Le New York Times affirme que le RGPD, le nouveau règlement de l’Union européenne concernant les données personnelles, pourrait en pratique favoriser les géants de l’Internet qu’il vise à encadrer, plutôt que les forcer de respecter la confidentialité des données personnelles.
En effet, le RGPD (Règlement général sur la protection des données), qui entre en vigueur le 25 mai prochain, a pour objectif d’éviter que les géants du net ne forcent leurs consommateurs à leur céder le contrôle sur leurs données personnelles en échange de services.
Les nouvelles règles visent à encadrer la manière dont les entreprises de l’Internet collectent, conservent et utilisent les données personnelles des citoyens européens. Les firmes seront désormais obligées d’expliquer à leurs utilisateurs ce qu’elles comptent faire de leurs données personnelles dans un langage simple et dépourvu d’ambiguïtés. Elles devront également indiquer quelles sont les autres firmes qui pourront avoir accès à ces données. De même, elles devront obtenir l’autorisation expresse et éclairée de leurs utilisateurs pour employer ces données personnelles de la manière prévue.
Le RGPD renforcera la suprématie de Google et Facebook
Mais certaines des restrictions du RGPD ont une conséquence non prévue : elles renforcent la suprématie de Facebook (2,2 milliards d’utilisateurs mensuels) et de Google (1,5 milliard d’utilisateurs pour son service YouTube). En effet, ces 2 géants peuvent s’appuyer sur leur taille et le niveau d’élaboration de leurs services pour s’imposer auprès des consommateurs européens.
En outre, la nouvelle réglementation pourrait dissuader les start-ups qui ne disposent pas des ressources pour se conformer aux nouvelles règles de tenter de s’imposer sur le marché.
Certains annonceurs envisagent déjà de bouder les petits sites pour confier leurs publicités à Google et Facebook, qui réclament déjà systématiquement et de façon expresse l’autorisation d’utiliser les données à leurs internautes.
« Les réglementations aident ceux qui sont déjà en place », observe Avi Goldfarb, professeur de marketing à l’université de Toronto. Il est l’auteur d’un rapport publié en 2013 qui indiquait qu’une réglementation sur les données personnelles pourrait mener à une concurrence déloyale, car obtenir l’autorisation des internautes d’utiliser leurs données personnelles coûtera bien plus cher aux nouvelles entreprises, qu’à celles qui sont déjà bien installées.
Toutes les initiatives pour contenir les géants de l’internet se soldent par des fiascos
En fin de compte, les tentatives passées pour contenir la domination des géants de l’internet n’ont jamais réellement abouti, et sur le long terme, elles ne les ont jamais entravés.
Par exemple, la décision de la Haute Cour de justice européenne d’accorder le « droit à l’oubli en ligne« , a finalement abouti à conférer plus de pouvoirs à Google qui s’érige désormais en arbitre pour déterminer quelles informations peuvent être conservées en ligne en Europe, car c’est à lui qu’il incombe d’étudier la recevabilité des demandes de suppression d’informations.
De même, la directive de 2011 qui oblige les sites Internet à avertir les internautes de la présence de cookies n’a pas eu l’effet escompté, et apparaît désormais comme une nuisance. La plupart des internautes cochent machinalement la boîte de dialogue les informant qu’une collecte de leurs informations sera réalisée au moyen des cookies sans même la lire, parce qu’ils ne veulent qu’une chose : se débarrasser de cette fenêtre « pop-up » intempestive qui entrave leur lecture.
Le scandale lié à la divulgation des données personnelles de plus de 80 millions d’internautes par la société Cambridge Analytica par l’entremise de Facebook n’a eu que très peu d’impact sur le chiffre d’affaires de Facebook. Alphabet, la filiale de Google qui aurait pu être éclaboussée elle-même par ce scandale, parce qu’elle pratique également une collecte massive de données, a même vu son chiffre d’affaires bondir de 26 % au cours du dernier trimestre.