Avec la sortie du Royaume-Uni de l’UE, Gibraltar perd un allié de poids au sein des institutions européennes pour faire pression sur l’Espagne. Cédée en 1713, la ville portuaire est depuis revendiquée par son voisin du nord, avec quelques conflits importants. Mais les 34.000 habitants de Gibraltar restent profondément attachés au Royaume-Uni.
Drôle de mélange qu’est Gibraltar. Ses immeubles aux façades couvertes de faïences portugaises, ses volets colorés et ses balcons en fer forgé. Le tout accompagné de cabines téléphoniques rouges et de fish and chips.
Gibraltar c’est 34.000 habitants, pour 15.000 travailleurs transfrontaliers et 10 millions de touristes par an. Le tourisme, c’est le coeur économique de l’enclave britannique.
Le Brexit fait donc peur au secteur et aux commerçants. La liberté des voyageurs sera-t-elle inchangée? Le contrôle à la frontière provoquera-t-il d’énormes bouchons?
‘Je pense que ça va décourager les gens de visiter Gibraltar’, estime Prem Mahtani, un joaillier de 41 ans dont la famille gère quatre commerces dépendant du tourisme à Gibraltar, dans des propos repris par l’AFP.
L’Espagne et Gibraltar
L’Espagne et Gibraltar, c’est une longue histoire conflictuelle. Les tensions étaient à leur comble en 1969, sous le régime du dictateur Francisco Franco. Il décida cette année là de fermer la frontière, l’Espagne ne l’a pas rouverte complètement avant 1985.
En fait, l’Espagne revendique ce petit territoire d’à peine 6,8 km2 depuis des siècles. Le dernier conflit en date est celui de 2013. Il concernait un litige d’un petit récif artificiel. Ce litige avait provoqué des kilomètres d’embouteillages à la frontière.
Avec le Royaume-Uni qui sort des institutions européennes, il pourra sans doute moins faire pression sur l’Espagne. C’est en tout cas ce que les habitants et les autorités redoutent. Si un nouveau conflit venait à venir, qui pourrait empêcher l’Espagne de mettre des bâtons dans les roues de son voisin.
Pour le moment, le gouvernement de gauche espagnol a laissé de côté la question.
Les Gibraltariens sont attachés au Royaume-Uni, mais…
En 2002, l’Espagne avait proposé une souveraineté partagée avec le Royaume-Uni. Une proposition rejetée à 99% par les habitants de la ville portuaire.
En 2016 toutefois, les Gibraltariens ont voté à 96% pour le maintien de leur territoire dans l’UE. Il faut dire que la péninsule importe quasiment toute sa nourriture et est donc très dépendante de l’extérieur. Chaque blocage à la frontière faire retenir à Gibraltar son souffle.
De quoi les faire changer d’avis sur la proposition de cogestion de l’Espagne ? ‘S’il y avait un bon accord qui leur permettait d’avoir une autonomie gouvernementale et de garder la base militaire britannique, cela pourrait les convaincre de surmonter la grande méfiance qu’ils ont à l’égard de l’Espagne’, explique à l’AFP Ignacio Molina, un analyste de l’Institut Royal Elcano, un ‘think tank’ madrilène.
Mais face aux velléités espagnoles, le chef du gouvernement de Gibraltar est formel: ‘Être britanniques, c’est ce que nous sommes, c’est le sang qui coule dans nos veines, c’est notre culture, notre éducation, c’est notre mode de vie.’