Un cygne noir vient de passer discrètement: la Chine veut payer son pétrole brut en yuans

Trois sources ont indiqué à Reuters que la Chine avaitcommencé à prendre des mesures pour régler ses importations de pétrole brut en yuansplutôt qu’en dollars. Elle pourrait même débuter un projet pilote dans ce sens dèsle second semestre, notamment pour ses achats de pétrole russe.

Actuellement, seulement une fraction des règlementsinternationaux ou domestiques enregistrés par le réseau mondial SWIFT sonteffectuées en yuans. Le yuan est la 5e monnaie la plus utilisée aumonde, derrière le dollar, le yen, la livre sterling et l’euro. Le volume depaiements effectués en yuans n’a représenté que 1,6 % du total l’année dernière,contre 39,8 % pour le dollar.

Le yuan a des arguments pour rattraper l’euro,la livre et le yen

La Chine est désormais le plus gros acheteur de pétrole brutdu monde, devant les États-Unis, qu’elle vient de dépasser. Or, le pétrole brutest la matière première la plus échangée dans le monde. 

Le projet de la Chine de payer le pétrole en yuans pourraitdonc contribuer à faire de celle-ci l’une des monnaies majeures du commerceinternational, exactement ce qu’ambitionne le président chinois Xi Jinping.

Selon les 3 sources, qui émanent d’institutions financières,des régulateurs chinois auraient demandé de manière informelle à cesinstitutions de se préparer pour revaloriser les importations de pétrole de laChine en yuans. Apparemment, les premières importations concernées seraientcelles provenant de la Russie et de l’Angola. Ces 2 nations, qui sont d’importantsfournisseurs pour la Chine, sont toutes 2 désireuses de mettre fin à ladomination du dollar.

Par la suite, en cas de réussite, d’autres transactionspourraient être payées en yuans. La Chine importe aussi plus de la moitié del’aluminium produit sur la planète, et presque la moitié de l’acier et ducuivre. Cela lui confère un énorme pouvoir pour imposer sa monnaie.

Les Chinois avaient déjà commencé à imposer le yuan

Ces dernières années, le yuan a gagné de l’importance. Ilest devenu une monnaie de référence pour le fonds monétaire international(FMI), qui l’a inclus dans le panierdes droits de tirages spéciaux (DTS) aux côtés du dollar, de l’euro,de la livre sterling et du yen. La Chine a déjà manifesté qu’elle souhaitaitdévelopper l’usage du yuan dans les transactions internationales.

Depuisplusieurs années, le pays conclut des accords avec ses partenaires commerciauxpour effectuer les paiements de ses échanges bilatéraux en yuan. Au mois dejuillet dernier, la Chine a proposé de régler son pétrole à l’Arabie Saouditeen yuans. Même si l’Empire du Milieu a réduit la part de l’Arabie Saoudite dansson approvisionnement en or noir, elle demeure le principal acheteur de cepays, ce qui ne laisse guère de choix à ce dernier.

Un autre événement convergent, tout aussi discret

Un certain nombre d’analystes avaient prévu cette évolution.Par exemple, JeffreyMoore, senior analyst chez Global Risk Insights, avait qu’en 2018, la Chinepourrait imposer sa monnaie pour qu’elle supplante le dollar comme monnaie deréférence internationale.

Par ailleurs, cette semaine, un autre événement, convergent ettout aussi discret, s’est produit : la Chine a lancé uncontrat de futures sur le pétrole brut à la bourse de Shanghai… en yuans,bien sûr. Tous les investisseurs internationaux, aussi bien que chinois peuventinvestir dans ce contrat. Selon certains experts, il est voué à devenir le 3eétalon pour la fixation du cours du pétrole, aux côtés du Brent et du WTI (WestTexas Intermediate crude).

Un cygne noir

Or, à la fin de l’année dernière, la banque danoise SaxoBank a publié comme à son habitude une liste de 10 prédictions « scandaleuses »pour l’année à venir, c’est à dire des 10 cygnes noirs qui pourraient selonelle se produire en 2018. Les « cygnes noirs » (‘Black Swans’), sontdes événements extrêmes qui surprennent et ont un impact majeur, puis sontrationalisés par des explications a posteriori.

Elle avait notamment prédit que la Chine pourrait déployerun ‘ »petro-renminbi », c’est à dire, que la Bourse Internationalede l’Energie à Shanghai pourrait décider de régler toutes ses importations depétrole avec des contrats à terme basés en yuan, et non plus en dollars. Cetteprédiction vient donc de se concrétiser. Reste à savoir si elle aura lepotentiel disrupteur que la Saxo Bank lui attribuait…  

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