Face à l’hécatombe dans ses maisons de repos, la Suède revoit sa stratégie

Portée aux nues par certains pour sa stratégie à contre-courant des confinements stricts imposés un peu partout ailleurs en Europe et dans le monde, la Suède semble aujourd’hui confrontée aux limites de son choix.

Alors que le taux de mortalité dans les maisons de repos du pays atteint désormais des niveaux alarmants, la Suède a en effet décidé d’ajuster sa stratégie de lutte contre la Covid-19 dans ces établissements, rapporte l’agence Bloomberg.

Le gouvernement du Premier ministre Stefan Lofven devrait consacrer environ 2,2 milliards de couronnes – plus de 200 millions d’euros – afin d’augmenter les effectifs pour protéger les citoyens les plus âgés, a-t-il annoncé ce mardi. Deux milliards de couronnes supplémentaires serviront à indemniser les autorités locales pour les coûts extraordinaires engendrés par la pandémie.

Hécatombe et enquête

La moitié des personnes de plus de 70 ans décédées des suites de la Covid-19 en Suède résidaient en maisons de repos, selon les chiffres officiels datant de la fin du mois d’avril. Début mai, une enquête a même été ouverte concernant le taux de mortalité particulièrement élevé dans l’un de ces établissement de soins.

Ces derniers temps, des voix se sont élevées, estimant qu’une partie de ces morts auraient pu être évitées si des mesures plus strictes à l’égard des personnes les plus vulnérables avaient été prises.

En Suède, les écoles, les restaurants et les magasins sont restés ouverts depuis le début de la pandémie, les autorités comptant sur les citoyens pour suivre les directives de distanciation sociale.

Fin avril, l’épidémiologiste irlandais Michael Ryan, expert auprès de l’OMS, estimait pourtant que la nation scandinave avait mis en place un ‘plan de santé très solide’, dans un entretien avec le Svenska Dagbladet. Et que ce plan suédois pourrait bien devenir le modèle pour atteindre ‘la nouvelle normalité’.

Des morts (in)évitables?

Selon l’épidémiologiste suédois, Anders Tegnell, les mesures de confinement strictes pour lutter contre la Covid-19 ne sont pas pertinantes sur le long terme car une fois levées, les taux d’infection repartiront à la hausse. Selon lui, des restrictions modérées, comme celles qui ont été mises en place en Suède, sont plus efficaces sur le long terme.

Dans le courant du mois d’avril, un autre épidémiologiste suédois de renommée internationale, Johan Giesecke, déclarait déjà que seules les personnes âgées et vulnérables devraient être protégées. ‘L’affaiblissement de la courbe qui est actuellement (en avril, NDLR) mesurée dans plusieurs pays européens résulte autant de la mort prématurée de personnes vulnérables que de l’isolement lui-même. Pendant le déconfinement (…), vous devrez encore faire face aux décès que nous avons déjà eu ici.’

Ce lundi, la Suède comptait officiellement 3.256 décès liés à la Covid-19.

La douloureuse comparaison avec le Danemark

Si comparaison n’est pas raison, un coup d’œil du côté du voisin danois a tout de même de quoi interpeller. Là-bas, un confinement strict a été rapidement mis en place, et le pays affiche un taux de mortalité de 9 pour 100.000 personnes. En Suède, ce taux est presque 4 fois supérieur: environ 32 pour 100.000.

Certes, grâce à ces mesures légères, l’économie suédoise s’en est mieux sortie que d’autres, mais celle du Danemark reprend néanmoins progressivement des couleurs, elle qui en est à la seconde phase de sa réouverture. Les magasins ont rouvert leurs portes cette semaine, et les musées et les cinémas devraient bientôt suivre. Les écoles primaires accueillent à nouveau des élèves depuis la mi-avril.

Et le Danemark affiche toujours un taux d’infection en baisse.

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