquer la peine de mort aux enfants.
‘L’Iran applique fréquemment la peine de mort, notamment pour des crimes comme le trafic de drogue (…)’, a déclaré John Gay, directeur exécutif de la John Quincy Adams Society, dans le magazine géopolitique américain The National Interest. ‘Le système judiciaire iranien a joué un rôle essentiel dans l’emprisonnement de dissidents […] sur la base d’accusations forgées de toutes pièces.’
L’un de ces dissidents était Farideh Goudarzi, qui avait fait ‘l’erreur’ de distribuer des tracts contre le régime. Bien qu’elle soit à quelques jours seulement de la naissance de son premier enfant, Mme Goudarzi a été sauvagement fouettée avec des câbles électriques sur la quasi-totalité du corps et giflée au visage avec une telle force qu’elle souffre encore aujourd’hui d’arthrite de la mâchoire et de crises de douleur.
‘Environ huit hommes se tenaient là pour me fouetter. Mais je me souviens surtout d’un homme – il était jeune, peut-être 21 ou 22 ans, et portait une chemise sombre. Il est resté dans un coin à regarder les autres hommes continuer à me fouetter’, a déclaré Farideh Goudarzi, aujourd’hui âgée de 59 ans, ‘Il semblait y prendre plaisir. Cet homme, c’était Ebrahim Raisi.’
Une figure hostile à l’Occident
Si Ebrahim Raisi devient président, il ne faut pas s’attendre à ce que ce partisan d’une vision ‘étatique’ préconise l’ouverture de l’économie iranienne aux investisseurs étrangers. ‘L’Iran sous Raisi continuera très probablement à investir dans les infrastructures, l’eau, l’électricité et la santé, avec une économie dominée par les fondations qu’il connaît bien et les Gardiens de la révolution (qui possèdent aussi de nombreuses entreprises, ndlr)’, a déclaré l’économiste et spécialiste de l’Iran Thierry Coville lors d’un entretien avec France 24.
Quant à l’accord sur le nucléaire iranien en cours de négociation, si Ebrahim Raisi se comportera sans doute de manière provocante à l’égard de l’Occident, il ne devrait pas s’y opposer explicitement, a ajouté Thierry Coville. Le spécialiste rappelle que c’est toujours ‘le guide suprême qui donne le ton de ces négociations’.
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