Boycott de Facebook: beaucoup de bruit pour rien?

Toute une série d’entreprises connues et moins connues ont temporairement arrêté leurs campagnes publicitaires sur Facebook. Elles protestent ainsi contre le flux incessant de messages racistes et haineux sur le réseau social. Parmi elles se trouvent plusieurs grands noms comme Unilever et Coca-Cola. Ce boycott reçoit beaucoup d’attention dans la presse, mais il pourrait en fin de compte se révéler guère pertinent.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. De toutes les entreprises qui ont jusqu’à présent annoncé un boycott, Unilever est celle qui dépense le plus sur le réseau social de Mark Zuckerberg: 42,4 millions de dollars en 2019.

Les 100 premiers annonceurs = 6% des revenus de Facebook

Les 100 entreprises qui dépensent le plus sur Facebook y ont injecté 4,2 milliards de dollars l’année dernière. Parmi elles se trouvent une série de géants, comme Walmart, Microsoft ou encore Disney. Mais ensemble, elles ne représentent qu’à peine 6% des recettes totales de la plateforme.

Le reste des revenus est généré par environ 8 millions de PME (voir le tableau des statistiques ci-dessous). Facebook peut être qualifié de ‘miracle des petites entreprises’, car avec leurs budgets publicitaires limités, elles n’ont nulle part d’autre où aller. L’impact du boycott, annoncé en fanfare, a donc une grande valeur symbolique, mais guère de pertinence économique pour le moment.

Les entreprises qui annoncent un boycott gagnent sur deux tableaux. D’une part, suite à la crise du coronavirus, elles prévoyaient de toute façon de réduire leurs dépenses publicitaires. Mais en faisant porter le chapeau à Facebook, elles génèrent par la même occasion un bon coup en termes de relations publiques.

Les PME ont peu d’alternatives

Mais Facebook s’en tire également bien puisque Mark Zuckerberg a d’ores et déjà annoncé vendredi que son entreprise allait tirer les leçons des récents événements et faire encore davantage pour bannir les messages haineux et racistes de son réseau. En d’autres termes, le géant semble prendre ses responsabilités. Facebook fait également clairement savoir ‘qu’il ne prend jamais de décisions sur base du flux des revenus et qu’il ne fait qu’imposer les changements annoncés précédemment’.

Cela ne change absolument rien au fait que Facebook demeure tout simplement un monopole. Une petite ou moyenne entreprise n’a tout simplement pas le choix. À eux deux, Facebook et Google ont pris tous les petits annonceurs en tenaille.

Quiconque dirige par exemple une entreprise de vélos à Roulers peut rapidement et facilement atteindre un grand nombre de personnes dans son groupe cible, et ce de manière relativement peu coûteuse et uniquement dans sa propre région. Qui peut rivaliser avec une telle offre?

Les politiciens sont également devenus dépendants de Facebook

Le boycott a été accueilli avec enthousiasme par la plupart des gens et c’est une bonne chose. Mais là encore, on crée l’illusion que quelque chose va changer, alors que c’est en fait peu probable. Ce ne sera que lorsque des centaines de milliers de petits annonceurs quitteront le giron de Facebook, pendant une longue période, que cela pourrait avoir un impact sur les revenus de Mark Zuckerberg.

Il ne faut pas non plus s’attendre à grand-chose de la part des gouvernements. Les politiciens – y compris chez nous – sont devenus dépendants de Facebook. À tel point que le magazine satirique en ligne ‘The Onion’ a titré la semaine dernière que ‘les chances que Facebook fasse tomber le gouvernement sont aujourd’hui plus grandes que celles que le gouvernement fasse tomber Facebook’.

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